Dans le livre Un été avec Louise (The Chaperone), Laura Moriarty raconte de façon romancée l'été 1922 que passent la jeune Louise Brooks (star du cinéma muet en devenir) et son chaperon à New York. L'adolescente, alors en passe d'être une future célébrité, quitte son Kansas natal pour suivre la saison d'été de la prestigieuse école de danse de Denishawn. Sa famille a tout prévu pour subvenir à ses besoins le temps de cette session prometteuse : la tempétueuse jeune fille et son chaperon, Cora Carlisle, une mère de famille trop sérieuse, sont logées dans un très sympathique petit appartement new-yorkais situé en face d'un diner typiquement américain. L'une et l'autre traversent donc régulièrement la rue pour se rafraîchir d'un verre de lait, déjeuner d'un sandwich ou se régaler d'une crème glacée.
Devenues rapidement des habituées, Cora et Louise se lient d'amitié avec Floyd, le jeune serveur, toujours prêt à rendre service et qui espère réussir à séduire l'adolescente. Mais Louise, insaisissable et plus dangereuse qu'on ne pourrait le croire, se sert de lui pour se faire inviter dans un speakeasy... confus, Floyd la ramène ivre en pleine nuit à Cora tout en se confondant en excuses. Sous prétexte d'acheter un sandwich, Cora se présente au diner le lendemain pour évoquer l'événement avec le jeune homme...
"— Vous n'auriez pas dû l'inciter à s'éclipser en douce pour vous rejoindre. (Elle croisa son regard et observa ses longs cils, les taches de rousseur discrètes sur son nez.) Mais merci de l'avoir ramenée à la maison.
Il était surpris. C'était là tout ce que Cora pouvait induire de son expression, de la façon dont il la dévisageait en plissant le front. La sonnette de la cuisine retentit et il se retourna pour réceptionner la commande sur le passe-plat. Cora se replongea dans la lecture du menu et son regard s'attarda sur la description détaillée du méga-sandwich : de fines tranches de rosbif. Du fromage suisse. Un mélange spécial d'herbes et d'épices. Du pain frais."
L.Moriarty, Un été avec Louise (The chaperone), Pocket, 2014.
Louise et Floyd au comptoir du diner dans le film adapté du roman de L.Moriarty.
Les diners américains ont été très popularisés à travers les fictions cinématographiques et télévisées américaines des années 50 et 60 si bien que leur esthétique et leur ambiance sont devenues synonymes de la culture vintage de l'outre-Atlantique : banquettes colorées, tables en formica, sol en damier, comptoir en chrome rutilant et jukebox en fond sonore. On ignore que les diner existaient déjà dans les années 1920 et que leur création remonte bien avant cela encore. Leur origine date des années 1850, quand un jeune typographe de Rhode Island du nom de Walter Scott (rien à voir avec le poète écossais) décide de distribuer des repas aux journaliste qui travaillent de nuit pour arrondir ses fins de mois. Il aménage ainsi une roulotte en cantine itinérante et traverse la ville à la recherche de clients. A sa suite, cette astuce se propage comme une trainée de poudre à travers l'état jusqu'à devenir réglementaire et voir de nombreux vendeurs ouvrir leurs cantines. Dès lors, les diners deviennent des lieux de restauration fixes et gagnent en confort : on les agrémente d'un comptoir, de tables, de chaises, etc...
Illustration publicitaire pour un diner dans les années 20.
Dans les années 20, la révolution sociale, culturelle et industrielle qui suit la Grande Guerre gagne les milieux de la restauration. L'industrialisation alimentaire et l'apparition de la restauration rapide profitent aux diners qui gagnent en chic, tout en continuant de proposer une alimentation à moindre coût (essentiellement des sandwiches). Leur style s'inspire de l'esthétique Art Déco et leur aménagement copie celui des wagons-restaurants des trains de luxe. L'American Diner, qu'on associe donc tellement dans l'imaginaire collectif aux années 50 et 60, avait déjà sa place dans dans la culture populaire des années 1920, ce qui explique que Laura Moriarty en fasse un décor de choix dans The chaperone.
Ingrédients (pour un sandwich):
- Deux larges tranches de pain de seigle moelleux
- Deux tranches de rosbif froid
- Deux fines tranches d' Appenzeller (fromage suisse à pâte mi-dure)
- Un brin de cerfeuil
- Une gousse d'ail
- Aneth
A vos tabliers!
- Emincer le plus finement possible la gousse d'ail ou la passer au presse-ail. Réserver.
- Sur une première tranche de pain, disposer une tranche de fromage puis une tranche de rosbif.
- Saupoudrez d'ail et d'aneth avant de couvrir de la seconde tranche de rosbif et de la seconde tranche de fromage.
- Disposer le brin de cerfeuil frais, refermer avec la seconde tranche de pain.
- A manger froid ou passé sous le grill du four.
Cora Carlisle vous recommande ce déjeuner sur le pouce avec un grand verre de lait frais!
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Alléchant !! :-) Que j'aime cette époque... !!
RépondreSupprimerEt moi donc! :D
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