Les nouvelles enquêtes de Miss Fisher
(Ms Fisher Modern Murder Mysteries)
- Saison 2 -
Une série de Deb Cox et Fiona Eagger d'après les personnages de Kerry Greenwood.
Avec : Geraldine Hakewill, Joel Jackson, Catherine McClements, Toby Truslove...
Première diffusion originale : 7 juin 2021
Première diffusion française (Warner TV) : 23 février 2020
A Melbourne, Peregrine Fisher combat le crime lors de nouvelles enquêtes
qui la conduisent dans des lieux saugrenus et vit sa romance avec le
détective James Steed...
***
Si vous êtes des habitués du blog et que vous suivez nos publications depuis quelques années, vous n'êtes certainement pas sans connaître notre amour inconditionnel pour Phryne Fisher, l'héroïne des romans policiers australiens de Kerry Greenwood. Outre les livres, nous avons également décortiqué l'adaptation en série télévisée ainsi que sa clôture par un long-métrage de cinéma sorti en 2020. Fort du succès de ces transpositions mais dans l'incapacité de poursuivre le tournage des Miss Fisher enquête ! (pour des raisons de budget et d'indisponibilité du casting), ses créatrices Deb Cox et Fiona Eagger ont proposé le lancement d'un spin-off se déroulant trente ans plus tard. Il met en scène la nièce et digne de successeuse de Phryne : Peregrine Fisher.
Trailer VO de la seconde saison.
Bien que Peregrine ne soit pas un personnage créé par Kerry Greenwood, l'autrice des romans Miss Fisher enquête ! a pleinement adhéré au projet et l'a soutenu avec ferveur. La série Miss Fisher Modern Murder Mysteries (Les nouvelles enquêtes de Miss Fisher) a ainsi vu le jour en 2019 pour une première saison de 4 épisodes de 90 minutes, diffusée en France début 2021 sur Warner TV. Suite à ce début très prometteur (voir notre article sur la saison 1 ICI), nous attendions tous de pied ferme la suite des aventures de la pétulante Peregrine. Après un avenir incertain sur la chaine australienne qui avait initialement diffusé la première saison et un hiatus de deux ans, c'est finalement la plateforme de streaming Acorn TV qui a repris la franchise et passé commande d'une deuxième saison...
Trailer VF de la saison 2 pour la diffusion sur Warner TV.
Pour l'occasion, le cahier des charges a été quelque peu revu et corrigé : au lieu du format 90 minutes initialement choisi pour ce spin-off, Acorn TV demande un retour au format 50 minutes, mais passe commande du double d'épisodes. C'est probablement la meilleure décision qui pouvait être prise : en plus de savourer 8 intrigues inédites, la durée plus condensée et beaucoup plus propice réinstaure un rythme qui manquait peut-être un peu à la saison précédente.
Fidèlement aux codes instaurés dès Miss Fisher enquête !, les scénarii permettent pour chaque épisode de Ms Fisher Modern Murder Mysteries d'immerger le téléspectateur dans un nouvel univers, souvent très évocateur de la période qui sert de contexte. Alors qu'on avait parcouru tous les lieux et décors emblématiques des Roaring Twenties avec Phryne (cabaret, speakeasy, le milieu émergent de la radio, le stylisme, les casinos clandestins...), on poursuit sur cette même lancée avec Peregrine. Après le prêt-à-porter des grands magasins, les émissions de variété, les OVNIs et les écoles de cuisine mixtes, on suit la pétillante enquêtrice dans club de libertins puis au sein d'une école d'hôtesses de l'air, ou encore en plein concours canin. Cette saison se termine par ailleurs sur un épisode de fête qui fait écho au Christmas Special qui clôturait la saison 2 de la série originale : on termine ici cette nouvelle salve d'enquêtes en beauté par un meurtre le soir du Nouvel An 1965, entre paillettes et champagne (une intrigue de saison, donc). D'un univers à l'autre, ces 8 épisodes se suivent donc avec plaisir et ce même si les scenarii restent inégaux : on alterne entre des intrigues bien ficelées et certaines autres parfois trop cousues de fil blanc.
