L'histoire de Louise et de Paul, déserteur travesti, dans le Paris des années folles.
Paris, 1911. Paul Grappe et Louise Landy s’aiment et se marient.
Survient la guerre. Paul déserte, se travestit en femme pour ne pas être
arrêté et, pendant dix ans, aux yeux de tous, vit avec Louise sous
l’identité de Suzanne Landgard. Il entraîne son épouse dans de multiples
jeux sexuels et acquiert même une petite notoriété en étant l’une des
premières "femmes" à sauter en parachute. En 1925, avec l’amnistie,
Suzanne redevient Paul. Pour le couple, les choses commencent alors à se
gâter...
A partir d’archives étonnantes (photos, lettres, journaux intimes, documents judiciaires), Fabrice Virgili et Danièle Voldman racontent la très curieuse - et tragique - histoire de Paul et Louise, une histoire qui brasse les questions des traumatismes de guerre, du travestissement, de l’homosexualité, des "troubles dans le genre", de la virilité, des violences conjugales et de la complexité des sentiments amoureux.
A partir d’archives étonnantes (photos, lettres, journaux intimes, documents judiciaires), Fabrice Virgili et Danièle Voldman racontent la très curieuse - et tragique - histoire de Paul et Louise, une histoire qui brasse les questions des traumatismes de guerre, du travestissement, de l’homosexualité, des "troubles dans le genre", de la virilité, des violences conjugales et de la complexité des sentiments amoureux.
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L'Histoire a pu témoigner à travers la littérature de nombreux cas de travestissements. Œuvres de fiction vaguement inspirées de faits réels ou restitutions au plus près du véridique, des récits comme Albert Nobbs, Le secret du Dr Barry ou même Que le spectacle commence d'A.Featherstone traduisent la difficulté de vivre son sexe dans des époques troublées, et la nécessité de franchir la barrière du genre pour survivre. Si les trois titres cités évoquaient exclusivement des femmes contraintes à une transformation en homme pour accéder aux études, à un métier, ou pouvoir échapper à une condition sociale miséreuse, on oublie tous ces hommes qui ont eu aussi, en ces siècles passés, à devenir des femmes. Histoire de contrainte ou de hasard, aspiration ou émergence d'un troisième sexe, ces faits divers ou littéraires (lorsqu'ils étaient en partie ou totalement fantasmés, et alors souvent censurés) viennent montrer que le transgenre est loin d'être une apparition récente. Le cas Louise et Paul Grappe en fait partie.
Cette célèbre affaire - qui va du fait divers sulfureux au crime passionnel - a récemment connu une adaptation au cinéma par André Téchiné sous le titre Nos Années folles, essentiellement basée sur ce récit écrit à 4 mains et qui, fort d'une importante recherche et d'une impressionnante collecte d'archives, reprend chronologiquement cette étrange histoire. Louis et Paul, un couple comme il en existe des tas dans le Paris de 1914 : elle est petite main en atelier, lui est opticien, envoyé au front lorsque la guerre éclate. D'un tempérament assez électrique déjà dans sa jeunesse, Paul ne tarde pas à s'opposer à la direction militaire... puis très vite, tout s'accélère : une blessure qu'on suspecte volontaire, la réforme tant souhaitée qui ne vient pas et hop, voilà que Paul s'évanouit. A la place nait Mlle Suzanne Landgard qui, dans ce monde désormais composé de femmes, vit en colocataire aux côtés de Louise Grappe sans que l'on suspecte son vrai visage.
On ne sait si l'idée vint de Paul ou de Louise, sachant que, comme le soulignent les auteurs, rien dans le passé de Paul ne prédestinait au travestissement, et encore moins à une sexualité à multiples visages. En effet, l'existence de Suzanne ne s'est pas arrêtée à une nécessité de survie, à un simple "masque" quotidien : très vite, celle qu'on a surnommé à l'époque la "Jolie Suzy" est devenue une vraie vedette du Paris des Années Folles, allant jusqu'à faire la une des journaux pour ses prestations sportives de parachutiste. Arborant une coupe à la garçonne et fréquentant le Bois de Boulogne, Paul/Suzy entraîne Louise dans le monde de la prostitution et de l'échangisme, se découvrant des penchants homosexuels insoupçonnés et enchaînant les maîtresses comme les amants.
Mais la guerre terminée, la lassitude (et le dégout?) de cette vie de couple à la tournure particulière incite Louise à demander l'amnistie pour son époux déserteur. Celle-là accordée, Suzanne pouvait disparaître pour laisser place à Paul, et avec lui,à une vie de couple ordinaire. Mais une fois redevenu l'homme qu'il était, Paul sombre dans l'alcool et la dépression, ne vivant plus que dans le souvenir de Suzanne Landgard. Qui, de Paul ou Suzanne, est-il vraiment? Alors que son histoire explose au grand jour et que la presse à scandale s'empare de l'affaire ("La célèbre parachutiste était un homme!"), la vie de couple se dégrade jusqu'à ce soir fatal de 1928 où un meurtre est commis. Mais, de Paul devenu femme puis mari violent, ou de Louise, épouse dévouée devenue l'homme de la maison, qui est la garçonne, qui est l'assassin?
