samedi 4 août 2012

Les étranges talents de Flavia de Luce (Flavia de Luce #1) - Alan Bradley

The sweetness at the bottom of the pie, Delacorte Press, 2009 - Éditions J.C. Lattes et éditions du Masque (collection MSK), 2010 - Éditions 10/18, 2013.

Été 1950. Le paisible manoir de Buckshaw est agité par de surprenants événements. Un oiseau mort, timbre collé au bec, est retrouvé devant la porte de la cuisine, un cadavre fait son apparition au beau milieu d’un plant de concombres, et le maître de maison, le colonel de Luce, n’est plus lui-même. Avec son œil affuté et son laboratoire de chimie, c’est Flavia, l’une des trois filles de Luce, qui va mener l’enquête dans le passé tourmenté de son père. Ses meilleurs amis sont les fioles de lithium et de borax, ses lunettes rondes lui servent autant à attirer la compassion qu’à protéger ses yeux des projections d’acide, et nul ne peut résister à sa fabuleuse répartie… surtout pas ses sœurs! 


***


Attention : Coup de coeur et théière en or massif pour ce livre! Dévoré et adoré il y a environ deux ans, je n'ai pu m'empêcher de remettre le nez dedans la semaine dernière en attendant la sortie du tome 3, mais aussi pour mieux vous en parler aujourd'hui...

Lorsque je l'avais croisé au hasard des librairies au cours de printemps 2010, mon attention avait été retenue par la superbe couverture (forcément!), qui m'évoquait un mélange de La famille Addams et d'une atmosphère à la Burton, et ce même si le synopsis rendait plutôt compte d'une intrigue policière. J'avais également remarqué que ce roman avait eu droit à deux sorties françaises simultanées : l'une aux éditions Jean-Claude Lattes (à destination d'un lectorat adulte) et une autre chez leur filiale, les éditions du Masque (collection MSK, qui vise un lectorat jeunesse et jeunes adultes). J'avais connaissance d'une pratique similaire pour les versions originales des Harry Potter (chaque tome sortant en Grande-Bretagne ayant droit à une édition pour adulte et à une autre pour enfant), mais jamais je n'avais vu que cela se faisait chez nous ; Pour autant, cela semblait indiquer une fiction mufti-générationnelle s'adressant autant aux plus jeunes qu'aux plus âgés, ce qui n'a fait que redoubler ma curiosité quant à son contenu...


L'été suivant, contraint à l'immobilisation forcée à la suite d'une opération, je trouvai réconfort et occupation dans la lecture ; Amis et famille m'avaient donc fortement gâté côté bouquins, en particulier Mum qui avait eu la bonne idée de me rapporter Les étranges talents de Flavia de Luce (sans même savoir qu'il me tentait depuis un moment, mais juste parce que, selon elle, "je ne pouvais que craquer sur cette couverture!" : pas de doute, elle me connait bien!). De tous ceux lu cet été là, ce livre reste à ce jour dans mon top 10! Tout d'abord, bien qu'il ne s'agisse pas d'un conte fantastico-macabre comme le suggérait la couverture, le lien avec la Famille Addams n'étais pas mal-vu ; En effet, Alan Bradley créé ici une héroïne à mille lieues de la petite fille ordinaire de 11 ans que l'on peut imaginer : A l'image d'une Mercredi Addams lâchée en pleine campagne anglaise, Flavia est une gamine surdouée et diaboliquement perspicace, pleine de cynisme et d'ironie, un tantinet misanthrope et incomprise, mais, surtout, en total décalage avec sa génération et les personnes qui gravitent autour d'elle. Solitaire et faussement insouciante, Flavia cache derrière un humour noir croustillant une réflexion sur la nature humaine certes souvent défaitiste, mais d'une extrême clairvoyance. En bref : un personnage pour le moins atypique dans l'univers de la littérature jeunesse!


