Totta, Otava, 2010 - Éditions Albin Michel, 2012 - Éditions France Loisirs, 2012.
Alors que sa grand-mère
Elsa se meurt d'un cancer foudroyant et que tous ses proches se
rassemblent pour adoucir ses derniers jours, Anna découvre que, derrière
le mariage apparemment heureux de ses grands-parents, se cache un drame
qui a marqué à jamais tous les membres de sa famille.
Une vieille robe trouvée par hasard, et dont elle apprend qu'elle aurait appartenu à une certaine Eeva, va réveiller le passé. Cette Eeva, dont on ne lui a jamais parlé, aurait été, dans les années 60, la nourrice de sa mère. Mais Anna ne tarde pas à comprendre qu'elle a été beaucoup plus qu'une employée et que son grand-père, peintre célèbre, l'a profondément aimée...
Voilà déjà plusieurs mois que, tout accaparé par les études, je me consacrais à des lectures jeunesse, young adult, ou purement fantastiques. En effet, une grosse part de mon temps étant occupée par le bachotage nécessaire à la rédaction des dossiers et la préparation des diverses évaluations, il me fallait de quoi m'envoyer du rêve et sortir de la plate réalité pour compenser des lectures purement scolaires (très intéressantes, certes, mais il faut l'avouer, aussi très terre-à-terre ^^'). Cependant, j'ai dernièrement eu envie d'un roman à l'intrigue plus dense, plus "nourrissante", riche et profonde. J'avais en mémoire l'excellent moment passé avec Le langage secret des fleurs et souhaitais quelque chose s'inscrivant dans la même lignée: une histoire véridique, une expérience humaine à la fois simple et complexe, mêlant habilement légèreté et profondeur. En bref, une "belle" lecture. Je me tournai donc vers L'armoire des robes oubliées, qui m'avait déjà fait de l’œil lors de sa sortie l'an dernier, et que je venais de retrouver au détour d'une virée chez France-Loisirs.
Et alors, verdict? Que dire de ce retour à une littérature plus "mature"? ... Ma foi, que du bien! Premier roman issu de la littérature nordique (l'auteure est finnoise et l'intégralité de l'intrigue se déroule au bord de la Baltique) à rejoindre ma bibliothèque, j'ai découvert une écriture toute en simplicité, qui aborde les secrets de famille d'une plume légère malgré la gravité du thème. Dans une maison de famille qui a vu se suivre plusieurs générations, Elsa attend patiemment la fin. Atteinte d'un cancer en phase terminale, cette psychologue de renom issue du féminisme des années 60 a décidé de mener sa mort comme elle a mené sa vie, c'est à dire comme elle l'entend. Refusant de finir ses jours en soins palliatifs, elle veut couler ses derniers instants en toute simplicité auprès de son époux Martti, peintre rendu célèbre grâce à son style abstrait inimitable. Dans cette grande maison de campagne se rassemble alors toute la famille du vieux couple, la chair et le sang qui découlent de la charismatique matriarche en fin de vie : la fille, Eleonoora, froide quadragénaire, et les deux filles de cette dernière, dont Anna qui se distingue par sa fragilité. Mais cette jeune étudiante, redécouvrant les plaisir de l'enfance au côté de sa grand-mère, met à jour bien plus que de simples souvenirs: en fouillant dans le grenier pour se prêter au jeu du déguisement avec Elsa, elle exhume d'une vieille armoire la robe d'une femme oubliée. La robe de l'Autre femme: Evéa. Celle qui fut, dans les années soixante, la maîtresse de Martti et que le couple a sacrifié. Au moment ou la délicate Anna décide de porter la tenue, elle franchit une porte, marque un pas décisif ; le lecteur découvre alors, au filigrane d'une multiplicité de voix et d'époques, l'histoire de cette femme et comment son passage a marqué la descendance d'Elsa bien au-delà du temps.
J'ai tout d'abord été charmé par l'écriture: cette histoire est racontée en toute simplicité, avec une sobriété poétique qui lui confère à la fois qualité et fluidité. L'auteure ne cherche pas à "ensorceler" le lecteur ou le séduire par des formulations alambiquées, bien au contraire: le style a a quelque chose de limpide, brut et clair...oserais-je dire "aérien"? Cette écriture qui touche directement au cœur m'a renvoyé à l'esthétique sobre et toute en clarté propre à ces pays nordiques et à leur culture.