Croisant vie intime et scène social dans l'entre-deux guerre, cet ouvrage interroge avec pertinence la question du genre en période de trouble et son caractère plus réversible qu'on ne le pense. Le fait-divers se recoupe ainsi avec des questions sociologiques et philosophiques plus vastes qui, près de cent ans plus tard, sont toujours d'actualité.
En bref : Mêlant petite et grande Histoire, La garçonne et l'assassin vient questionner les aspects sulfureux, sociologique et psychologique du transgenre à l'occasion d'un fait-divers qui, il y a un siècle, suscitait déjà la fascination. Un travail d'archives et de réflexion abondamment illustré, à découvrir.
Et pour aller plus loin...
-A lire:
- La BD Mauvais Genre, adapté du même fait-divers.
-A voir :
Le film d'André Téchiné Nos années folles.
Nos Années folles, d'André Téchiné, adapté de l'histoire de Louise et Paul Grappe.
Cette célèbre affaire - qui va du fait divers sulfureux au crime passionnel - a récemment connu une adaptation au cinéma par André Téchiné sous le titre Nos Années folles, essentiellement basée sur ce récit écrit à 4 mains et qui, fort d'une importante recherche et d'une impressionnante collecte d'archives, reprend chronologiquement cette étrange histoire. Louis et Paul, un couple comme il en existe des tas dans le Paris de 1914 : elle est petite main en atelier, lui est opticien, envoyé au front lorsque la guerre éclate. D'un tempérament assez électrique déjà dans sa jeunesse, Paul ne tarde pas à s'opposer à la direction militaire... puis très vite, tout s'accélère : une blessure qu'on suspecte volontaire, la réforme tant souhaitée qui ne vient pas et hop, voilà que Paul s'évanouit. A la place nait Mlle Suzanne Landgard qui, dans ce monde désormais composé de femmes, vit en colocataire aux côtés de Louise Grappe sans que l'on suspecte son vrai visage.
Suzanne, alter-ego féminin de Paul.
On ne sait si l'idée vint de Paul ou de Louise, sachant que, comme le soulignent les auteurs, rien dans le passé de Paul ne prédestinait au travestissement, et encore moins à une sexualité à multiples visages. En effet, l'existence de Suzanne ne s'est pas arrêtée à une nécessité de survie, à un simple "masque" quotidien : très vite, celle qu'on a surnommé à l'époque la "Jolie Suzy" est devenue une vraie vedette du Paris des Années Folles, allant jusqu'à faire la une des journaux pour ses prestations sportives de parachutiste. Arborant une coupe à la garçonne et fréquentant le Bois de Boulogne, Paul/Suzy entraîne Louise dans le monde de la prostitution et de l'échangisme, se découvrant des penchants homosexuels insoupçonnés et enchaînant les maîtresses comme les amants.
La Jolie Suzy, au Bois de Boulogne.
Mais la guerre terminée, la lassitude (et le dégout?) de cette vie de couple à la tournure particulière incite Louise à demander l'amnistie pour son époux déserteur. Celle-là accordée, Suzanne pouvait disparaître pour laisser place à Paul, et avec lui,à une vie de couple ordinaire. Mais une fois redevenu l'homme qu'il était, Paul sombre dans l'alcool et la dépression, ne vivant plus que dans le souvenir de Suzanne Landgard. Qui, de Paul ou Suzanne, est-il vraiment? Alors que son histoire explose au grand jour et que la presse à scandale s'empare de l'affaire ("La célèbre parachutiste était un homme!"), la vie de couple se dégrade jusqu'à ce soir fatal de 1928 où un meurtre est commis. Mais, de Paul devenu femme puis mari violent, ou de Louise, épouse dévouée devenue l'homme de la maison, qui est la garçonne, qui est l'assassin?
Croisant vie intime et scène social dans l'entre-deux guerre, cet ouvrage interroge avec pertinence la question du genre en période de trouble et son caractère plus réversible qu'on ne le pense. Le fait-divers se recoupe ainsi avec des questions sociologiques et philosophiques plus vastes qui, près de cent ans plus tard, sont toujours d'actualité.
En bref : Mêlant petite et grande Histoire, La garçonne et l'assassin vient questionner les aspects sulfureux, sociologique et psychologique du transgenre à l'occasion d'un fait-divers qui, il y a un siècle, suscitait déjà la fascination. Un travail d'archives et de réflexion abondamment illustré, à découvrir.
Et pour aller plus loin...
-A lire:
- La BD Mauvais Genre, adapté du même fait-divers.
-A voir :
Le film d'André Téchiné Nos années folles.
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