Confrontée à un décès des plus suspects survenu dans le potager du manoir familial, Flavia ne résiste pas à l'envie de fouiner dans le passé de l'inconnu qui a eu la mauvaise idée de rendre son dernier soupir dans les concombres. Mais ce qui semble au départ n'être qu'un jeu de piste sans conséquence prend les proportions d'une réelle enquête criminelle lorsque le colonel de Luce, père de Flavia, est accusé du meurtre et incarcéré par la police. Sans rien perdre de son sang froid et de son humour mordant, la jeune fille se lance en quête de la vérité à cheval sur Gladys (sa bicyclette) et armée de ses connaissances scientifiques. Entre une tarte (probablement) empoisonnée, un martin-pêcheur tué, les secrets de la philatélie et des tours de passe-passe, Flavia aura bien besoin de tous ses étranges talents pour résoudre ce mystère...


  Globalement, qu'en dire? J'ai adoré l'écriture et l'imagination débordante d'Alan Bradley, dont la qualité et la fantaisie sont surprenantes quand on apprend qu'il s'agit d'un premier roman. Délicieusement noir et macabre sans jamais oublier d'être drôle, Les étranges talents de Flavia de Luce est un génialissime hommage à la littérature policière vintage ; En nous plongeant dans le quotidien faussement paisible d'une petite bourgade anglaise des années 50, ce roman nous régale d'une atmosphère aussi authentique que s'il avait été rédigé à cette époque : chaque référence culturelle, littéraire ou historique, toujours d'une grande méticulosité, est propre à instaurer une ambiance rétro réaliste et extrêmement crédible. Alfred Hitchcock et Agatha Christie eux-même n'auraient pas renié cette histoire, tant on croirait qu'ils auraient pu en être les auteurs. En effet, Alan Bradley s'inscrit dans la droite lignée de la Reine du Crime et on peut leur trouver un joli lot d'éléments caractéristiques en commun : un petit village trop banal pour être honnête, une mort fantaisiste, les références à l'univers de l'enfance et des nursery rhymes (le tout emprunt de morbidité), etc...

  Maintes fois primé pour ce livre, Alan Bradley a récemment annoncé sur son blog que Les étranges talents de Flavia de Luce était en cours d'adaptation télévisée pour une série destinée à être diffusée sur la BBC (Enjoy!). En attendant de voir quelle forme prendra le roman à l'écran, je ne résiste pas à l'envie de vous faire saliver avec cette vidéo, trailer du livre pour sa sortie en Norvège, superbement bien filmé!


"Ainsi donc, c'était comme ça que se passaient les choses... baptême ou enterrement, c'était chaque fois la même histoire : sans même un mot gentil, la première femelle en vue se retrouve enrôlée et on l'envoie s'assurer que l'eau bout dans la marmite!"

"Il me vint à l'esprit que le Paradis était sûrement un endroit où les bibliothèques étaient ouvertes vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Voire... huit jours sur sept!"

"J'avais appris qu'un mensonge très détaillé passait plus facilement, comme une pilule amère cachée dans une pomme".

"Le thé gouverne les Anglais beaucoup plus que Sa Majesté ou que l'ensemble des ministres : à l'exception de notre âme, la préparation du thé est la seule chose qui nous différencie des singes."

Pour aller plus loin:



-Découvrez toute la série : le tome 2,  le tome 3 et les suivants...
-Retrouvez l'univers de Flavia au rayon des gourmandises littéraires avec la recette de la tarte à la crème de Mrs Mullet.

2 commentaires:

  1. Dans le second tome, La Mort n'est pas un jeu d'enfant, j'ai été étonnée de voir que Bradley parsemait deci-delà de nombreuses références littéraires (en plus des références à des chimistes!), comme Shakespeare ou Trollope et même Milton et son Paradis Perdu. Je me délecte bien sûr, tout en me demandant ce que j'aurais fait de toutes ses références si j'avais eu le même âge que la narratrice, c'est à dire 11 ans.

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  2. Tu avais raison, Pedro : je me régale !!! :-)

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