Blanche-Neige et le chasseur
(Snow White and the Huntsman),
de Rupert Sanders.
Avec: Kristen Stewart, Chris Hemsworth, Charlize Theron, Sam Claflin, Ian McShane, Toby Jones...
Dans des temps immémoriaux où la magie, les fées et les nains étaient
monnaie courante, naquit un jour l’unique enfant d’un bon roi et de son
épouse chérie : une fille aux lèvres rouge sang, à la chevelure noire
comme l’ébène et à la peau blanche comme neige. Et voilà précisément où
l’histoire que vous croyiez connaître prend fin et où la nouvelle
adaptation épique et envoutante de ce célèbre conte des frères Grimm
débute. Notre héroïne, dont la beauté vient entacher la suprématie de
l’orgueilleuse Reine Ravenna et déclencher son courroux, n’a plus rien
d’une damoiselle en détresse, et la cruelle marâtre en quête de jeunesse
éternelle ignore que sa seule et unique rivale a été formée à l’art de
la guerre par le chasseur qu’elle avait elle-même envoyé pour la
capturer. Alliant leurs forces, Blanche-Neige et le chasseur vont
fomenter une rébellion et lever une armée pour reconquérir le royaume de
Tabor et libérer son peuple du joug de l’impitoyable Ravenna.
***
Après le Blanche-Neige (Mirror Mirror) aux allures de bonbonnière sorti en avril dernier, Juin 2012 a amené dans nos salles obscures celui qu'on appelait depuis le lancement du projet l'autre Blanche-Neige : Blanche-Neige et le chasseur, qui se voulait dès le départ plus sombre que son concurrent réalisé par Tarsem Singh. Bien que la majorité des critiques jugent les deux versions incomparables, on ne peut s'empêcher de s'amuser aux jeu des différences et des préférences, d'autant plus que la vraie originalité du film de Sanders a conquis les spectateurs au point de faire oublier celui de Singh, et de reléguer ce dernier aux oubliettes.
Nous-même qui avons craint d'être déçu, on doit reconnaître avoir été plutôt satisfait et agréablement surpris par l'orientation choisie par Sanders pour son film. Commençons par l'histoire : si ont avait dit ne pas avoir eu l'impression de visionner une adaptation de Blanche-Neige en regardant le film de Singh, c'est encore mille fois plus vrai pour ce Blanche-Neige et le chasseur, scénaristiquement audacieux puisqu'il propose une version certes dark du conte, mais qui, surtout, est habité d'un souffle épique inattendu qui lui confère une ampleur toute nouvelle. Les articles qui disaient cette adaptation proche de l'univers de Tolkien ainsi que les dragons et chimères de la bande-annonce nous avaient laissé craindre un film un peu trop heroic fantasy, mais que ceux qui ont les mêmes inquiétudes se rassurent : les quelques passages mettant en scène ces créatures que nous montrent les trailers sont en fait les seuls du film entier (à peu de choses près), ce qui suffit à donner un ton nouveau à l'histoire de Grimm sans tomber dans un excès de monstres à écailles.
On sort de la salle avec l'impression d'avoir visionné un film épique médiéval, l'extrême soin apporté aux décors, aux costumes et aux batailles lui donnant des allures de film historique. Kristen Stewart n'est effectivement pas sans rappeler Jeanne d'Arc, comme de nombreux critiques se sont accordés à le reconnaître. L'actrice signe d'ailleurs une excellente composition : loin de la Bella fadasse de Twilight, elle démontre ici toute l'étendue de son talent et parvient à nous faire croire en son personnage, figure de beauté et de pureté ici symboliques de son statut d'héroïne guerrière. Du côté du reste du casting, il faut également reconnaître la prestation de l'excellente Charlize Theron, envoutante dès le premier teaser visible en Automne 2011 ; lorsqu'on l'entend réciter l'invocation du miroir magique de sa voix calme et profonde, presque austère, on ne peut que se rendre à l'évidence : elle était faite pour ce rôle, auquel elle restitue toute l'épaisseur et la complexité du personnage du conte d'origine.
Visuellement parlant, le film est une réussite : habité par la symbolique des couleurs, cette version privilégie la mise en avant significative du noir, du blanc et du rouge à travers des paysages ibériques traversés par des corbeaux, et ponctués ça et là de pommes écarlates ou de taches de sang carmin. D'ailleurs, on n'a pu s'empêcher de penser aux visuels de l'album Blanche-Neige illustré par Benjamin Lacombe : on y retrouve en effet une ambiance très proche et des éléments esthétiques similaires (les trois couleurs symboliques, l'omniprésence des corbeaux, une reine blonde, etc...). L'artiste lui-même avait remarqué la coïncidence et s'était amusé à en exposer un aperçu sur son blog par ce petit montage :
Ces tons sombres sont contrebalancés par une scène visuellement transcendante, au cours de laquelle Blanche-Neige traverse une contrée féérique perdue au cœur de la forêt : une clairière superbement mise en image, nimbée de lumière et habitée par des créatures fantastiques qui révèlent son statut d'élue.
Cependant, on aime tatillonner : si on a trouvé ce film réussi en tant qu'adaptation de Blanche-Neige, on n'en dirait pas autant en tant que film fantastique. En effet, la mise en scène est excellente et l'histoire réellement bien réécrite par rapport aux versions originales connues, mais il faut reconnaître que les ficelles utilisées par Rupert Sanders sont un peu usées. Le côté "Comtesse Bathory" de la reine, par exemple, colle parfaitement au personnage et trouve tout à fait sa place dans cette réinterprétation de l'histoire, mais reste néanmoins très convenu (on pense par exemple au personnage de reine immortelle qui se nourrit de la jeunesse des jeune fille dans le film Les frères Grimm). Certaines émotions ont parfois du mal à traverser la toile pour parvenir jusqu'à notre siège de spectateur : toute cette immense foi que les personnages secondaires placent en Blanche-Neige semble souvent très démesurée. Enfin, si on a trouvé les prestations des deux actrices principales réussies, on n'en dirait pas autant de celle de Chris Hemsworth, qui interprète le rôle du chasseur. Son jeu, trop en décalage (trop américain, peut-être ?) vient casser quelque chose de ce conte épique et héroïque.