Les personnages sont vrais: aucun n'est totalement blanc ou totalement noir et chacun est présenté avec sa part de travers et ses défauts, ce qui instaure un réalisme frappant au delà de toute conception manichéenne, et permet au lecteur de mieux s'identifier dans ces personnages et au travers des situations difficiles qu'ils traversent. Je me suis énormément attaché à Anna, douce et fragile, véritable écorchée vive dont le destin semble étrangement lié à la maîtresse de son grand-père: alors qu'on passe d'une voix à l'autre et qu'on alterne entre le présent et les années 60, on perçoit de réelles similitudes entre les deux jeunes femmes, au point de se demander si elle ne sont pas une seule et même personne ayant eu droit à deux vies! La découverte de la robe semble donner une raison de vivre à Anna: alors que la jeune fille sort d'une passe difficile (et qui reste longtemps floue, avant de s'éclaircir au fil du récit et de la vie d'Evea racontée en parallèle), le secret qui entoure la relation de son grand-père avec cette autre femme devient son but quotidien et elle se lance dans une aventure qui a tout de l'enquête policière. Pourquoi est-elle animée d'un besoin si viscéral, si profond et douloureux d'en savoir plus? A-t-elle inconsciemment ressenti, comme le lecteur, qu'un lien la rattachait intimement à cette inconnue?
Au terme de ses recherches, sa découverte la chamboule tout autant que nous et le ressort scénaristique utilisé par l'auteure, d'une nature presque métaphysique, fait dépasser à cette intrigue le stade du simple drame familiale pour aller explorer la psychogénéalogie. Cette révélation d'une logique imparable malgré son côté presque supranormal donne alors sens au cheminement d'Anna et à ses douleurs, la libérant ainsi du poids des secrets de famille et des non-dits destructeurs.
L'auteure explore donc avec une égale qualité de nombreuses dimensions (généalogie, secrets familiaux, relations mère-filles, féminisme, art, psychologie...) qui font de ce livre un roman complet, fort et profondément marquant. Véritable succès littéraire dans tous les pays où il a été publié, l’armoire des robes oubliées a été transposé en pièce de théâtre et est en cours d'adaptation cinématographique... Je recommande donc à tous cette vraie réussite littéraire!
Une vieille robe trouvée par hasard, et dont elle apprend qu'elle aurait appartenu à une certaine Eeva, va réveiller le passé. Cette Eeva, dont on ne lui a jamais parlé, aurait été, dans les années 60, la nourrice de sa mère. Mais Anna ne tarde pas à comprendre qu'elle a été beaucoup plus qu'une employée et que son grand-père, peintre célèbre, l'a profondément aimée...
Voilà déjà plusieurs mois que, tout accaparé par les études, je me consacrais à des lectures jeunesse, young adult, ou purement fantastiques. En effet, une grosse part de mon temps étant occupée par le bachotage nécessaire à la rédaction des dossiers et la préparation des diverses évaluations, il me fallait de quoi m'envoyer du rêve et sortir de la plate réalité pour compenser des lectures purement scolaires (très intéressantes, certes, mais il faut l'avouer, aussi très terre-à-terre ^^'). Cependant, j'ai dernièrement eu envie d'un roman à l'intrigue plus dense, plus "nourrissante", riche et profonde. J'avais en mémoire l'excellent moment passé avec Le langage secret des fleurs et souhaitais quelque chose s'inscrivant dans la même lignée: une histoire véridique, une expérience humaine à la fois simple et complexe, mêlant habilement légèreté et profondeur. En bref, une "belle" lecture. Je me tournai donc vers L'armoire des robes oubliées, qui m'avait déjà fait de l’œil lors de sa sortie l'an dernier, et que je venais de retrouver au détour d'une virée chez France-Loisirs.
Couverture de l'édition originale.
Et alors, verdict? Que dire de ce retour à une littérature plus "mature"? ... Ma foi, que du bien! Premier roman issu de la littérature nordique (l'auteure est finnoise et l'intégralité de l'intrigue se déroule au bord de la Baltique) à rejoindre ma bibliothèque, j'ai découvert une écriture toute en simplicité, qui aborde les secrets de famille d'une plume légère malgré la gravité du thème. Dans une maison de famille qui a vu se suivre plusieurs générations, Elsa attend patiemment la fin. Atteinte d'un cancer en phase terminale, cette psychologue de renom issue du féminisme des années 60 a décidé de mener sa mort comme elle a mené sa vie, c'est à dire comme elle l'entend. Refusant de finir ses jours en soins palliatifs, elle veut couler ses derniers instants en toute simplicité auprès de son époux Martti, peintre rendu célèbre grâce à son style abstrait inimitable. Dans cette grande maison de campagne se rassemble alors toute la famille du vieux couple, la chair et le sang qui découlent de la charismatique matriarche en fin de vie : la fille, Eleonoora, froide quadragénaire, et les deux filles de cette dernière, dont Anna qui se distingue par sa fragilité. Mais cette jeune étudiante, redécouvrant les plaisir de l'enfance au côté de sa grand-mère, met à jour bien plus que de simples souvenirs: en fouillant dans le grenier pour se prêter au jeu du déguisement avec Elsa, elle exhume d'une vieille armoire la robe d'une femme oubliée. La robe de l'Autre femme: Evéa. Celle qui fut, dans les années soixante, la maîtresse de Martti et que le couple a sacrifié. Au moment ou la délicate Anna décide de porter la tenue, elle franchit une porte, marque un pas décisif ; le lecteur découvre alors, au filigrane d'une multiplicité de voix et d'époques, l'histoire de cette femme et comment son passage a marqué la descendance d'Elsa bien au-delà du temps.
