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jeudi 20 juillet 2017

Agatha - Un film de Michael Apted (1979)



Agatha
Un film de Michael Apted librement inspiré de la vie d'Agatha Christie, sorti en 1979.

Avec : Vanessa Redgrave, Dustin Hoffman, Timoty Dalton ...

  1926. Distinguée par l'intelligentsia londonienne pour son roman, «Le Meurtre de Roger Ackroyd» qui remporte un grand succès, aussi bien critique que public, Agatha Christie ne parvient pas à trouver les mots de remerciement qui s'imposent. Il est vrai qu'elle a d'autres soucis en tête : son couple, en pleine crise, vit des instants délicats et décisifs. En effet, la secrétaire de son mari, un colonel, s'est définitivement immiscée dans le coeur de cet homme trop sentimental. Agatha se refuse au divorce et disparaît. Elle se rend à Harrowgate, une célèbre ville de cure, où elle est certaine de retrouver la séduisante secrétaire... 

***



  Après le décevant Agatha es-tu là? de Perge et Rivière et en attendant de lire les autres romans sortis quasi-simultanément sur le même sujet, je me suis essayé à ce film presque inédit traitant également de la mystérieuse disparition d'A.Christie en 1926, et qui me faisait de l’œil depuis longtemps.
  "Presque inédit" car jamais diffusé dans l'hexagone depuis sa sortie, et ce jusqu'à une très récente collection de dvd éditée par la Warner et réunissant les chef-d’œuvres oubliés du polar anglo-américain. N'ayant jamais été doublé, ce film sera donc à découvrir en VO sous-titrée, mais honnêtement, qui s'en plaindra? Le plaisir en sera d'autant plus grand...


  "Chef d’œuvre méconnu" vante la Warner. Le film n'a pourtant pas fait l'unanimité lors de sa sortie en salles. Il faut dire qu'il partait avec de sérieux handicaps : tout d'abord la fille d'Agatha Christie s'opposait radicalement au projet, puis Vanessa Redgrave chercha à imposer un ami à elle pour la musique, et enfin Dustin Hoffman refusait de finir le tournage si l'on n' ajoutait pas plus de scènes de romance. Ajoutons à cela quelques problèmes de distribution et c'est presque un miracle qu'il soit finalement sorti sur grand écran. De son succès mitigé et des controverses qu'il entraina, on n'en retient qu'une nomination aux oscars du meilleur costume et une étiquette de film d'auteur qui le condamne à passer inaperçu.



  Injustement, je dirais. Car au Terrier, on a adoré! Certes, la position de la fille d'Agatha, qui venait tout juste de perdre sa mère, est des plus compréhensibles :  une telle interprétation d'un membre éminent et aimé de sa famille a de quoi scandaliser ses proches. Mais avec le recul, d'un point de vue strictement fictionnel et cinématographique, l'intérêt de ces 11 jours de disparition dont on ne sait toujours rien est qu'on peut imaginer N'IMPORTE QUEL scénario, pour peu qu'il tienne en haleine le lecteur/spectateur. Et cela, on peut même le reconnaître à Perge et Rivière pour leur roman... ou encore au livre Crimes temporels de P.Carta et à l'épisode Agatha Christie mène l'enquête de la série Dr Who, qui proposent tous les deux une issue paranormale à cette énigme historique.



  Mais la réussite d'Agatha est de s'emparer de ce fait-divers et de le raconter comme... un roman d'Agatha Christie : avec finesse et psychologie. Voire avec une légère tendance machiavélique également, même si elle n'est présente qu'en terme de potentiel, de façon subliminale. Bien que l'histoire soit complètement fantasmée, ce film a le mérite de questionner une particularité non négligeable de la personnalité d'Agatha Christie : sa part d'ombre, celle qui se dissimulait derrière la façade de la charmante petite dame anglaise, mais qui existait pourtant bel et bien à l'origine de tous ses meurtres littéraires quasi-parfaits. Car on ne pourra pas nier qu'il lui fallait bien une certaine noirceur pour écrire avec un tel talent de tels romans...



  Pour autant, l'autre grande force de ce vrai-faux biopic est son côté dramatique, et même romantique, ce que la grande Vanessa Redgrave interprète aussi bien que les aspects plus sombres du personnage. Elle est d'une grande crédibilité dans tout le panel d'émotions qu'elle exprime à l'écran, très touchante et parfois presque effrayante lorsqu'on la voit mettre sa terrible intelligence à l'épreuve. A ces côtés, Dustin Hoffman est lui aussi très convainquant dans son rôle de journaliste flegmatique à souhait, créé de toute pièce pour le film. Mais comme on l'a dit plus haut, on veut bien du romanesque du moment qu'il nous est bien servi, et dans cet ordre d'idée, ce film est à la vraie Agatha Christie ce que le film Fur est à la vraie Diane Arbus : un très beau portrait imaginaire.



  La photographie est d'une élégante sobriété et, le recul aidant - mais aussi parce que l'époque est presque la même et qu'il est difficile de ne pas faire d'assimilation - évoque l'atmosphère des premiers épisodes de la série Agatha Christie's Poirot, avec David Suchet.



  Je conclurai en citant cette phrase que Dustin Hoffman déclare à Vanessa Redgrave à la fin du film : "Vous êtes comme vos romans, il y a toujours une surprise à la fin", car on est mené par le bout du nez tout du long et la résolution qu'on imagine toute tracée surprend d'un dénouement totalement inattendu qui ajoute un cachet supplémentaire.



En bref : Un film à redécouvrir pour ce qu'il est : un très beau portrait imaginaire de la romancière, biopic fantasmé à mi-chemin entre le polar et le drame romantique. Très bien joué, très bien filmé, tout en psychologie, cette production inattendue fait d'Agatha Christie une héroïne... d'Agatha Christie.

Et pour aller plus loin...


-A lire : trois romans parus quasi-simultanément ainsi qu'une BD, plus ancienne, qui brodent également autour de la disparition d'Agatha Christie :
  - Agatha, de F.Deghelt.
  -Agatha, le chapitre disparu, de B.Kernel 
  -Agatha, la vraie vie d'Agatha Christie, de G.lebeau, A.Franc, et A.Martinetti (qui a par ailleurs signé de nombreux ouvrage sur Christie à quatre mains avec F.Rivière).
 

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