Visuellement parlant, le film est une réussite : habité par la symbolique des couleurs, cette version privilégie la mise en avant significative du noir, du blanc et du rouge à travers des paysages ibériques traversés par des corbeaux, et ponctués ça et là de pommes écarlates ou de taches de sang carmin. D'ailleurs, on n'a pu s'empêcher de penser aux visuels de l'album Blanche-Neige illustré par Benjamin Lacombe : on y retrouve en effet une ambiance très proche et des éléments esthétiques similaires (les trois couleurs symboliques, l'omniprésence des corbeaux, une reine blonde, etc...). L'artiste lui-même avait remarqué la coïncidence et s'était amusé à en exposer un aperçu sur son blog par ce petit montage :
Cependant, on aime tatillonner : si on a trouvé ce film réussi en tant qu'adaptation de Blanche-Neige, on n'en dirait pas autant en tant que film fantastique. En effet, la mise en scène est excellente et l'histoire réellement bien réécrite par rapport aux versions originales connues, mais il faut reconnaître que les ficelles utilisées par Rupert Sanders sont un peu usées. Le côté "Comtesse Bathory" de la reine, par exemple, colle parfaitement au personnage et trouve tout à fait sa place dans cette réinterprétation de l'histoire, mais reste néanmoins très convenu (on pense par exemple au personnage de reine immortelle qui se nourrit de la jeunesse des jeune fille dans le film Les frères Grimm). Certaines émotions ont parfois du mal à traverser la toile pour parvenir jusqu'à notre siège de spectateur : toute cette immense foi que les personnages secondaires placent en Blanche-Neige semble souvent très démesurée. Enfin, si on a trouvé les prestations des deux actrices principales réussies, on n'en dirait pas autant de celle de Chris Hemsworth, qui interprète le rôle du chasseur. Son jeu, trop en décalage (trop américain, peut-être ?) vient casser quelque chose de ce conte épique et héroïque.
De façon générale, ce Blanche-Neige et le chasseur est donc un très bon film en tant qu'adaptation du conte de Grimm, même s'il reste un divertissement un peu trop convenu en tant que dernier-né du genre fantastique. Et puis on reste fidèle à nos classiques : en matière de version dark du conte, difficile de faire mieux que Snow-White, a tale of terror, brillant à tout point de vue. D'ailleurs, on ne peut que noter de nombreux points communs scénaristiques (la relation fortement incestuelle entre la reine et son frère, par exemple) et visuels (les couleurs, ainsi que la transition finale façon "portes qui se referment sur l'image") entre les deux films... Rupert Sanders aurait-il par hasard lorgné sur cette précédente adaptation? Rien n'est moins sûr...
Superbe fan-made poster, réalisé par Dwayne Labuschagne.
En bref : Ce Blanche-Neige et le chasseur est un film réussi et surprenant qui propose une relecture épique originale du conte de Grimm. Avec ses scènes de batailles et ses inspirations médiévales, cette nouvelle version n'est pas sans rappeler davantage un film historique qu'un long-métrage de fantasy.
Et pour aller plus loin...
Si vous avez aimé ce film, on vous recommande fortement la lecture de White as Snow, de Tanith Lee : cette relecture du conte n'est pas sans évoquer le scénario du film, et des rumeurs et informations non-officielles prétendent que Rupert Sanders y aurait justement pioché quelques idées...
J'ai trouvé ce film très beau et parfois...très long. Pour une Jeanne D'Arc, je n'ai pas trouvé cette Blanche Neige très charismatique. Les "mauvais" étaient plus fascinants ; la relation quasi incestueuse du frère et de la soeur et surtout la présence de Ravenna rendaient le film intéressant. J'apprécie les éléments de réponse apportés à la question éternelle : mais pourquoi est-elle si méchante? Parce qu'elle a beaucoup souffert. Elle m'a rappelé le personnage de Lady van Tassel dans Sleepy Hollow.
RépondreSupprimerJ'ai une critique sur la réalisation des scènes de combat, car je suis influencée par l'excellence de la trilogie du Seigneur des Anneaux de Peter Jackson et le perfectionnisme du Monde de Narnia. On sent ici qu'on n'a pas beaucoup investi dans l'entraînement des acteurs, donc on compense le manque de tonicité des scènes de combat en hachant les plans et en les enchaînant très vite. Du coup c'est illisible, et le spectateur, qui espérait de bonnes batailles, se trouve frustré.
Ton commentaire me fait revenir certaines petites choses en mémoires: je suis d'accord pour les longueurs! La relation incestueuse, j'ai également apprécié mais pour moi c'était du déjà vu avec la première version dark (celle avec Sigourney Weaver) donc je n'ai pu m'empêcher de penser qu'il y avait du copitage ^^ J'ai également été frustré par le peu d'info sur Ravenna: les flash back ne suffisent en effet pas à expliquer sa personnalité, ce ne sont que des bribes trop vagues de son passé.
SupprimerUn autre truc qui m'a frustré: le combat entre Blanche-N et Ravenna est vite expédié je trouve...après tout ce film, j'ai cru que la façon dont elle la vaincrait serait plus originale, surprenante...mais non, juste un coup de dague comme cela aurait été possible depuis le début du film... bof bof ><