samedi 27 novembre 2021

Panique au manoir (Agatha Raisin enquête #10) - M.C.Beaton.

Agatha Raisin and the fairies of Fryfam
, St Martin's Press, 2000 - Editions Albin Michel (trad. de F.du Sorbier), 2018.

    Meurtrie d’avoir été abandonnée par James, l’amour de sa vie, Agatha Raisin s’en remet aux présages d’une diseuse de bonne aventure : elle trouvera l’amour, le vrai, dans le Norfolk. Qu’à cela ne tienne, Agatha quitte Carsely et s’installe dans un charmant cottage de Fryfam où  elle attend le prince charmant en écrivant son premier roman policier : Panique au manoir. Un titre prédestiné car, après une série d’étranges phénomènes, le châtelain du village est assassiné et les soupçons se portent tout naturellement sur Agatha, dont le conte de fées vire au cauchemar…
 
    Avec plus de 350 000 exemplaires vendus, Agatha Raisin, l’héritière très spirituelle de Miss Marple version rock, a imposé sa personnalité loufoque et irrésistible. Vous reprendrez bien un peu de Worcestershire sauce dans votre thé ?
 
*** 

     Soit on aime Agatha, soit on ne l'aime pas. Après le succès rencontré lorsque le premier tome a enfin été traduit en France, la série, si elle fait toujours autant fureur en librairie, a divisé les lecteurs : ceux qui continuent mordicus de la suivre tome après tome, et ceux qui ont abandonné, ne comprenant plus où se situait l'intérêt. On ne le dira jamais assez : chez nous, Agatha Raisin, c'est un vrai guilty pleasure. On a donc décidé de rejoindre la première catégorie. Ainsi donc, très en retard sur la publication française, nous revoilà pour donner notre avis sur ce dixième opus de la série...
 

" — Pourquoi le Norfolk et pourquoi ce village, comment s'appelle-t-il, déjà ? Fry... Farm?
 — J'ai piqué une épingle au hasard sur une carte. Vous comprenez, une voyante m'a dit que je devrais aller là-bas.
 — Et on s’étonne que les églises se vident, murmura Mrs Bloxby, comme pour elle-même. Avoir recours à des extralucides et à des voyantes traduit un manque de spiritualité."

    On a quitté Agatha à la fin du tome précédent, persuadée suite à la prophétie d'une diseuse de bonne aventure qu'elle allait trouver l'amour dans le Norfolk. Bien décidée à suivre (ou à trouver) son destin, la plus célèbre quinqua des Cotswolds change de région et s'installe momentanément dans un petit cottage à Fryfam. Souhaitant comme toujours s'intégrer par tous les moyens, Agatha fait croire aux dames du village qu'elle écrit un roman policier intitulé Panique au manoir, dans lequel le châtelain local se fait assassiner à demeure. Ce qui n'était qu'un mensonge pour frimer en société devient finalement une façon de s'occuper, d'autant qu'il y a, à Fryfam, matière à inspiration : un gentleman farmer vit justement dans un antique manoir du village avec son épouse. S'inspirant des rencontres qu'elle provoque avec le couple pour donner corps à ses personnages, Agatha n'imagine pas qu'elle sera prise à son propre piège quand, tout comme dans son roman, son personnage principal sera véritablement assassiné ! Et comme si la situation n'était pas assez étrange comme cela, il semblerait que Fryfam, ce patelin pétri de superstitions, soit le théâtre d'apparitions de fées et de mauvais tours joués par des farfadets...
 
 Agatha arrivant à Fryfam, dans l'épisode télévisé adapté du roman...


"— Il y a plus de choses dans le ciel et sur la terre, Horatio, que n’en peut rêver notre philosophie , récita Mrs Bloxby.
 — Qui diable est cet Horatio ? fit Agatha."

    On s'en est rendu compte depuis quelques opus : après avoir adoré suivre les investigations d'Agatha à Caresly, on aime beaucoup la suivre dans ses pérégrinations ! Certes, Fyfram n'est pas très différent, mais on apprécie ce nouveau départ dans un patelin similaire et voir Agatha tenter (en vain) de se faire accepter en redoublant d'efforts à l'égard de ses nouveaux voisins, pour finalement s'empêtrer dans une situation catastrophique. Oui, une fois de plus...
 

"— Et votre village du Norfolk, comment le trouvez vous ?
— Bizarre. Il est minuscule et à ce que je vois, une grande partie de le population n'habite ici que l'été, ce qui suffirait à vous faire virer communiste si vous pensez à la pénurie de logements.
 — Ah, mais votre maison ici va être vide pendant l'hiver. Voulez vous que je vous trouve une famille de sans-logis ?
 — Non, pas du tout, répondit Agatha en réprimant un frisson.
 — Je me disais aussi... "
Cette sainte femme de Mrs Bloxby était-elle en train de lui envoyer une pique ? A Dieu ne plaise !"
 

    Si cela devient un peu répétitif, on avoue s'amuser aussi du jeu du chat et de la souris qui s'est amorcé depuis quelques tomes entre Agatha et Sir Charles. Son humour so british a le mérite d'apporter de la légèreté là où James se montrait toujours très froid. On sent bien que l'auteure a décidé de s'amuser encore quelques temps comme ça avec ses personnages, quitte à malmener la patience du lecteur... ou pas. En effet, les dernières lignes amènent un rebondissement des plus inattendus. Mais M.C.Beaton aimant autant le vaudeville que le polar, on se doute qu'on n'est pas encore sorti de l'auberge avec ce triangle amoureux.

Paysage du Norfolk.

"— Vous êtes anglicane ?
— Oui, répondit Agatha, qui n'était rien du tout, mais qui considérait que son amitié avec Mrs Bloxby la qualifiait comme membre de l'Eglise d'Angleterre."

    Côté intrigue, l'affaire est bien emberlificotée et parfois même un peu brouillonne... mais elle est relevée de cette atmosphère de superstitions entourant les fées et les farfadets, qui ajoute une ambiance dépaysante et nous rappelle l'histoire des fées de Cottingley. Certes vite lu et en partie vite oublié, ce dixième volume se lit sans déplaisir au coin du feu.
 
Affaire des fées de Cottingley....
 
" L'humour était une arme indispensable contre les chagrins et les tribulations de l'existence."
 
En bref : Qu'on l'aime ou qu'on s'en soit lassé, reconnaissons à Agatha Raisin le mérite de nous offrir, à défaut de grande littérature, quelques heures d'évasion et de franches tranches de rire. L'intrigue remplit son office et c'est tout ce qu'on lui demande !

 

1 commentaire:

  1. L'amitié Agatha-Mrs Bloxby est l'alliance de la carpe et du lapin, plus drôle dans livres que dans la série télé, entre l'attitude rugueuse et mauvaise foi de l'une, et la diplomatie lucide de l'autre.

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