Albin Michel Jeunesse, coll. "Destins", 2017 - Le livre de poche jeunesse, 2019 - Éditions France Loisirs, 2020.
Varsovie, fin du XIXe siècle, Marie et Bronia, deux soeurs vivant dans
une Pologne asservie par la Russie, n'ont qu'une obsession: Aller à
l'université. Marie rêve de devenir chimiste, et Bronia, médecin.
Malheureusement, l'occupant russe interdit aux femmes de faire des études. C'est compter sans l'esprit de rébellion des deux jeunes filles.
Un soir d'automne, à la lueur d'une lampe à pétrole, les deux sœurs décident de sceller un pacte incroyable, qui les mènera jusqu'aux portes de la Sorbonne, à Paris...
Malheureusement, l'occupant russe interdit aux femmes de faire des études. C'est compter sans l'esprit de rébellion des deux jeunes filles.
Un soir d'automne, à la lueur d'une lampe à pétrole, les deux sœurs décident de sceller un pacte incroyable, qui les mènera jusqu'aux portes de la Sorbonne, à Paris...
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Sorti il y a déjà quelques années, Marie et Bronia a inauguré la collection "Destins" des éditions Albin Michel Jeunesse : des romans biographiques de personnalités historiques à travers leurs jeunes années ou leurs premiers succès. Une collection dont on aime l'ambition et les nombreuses figures mises en lumière depuis sa création, des plus connues aux plus secrètes : Marie Curie, Marilyn Monroe, Rosa Bonheur... Car si la parité est au rendez-vous, on apprécie tout particulièrement les titres qui donnent l'occasion de (re)découvrir les vies de femmes tantôt célébrées, tantôt oubliées par la grande histoire.
Marie, au début des années 1900.
Célébrée, Marie Curie l'est assurément. Mais si tout le monde connait et reconnait la femme de sciences là où tant d'autres physiciennes, chimistes et mathématiciennes sont redécouvertes sur le tard, sa vie familiale et intime, semée de nombreux drames et embûches, reste assez secrète. Que sait-on aujourd'hui de Marie Curie ? On se souvient évidemment de son époux, Pierre, de leurs recherches sur le radium et de son prix Nobel, mais de quoi d'autre ? Natacha Henry, autrice d'une précédente biographie sur Marie Curie et sa sœur Bronia, illustre méconnue, propose de remonter le temps jusqu'à la Pologne du XIXe siècle pour y rencontrer celle qu'on appelle alors encore Maria Slodowska.
La fratrie Slodowski en 1872 (avec Marie, au centre, et Bronia, à droite).
Dernière née d'une grande fratrie de 5 enfants, Marie grandit au contact d'une famille aimante malgré les nombreux malheurs qui s'enchaînent. L'occupation russe qui bannit la culture polonaise, la maladie qui cloue sa mère au lit et lui fait perdre son travail d'enseignante, puis la mort qui l'emporte après avoir aussi fauché l'aînée des enfants. Alors qu'elles souhaitent embrasser une carrière scientifique, Marie et sa sœur Bronia ne peuvent aspirer qu'à une place de gouvernante ou d'institutrice, les seules voies professionnelles autorisées aux femme par le pouvoir en place. Une première brèche s'ouvre dans le carcan imposé par l'Occupant quand se déploie à Varsovie l'Université Volante : une université clandestine et itinérante ouverte aux jeunes gens qui, comme Marie et Bronia, souhaitent étudier malgré les interdits. Puis, très vite, l'envie d'apprendre et d'expérimenter davantage leur fait envisager de partir à Paris pour y suivre un véritable cursus : médecine pour Bronia, chimie pour Marie. Financièrement, le projet n'est guère envisageable. Sauf si... Sauf si les deux sœurs s'entraident : Marie trouvera une place de gouvernante et partagera ses gages avec Bronia afin de lui financer ses études en France, après quoi Bronia, une fois diplômée, paiera à son tour les études de Marie à Paris. Ce pacte changera leur destin à tout jamais et les fera entrer dans l'Histoire.
Marie et Bronia en 1886.
On ne peut qu'applaudir la volonté de l'autrice de mettre en lumière cette "Marie avant Curie", tant le parcours de la célèbre scientifique est passionnant. Le récit est d'autant plus intéressant qu'il raconte à part égale celui de Bronia, sa sœur ainée injustement oubliée de la mémoire collective alors que leurs vies sont étroitement entremêlées. Jamais les deux femmes ne seraient en effet devenues ce qu'elles aspiraient tant à devenir sans ce pacte de jeunesse autour duquel s'articule et se consolide le roman de Natacha Henry. Furieusement romanesque, cette anecdote de la vie des deux sœurs est pourtant bien réelle. Elle s'ancre dans une jeunesse douloureuse semée de deuils et de catastrophes, l'occupation russe d'alors faisant aujourd'hui écho à une actualité toujours aussi sombre, nous rappelant à quel point les hommes sont doués pour rejouer les mêmes drames.
Casimir Zorawski, premier grand amour de Marie, en 1888.
Dans ce contexte particulièrement noir, pourtant, on se plait à les voir braver les interdits pour apprendre puis concevoir le plan qui leur permettra de décrocher un diplôme. On les suit avec fascination tantôt dans les rues de Paris où Bronia s'installe, tantôt à la campagne où Marie prend une place de gouvernante, chez les riches Zorawski. On apprend qu'elle et le fils aîné de ses employeurs, amené à devenir un éminent mathématicien, tomberont follement amoureux l'un de l'autre avant que les parents du jeune garçon ne mettent un terme à cette relation en invoquant la différence de condition sociale. Ce n'est qu'à travers la passion des études et de la recherche que Marie retrouvera finalement goût à la vie, passion qui la fera rencontrer un certain Pierre Curie...
Marie et Pierre Curie, 1903.
C'est là le point positif de ce roman : raconter l'arrière-scène, les coulisses et l'origine des destins de ces deux femmes, la belle sororité qui les fera surmonter les obstacles qui se dresseront sur leur chemin au gré des allers retours entre France et Pologne. On ne regrette qu'une chose : que le style ne soit pas à la hauteur de la vie de ces deux figures incroyables. Raconté d'une plume très informative qui caractérise davantage les biographies que les romans, Marie et Bronia manque d'une écriture plus sensible qui aurait rendu justice à la passion de ces deux héroïnes.
En bref : Un roman à découvrir pour retracer les premières années de Marie Curie avant Curie, ainsi que le pacte qui la liait à sa sœur aînée, Bronia. Une approche intime de l'une des plus grandes scientifiques du XXe siècle avant qu'elle n'accède à la postérité et qui résume bien l'ambition de la collection "Destins". On regrette seulement le style, malheureusement plus proche de la biographie que du roman, qui nous empêche de goûter à toutes les émotions de cette histoire.
Et pour aller plus loin...
- Si vous avez lu Marie et Bronia, découvrez Marie Curie : la femme de sciences de Sylvie Baussier.

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