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mardi 31 décembre 2019

Merry murderous christmas and best roaring wishes !


  Juste à temps pour respecter la tradition, voici le tant attendu article de vœux d'entre-deux fêtes annuel, lequel met cette année à l'honneur l'honorable Miss Fisher et les pétillantes années 1920! Nous sommes ravis de vous accueillir pour cela au domicile de la détective, tel que cela avait été annoncé dans notre article d'introduction, au 221b l'Esplanade, St Kilda, à Melbourne

 Miss Fisher's house, by night...

  Ce sont les deux acolytes chauffeurs de la lady détective, Cec et Bert, qui vous déposent dans leur taxi rutilant devant la superbe demeure de Miss Fisher. Le jazz bat son plein à l'intérieur ; inutile de sonner, vous êtes attendu, contentez-vous de passer la porte. Mademoiselle Dorothy "Dot" Williams vous accueille dans le hall pour vous débarrasser de votre manteau – vous complimentant au passage sur le choix de votre tenue pour la soirée – puis vous invite à rejoindre le petit salon où sont servis les rafraichissement. Vous arrivez juste à temps, on allait trinquer, vous explique Mademoiselle Williams ; vite, vous rejoignez la pièce d'où proviennent la musique et les rires : le salon est tapissée de motifs Art-Déco vert et or que soulignent les décorations de Noël. Tout respire la joie et la bonne humeur, lorsque soudain...



PAN!

  Tout le monde sursaute, puis se fige. Que se passe-t-il? Un coup de feu? Il faut s'attendre à tout, au domicile de la célèbre détective. Mais fort heureusement, ce n'était qu'un bouchon de champagne : Mr Butler vient d'ouvrir un bouteille bien fraiche et remplit maintenant une pyramide de coupes savamment empilées les unes sur les autres dans un équilibre qui tient du prodige, transformant la construction éphémère en fontaine de cristal et de vin pétillant. Une fois tous les verres pleins, le majordome fait le tour de l'assemblée et propose une coupe à chaque invité. La maîtresse de maison entre à cet instant, vêtue d'une somptueuse robe de soirée, et lève son verre pour porter un toast :

Joyeux Noël
(avec un petit retard)
et
Très Belle Année!
(à peine en avance)


  Vous avez bien le temps de faire un petit tour du propriétaire, pendant que vous sirotez le contenu de votre coupe, n'est-ce pas? Cela ne prendra qu'un instant...


"Des paquets aux formes intrigantes, emballés de joli papier, étaient empilés sous le sapin d'or et d'argent de Phryne." 


   Commençons avec la pièce maîtresse de ces fêtes de Noël : le sapin. Phryne semble avoir sorti le grand jeu, avec cet arbre de Noël qui met en relief les tons verts de sa décoration habituelle, le tout orné de boules scintillantes bleues et vertes aux motifs géométriques représentatifs du graphisme des années 1920, et d'une audacieuse guirlande de sequins dorés comme on pourrait en broder une robe. Un sapin à la pointe de la mode, donc.


"What's in Phryne's bag?"

  La détective semble avoir laissé là un magnifique petit sac (celui-là aussi à la pointe de la mode), dont le contenu s'est renversé sur le buffet. Sans donner l'impression de fouiller, peut-être pourrions-nous jeter un œil pour en apprendre un peu plus sur l'intimité de la célèbre aventurière...?


"Phryne sourit en songeant aux trois malles-cabines, aux deux valises, au grand sac et au sac à main qui se trouvaient dans sa cabine, et aux sept grosses malles qui voyageaient en soute (...). Ses importations téméraires dans son pays natal comprenaient un petit revolver de dame et sa boite de balles."


 "Neuf dames dansant..."


"Vous savez, la première fois que j'ai volé quelque chose, la police ne m'a même pas attrapée! C'était une petite broche en forme d'hirondelle, je l'avais repérée chez le prêteur sur gages (...) J'ai dit à la police que ma grand-mère me l'avais donnée et que mon père l'avait mise au clou pour se payer une bière."

   Outre son célèbre petit revolver doré à crosse de nacre, on trouve là-dedans tout ce qui fait le personnage de Phryne, dont une multitude de bijoux : des boucles d'oreille scintillantes, et principalement des broches de diamants et de pierres précieuses. Tournesol brillant, ancre de marine étincelante... ainsi qu'une broche en laqué qui témoigne du penchant de Miss Fisher pour la mode orientale. Autre bijou qui a son importance, la célèbre petite broche hirondelle volée chez un prêteur sur gage quand Phryne était petite. On apprendra plus tard que l'excuse qu'elle avait servie alors à la police n'était pas un mensonge, et que le bijou appartenait véritablement à sa grand-mère. L'inspecteur Robinson retrouvera la broche dans les archives de la police et lui offrira en gage d'amitié. Ah, mais, qu'avons-nous d'autre? Une petite carte à l'effigie des "neuf dames dansant" de la célèbre chanson Les douze jours de Noël... la dernière fois qu'on a laissé cette carte à l'attention de Phryne, c'était une menace de mort. Espérons qu'il n'en sera pas de même cette fois-ci...