J'ai tout d'abord été charmé par l'écriture: cette histoire est racontée en toute simplicité, avec une sobriété poétique qui lui confère à la fois qualité et fluidité. L'auteure ne cherche pas à "ensorceler" le lecteur ou le séduire par des formulations alambiquées, bien au contraire: le style a a quelque chose de limpide, brut et clair...oserais-je dire "aérien"? Cette écriture qui touche directement au cœur m'a renvoyé à l'esthétique sobre et toute en clarté propre à ces pays nordiques et à leur culture.
Les personnages sont vrais: aucun n'est totalement blanc ou totalement noir et chacun est présenté avec sa part de travers et ses défauts, ce qui instaure un réalisme frappant au delà de toute conception manichéenne, et permet au lecteur de mieux s'identifier dans ces personnages et au travers des situations difficiles qu'ils traversent. Je me suis énormément attaché à Anna, douce et fragile, véritable écorchée vive dont le destin semble étrangement lié à la maîtresse de son grand-père: alors qu'on passe d'une voix à l'autre et qu'on alterne entre le présent et les années 60, on perçoit de réelles similitudes entre les deux jeunes femmes, au point de se demander si elle ne sont pas une seule et même personne ayant eu droit à deux vies! La découverte de la robe semble donner une raison de vivre à Anna: alors que la jeune fille sort d'une passe difficile (et qui reste longtemps floue, avant de s'éclaircir au fil du récit et de la vie d'Evea racontée en parallèle), le secret qui entoure la relation de son grand-père avec cette autre femme devient son but quotidien et elle se lance dans une aventure qui a tout de l'enquête policière. Pourquoi est-elle animée d'un besoin si viscéral, si profond et douloureux d'en savoir plus? A-t-elle inconsciemment ressenti, comme le lecteur, qu'un lien la rattachait intimement à cette inconnue?
Au terme de ses recherches, sa découverte la chamboule tout autant que nous et le ressort scénaristique utilisé par l'auteure, d'une nature presque métaphysique, fait dépasser à cette intrigue le stade du simple drame familiale pour aller explorer la psychogénéalogie. Cette révélation d'une logique imparable malgré son côté presque supranormal donne alors sens au cheminement d'Anna et à ses douleurs, la libérant ainsi du poids des secrets de famille et des non-dits destructeurs.
L'auteure explore donc avec une égale qualité de nombreuses dimensions (généalogie, secrets familiaux, relations mère-filles, féminisme, art, psychologie...) qui font de ce livre un roman complet, fort et profondément marquant. Véritable succès littéraire dans tous les pays où il a été publié, l’armoire des robes oubliées a été transposé en pièce de théâtre et est en cours d'adaptation cinématographique... Je recommande donc à tous cette vraie réussite littéraire!
Photographie de la pièce inspirée du roman.
"Personne ne peut nier son origine, ses conditions premières. Chacun doit
se débrouiller avec son enfance pour mettre quelque chose d'autre à la
place. Et ce n'est que comme ça que les gens s'en sortent, qu'ils
accèdent au bonheur."
"A quel moment les gens de votre famille deviennent-ils un miroir douloureux à regarder ?
Les relations entre les gens sont comme des bois touffus.Ou bien les
gens eux-mêmes sont des forêts, les sentiers s'ouvrent en eux l'un après
l'autre, chemins se demeurant mutuellement inconnus, ne débouchant que
par hasard sur les voies qui conduisent au bon endroit."
" Ainsi sont les artistes:ils ont le pouvoir de voir,ils expriment des
vues sous une forme qui témoigne de leur portée absolue,ils rendent réel
ce qui,autrement,resterait à guetter sur les seuils,aux arrêts de
bus,au coin des rues,au détour d'une subordonnée."
"Les gens portent en eux toutes leurs personnalités passées.
Le cœur des jeunes gens est parfois fait de plomb.Il tire sa pesanteur
d'expériences fortuites,tout et rien le rend plus dense, au point de le
déchausser. Mais,aussi facilement,voilà qu'il s'allège à nouveau, oublie
sa gravité."
je l'ai croisé plus d'une fois en librairie, il me tentait bien celui là, je l'achèterais quand il sortira en poche!
RépondreSupprimerJe te le recommande en effet, c'est vraiment un roman d'une grande qualité, tant du point de vue de l'écriture que de l'intrigue! =) J'attends que tu viennes partager ton avis lorsque tu l'auras lu ;-)
SupprimerJe pensais acheter bientôt ce livre, et grâce à ta chronique ce sera chose faite dès ce week-end :)
RépondreSupprimerJe suis bien content de t'avoir donné envie de le découvrir, j'attends ton avis avec impatience! =D
SupprimerEn ce moment je suis dans une période où j'achète tellement de livres avec des secrets de famille etc, que ça va être dur de choisir lequel lire en premier (c'est d'ailleurs la sempiternelle question :) ) ! Mais je pense le lire très bientôt !
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