samedi 11 mars 2017

Miss Peregrine et les enfants particuliers - Un film de Tim Burton d'après le roman de R.Riggs.



Miss Peregrine et les enfants particuliers
(Miss Peregrine's home for peculiar children)
Un film de Tim Burton,
adapté du roman de Ransom Riggs
sorti le 5 Octobre 2016.

Avec : Eva Green, Asa Butterfield, Ella Purnel, Samuel L.Jackson, Judy Dench, Rupert Everett...

  Jake Portman, 16 ans, écoute depuis son enfance les récits fabuleux de son grand-père Abe. Ce dernier, un juif polonais, a passé une partie de sa vie sur une minuscule île au Pays de Galles, où ses parents l'avaient envoyé pour le protéger de la menace nazie. Le jeune Abe Portman y a été recueilli par Miss Peregrine, la directrice d'un pensionnat pour enfants « particuliers ». Selon ses dires, Abe y côtoyait une ribambelle d'enfants doués de capacités surnaturelles, comme Bronwyn, une fille avec une force exceptionnelle, Emma une jeune fille plus légère que l'air, Millard un garçon invisible... Abe avait aussi un don, les protéger des « monstres » qu'il était le seul à pouvoir voir.
  Un soir, Jake trouve son grand-père mortellement blessé par une créature qui s'enfuit sous ses yeux. Bouleversé, Jake part avec son père Frankiln, en quête de la vérité sur l'île si chère à son grand-père. En découvrant le pensionnat en ruines, il n'y a plus aucun doute : les enfants particuliers ont réellement existé. Mais étaient-ils dangereux ? Pourquoi vivaient-ils reclus, cachés de tous ? Et s'ils étaient toujours en vie (et toujours jeunes) ? Aussi étrange que cela paraisse...

***


   Parce que je n'ai pas eu le temps de vous en parler à sa sortie en salle, je profite de la récente sortie dvd de Miss Peregrine pour vous donner mon avis sur ce film que j'avais tant attendu! Les lecteurs qui me suivent depuis longtemps doivent se souvenir à quel point le roman de Ransom Riggs m'avait chamboulé, aussi l'idée d'une adaptation me laissait-elle rêveur et très impatient. Mais contrairement à ce que pense la plupart des critiques presse, je n'ai jamais eu cette impression que Miss Peregrine aurait pu être écrit à destination de Tim Burton... aussi le voir à la réalisation ne me semblait pas si évident que cela. Lors de ma lecture, j'aurais plutôt imaginé l'histoire transposée à l'écran par Guillermo del Toro, d'une esthétique plus sobre. C'est dire si l'annonce de sa participation m'a fait grincer des dents... Oui, pourtant je suis un grand admirateur de Burton, mais davantage à ses debuts : Celui des premiers films, à l'époque où il savait se serrer la bride et quand il était encore "l'étrange étrangeté" du monde cinématographique.


  Cette impression, renforcée par ses derniers films très "grand spectacle" me laissait craindre la déception ressentie face à son Alice : un récit creux, des personnages vides, et une esthétique tellement poussée à son paroxysme qu'elle en faisait mal au yeux, bref, l'impression de Burton se parodiant lui-même. Le sentiment que le réalisateur avait lui-même perdu sa "plussoyance", le feu sacré, sa sincérité. C'est donc non sans appréhension d'une grosse farce commerciale que je suis allé voir ce Miss Peregrine, juste rassuré par la présence au casting d'Eva Green...


  Verdict? *roulement de tambours... Cymbales* Ouf! Bon, d'accord, j'explicite : plus que ça, j'ai vraiment aimé cette transposition, et ce avec son lot de modifications. J'irai même jusqu'à dire que la réussite de ce film est que, même avec ses réajustements, il est d'abord l'histoire de Ransom Riggs avant d'être un film de Burton, ce dernier ayant accepté de mettre de côté ses habituels codes trop "burtoniens" (ceux-là mêmes que j'appréhendais voir envahir l'écran) pour laisser davantage d'émotions transparaitre. En jouant la carte d'une certaine sobriété par rapport à sa récente filmographie, Burton retrouve toute sa superbe, cette flamme vive et incandescente de l'enfance qu'on avait pas ressenti depuis longtemps.


   Alors la métaphore du nazisme disparait un peu, certes, et peut-être est-ce plus à cause des allers et retours mentaux que je faisais avec le roman que mes glandes lacrymales m'ont chatouillé. Mais, quand même, le réalisateur parvient à toucher son public par les relations qu'il tisse à l'écran entre ses personnages, en particulier l'attachement de Jacob pour son grand-père Abe, et qui n'est pas sans évoquer la relation de l'aïeul conteur à son fils dans le début de Big Fish. Et c'est dans cette façon de retrouver la patte de Burton par petits clins d’œil -parfois à peine devinés- qu'on profite vraiment de son style : les poupées rafistolées qui prennent vie en stop-motion, une beauté blonde et diaphane (comme beaucoup de ses héroïnes), et un contraste intéressant dans les couleurs d'un même endroit sur deux époques différentes (l'île du pays de galle, morne à notre époque, devient colorée et luxuriante une fois Jacob retourné en 1940 - rappelant ainsi les tons tristes du monde des vivants qui s'opposent au pep's de ceux du monde des morts dans Les noces funèbres, ou même le retour du soleil dans le plan final de Sleepy Holow).


  Moi qui n'avais pas poursuivi la trilogie de Ransom Riggs au-delà du premier tome (je préférais rester sur sa conclusion ouverte et incertaine), j'ai apprécié la direction prise ici par le scénario, qui, passés les événements du premier opus, poursuit l'histoire dans une orientation différente du corpus littéraire. Les événements deviennent dès lors plus farfelus, mais cela se fait assez progressivement pour qu'on ne le ressente pas trop violemment. Je regrette seulement la fin un peu trop vite expédiée, et les incohérences dans l'utilisation du cadre temporel (une donnée trop importante dans l'histoire pour qu'on puisse se permettre de la traiter avec légèreté), assurément un piège dans lequel Riggs ne serait jamais tombé.


  Enfin, cerise sur le gâteau, le casting est très convainquant: Asa "Hugo Cabret" Butterfield (qui a bien grandi!) campe impeccablement Jacob, et on croise avec plaisir Judy Dench et le trop rare Rupert Everett (toujours aussi classe, même en personnage secondaire!). Bien évidemment, la palme revient à Miss Peregrine, campée avec un indéniable style par l'incandescente Eva Green, dont le talent est d'hypnotiser le public sans éclipser les autres acteurs. Son jeu donne totalement vie à la femme oiseau imaginée par Riggs : le costume et les cheveux bleu jais, les doigts recroquevillés comme des serres, ou encore les gestes volubiles du rapace prêt à se jeter sur sa proie. Oh, et ce regaaaard!



En bref : Malgré les quelques incohérences et rapidités du scénario, ce dernier film de Burton prouve que le fameux metteur en scène n'est pas mort artistiquement. Avec ce Miss Peregrine au style plus sobre mais non moins travaillé, le réalisateur retrouve toute sa superbe et son film se laisse d'autant plus apprécier. Le tout est porté par un excellent casting, dont le convaincant Asa Butterfield et la superbe Eva Green, sublime.

Et pour aller plus loin...


-Découvrez le roman original ICI. 
 

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