  Mais continuons notre visite...


  Palmes et plumes de paon forment des compositions annuelles là aussi très représentatives des formes et associations appréciées dans l'esthétique des Années Folles. On ne s'étonne donc pas de trouver de tels arrangements dans le salon de Phryne en ces périodes de fêtes, l'hôtesse s'affirmant comme une femme de goût autant dans son intérieur que dans sa garde-robe. Mais la garde-robe, parlons-en un peu...


"Phryne lissa son casque de cheveux noirs..."


  Car Phryne Fisher, c'est avant tout un style, un charisme, un esprit haute-couture. Fidèle à l'esprit des garçonnes de son temps, elle porte le lulu bob, c'est à dire un carré très court digne de l'actrice Louise Brooks, dont la détective aurait aussi le regard hypnotique. Véritable déclaration d'indépendance, cette coupe traduit l'audace et l'esprit libertaire de celles qui l'arborent ; le simple fait de dévoiler sa nuque était alors un symbole d'érotisme, mais devint vite celui des flappers, les premières féministes de l'après guerre. Aucun doute que l'honorable Miss Phryne Fisher en fait partie...


  Et quoi de mieux, pour mettre cette frange en valeur, que d'y poser un diadème comme la lady détective nous a habitués à en porter : chainettes dorées sous un entrelacs de feuillage et de fleurs diamantés délicieusement Art-Déco, une tiare chic digne des accessoires favoris de Phryne. Mais l'accessoire, c'est la touche finale apportée à la robe (car on ne pourrait pas sortir nu, même si on parle de fêter les scandaleuses années 1920)...


"Phryne scintillait  dans une robe en crêpe georgette de chanvre indien incrustée de paillettes et de strass."


" C'est du renard, Dot. Il n'y a rien de tel."


"Une femme doit porter une robe d'abord et avant tout pour son propre plaisir."

  Or, la mode (et en particulier les robes), on le sait, a son importance dans la vie de Phryne. Après avoir été pauvre dans son enfance et n'avoir porté que des robes de coton de seconde main usées pendant des années, elle apprécie aujourd'hui de pouvoir s'offrir des tenues dignes de ce nom. Robes d'intérieur ou de soirée, de bal ou charleston, rien n'est trop beau pour Miss Fisher, qui affectionne aussi bien les coupes moderne du prêt-à-porter (lequel fait son apparition dans les années 20) que les créations glamours des grands couturiers. Pour ce soir de réveillon, elle porte une robe de crêpe vert à franges assortie à son intérieur, surbrodée d'une dentelle à peine visible sur laquelle sont cousues perles et sequins... pour briller en toute circonstance! La tenue est complétée d'une étole en fourrure de renard ("Rien de tel", confie-t-elle à Dot quand elle va chez son modiste) et d'une léontine. La léontine, c'est le nom oublié de ce collier déjà célèbre à la fin du XIXème siècle et encore très apprécié après guerre : une simple chaine enroulée plusieurs fois sur elle même autour du cou ou nouée pour pendre élégamment (à ne pas confondre avec le sautoir, évidemment).



" Elle sortit de sa poche une cigarette, son fume-cigarette, et une allumette."

  Puisque c'est fête, Phryne décide de s'adonner sans honte aucune à tous les plaisirs déconseillés : en plus du champagne et des cocktails (leur effet s'évaporera au réveil après une bonne tasse de café turc bien serré), la voilà qui sort un fume-cigarette de son sac. Un fume-cigarette? Très célèbre chez la gent féminine dès les années 1910, il est l'accessoire souvent associé à la garçonne des années 1920. Si l'on a jamais vu la Phryne de la série télévisée fumer, il en est tout autre pour la Phryne des romans, qui ne se refuse pas cette activité...


  Mais avant de passer pour des indiscrets, regagnons vite la foule d'invités... Jane et Ruth, les filles adoptives de Miss Fisher, viennent de mettre un nouveau disque sous l'aiguille du gramophone et une musique enthousiasmante se fait déjà entendre... 


  La maîtresse de maison elle-même se laisse entrainer par cette mélodie des plus réjouissantes alors... pourquoi se priver? 


Let's dance with Phryne, a little party never killed nobody!


Belles fêtes à tous!

***

 
 

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