Toujours dans la lignée des thèmes mis en avant dans la série originale, Ms Fisher Modern Murder Mysteries continue d'aborder la place de la femme. Ce sujet, très à propos dans les années 1920 (période d'une première vague d'émancipation féminine au sortir de la Première Guerre mondiale), trouve une résonance avec les années 1960, marquées par l'émergence de la libération sexuelle qui explosera dix ans plus tard. L'évolution des mœurs (le mariage, l'amour libre, l'homosexualité...) est ainsi au centre de plusieurs enquêtes, mais, surtout, s'incarne principalement via le personnage de Peregrine, dont on suit avec intérêt l'évolution psychologique. Loin d'être une copie de sa tante, Peregrine, qu'on a rencontré solitaire et insouciante, gagne ici en confiance et en charisme : débrouillarde et volontaire, elle découvre qu'elle peut être maîtresse de son existence, et que les codes habituellement imposés aux femmes (mariage, enfants et tâches domestiques) ne sont décidément pas sa tasse de thé. Elle prend énormément en maturité et en professionnalisme, tout en gardant la malice qui lui est propre.
Cette évolution n'est pas sans impact sur sa relation avec le détective James Steed. Si leur couple s'était formé plus rapidement que le duo Phryne / Jack (encore une fois, les scénaristes sont pertinemment passés à côté de l'écueil du copié-collé), ils sont aussi confrontés beaucoup plus tôt à leurs différentes visions de la vie conjugale et connaîtront quelques orages. L'occasion pour la série de nous en faire découvrir davantage sur le passé de James et de faire entrer en scène son ancienne fiancée, une rivale de choix pour Peregrine. Du côté du Club des Aventurières, on apprécie de retrouver la team qui œuvre aux côté de la jeune détective. On regrette que le duo Samuel / Violetta suive un chemin qui ressemble un peu trop au couple Hugh / Dotty, mais on est heureux de voir les secrets de Birdie, ancienne espionne et mentor de Peregrine, resurgir peu à peu. Cette intrigue secondaire enflera progressivement au point d'apporter son lot de révélation dans l'épisode 6 "Meurtre au Colombier" et conduira presque Birdie et son apprentie à se confronter, voire à s'affronter.
Si on regrette encore l'absence de liens plus concrets avec la série initiale (on ne sait toujours pas ce que son devenus Dotty, Hugh, Jack Robinson, ou même Jane), Phryne est souvent évoquée et son aura reste très présente. Pour ce qui est du reste, la série s'amuse, entre polar classique et espionnage vintage, à multiplier les clins d’œil à plusieurs univers de référence (Chapeau Melon et Bottes de Cuir, toujours, ou encore James Bond) sans oublier d'approfondir sa propre mythologie. Ainsi, tout comme Miss Fisher enquête ! qui avait subitement gagné en qualité dès la saison 2 (on avait noté un meilleur traitement de l'image, une recherche esthétique plus travaillée, et même une amélioration dans les intrigues), ce spin-off semble marcher dans les pas de son aînée. A côté de cette saison 2 beaucoup plus subtile et léchée, les quatre épisodes de la saison 1 font figure de petit échauffement.
Les costumes de Maria Pattison (créations originales complétées de tenues d'époque) gagnent en glamour et en style, et montrent en même temps que Peregrine a trouvé sa ligne couture. Du tailleur pantalon à carreaux à la robe à sequins dorés du Réveillon, en passant par une superbe robe Mondrian (un an avant celle officiellement créée par Yves Saint-Laurent !), la nièce de Phryne témoigne du même goût que sa tante pour la mode.
Une grande importance est également apportée aux décors, même s'ils ne sont pas aussi opulents que ceux dans lesquels évoluait Phryne. Outre Labassa Mansion (manoir melbournais, siège du Club des Aventurières), on passe d'un bowling au kitsch rutilant aux lignes futuristes des maisons d'architecte mi-verre, mi-teck, typiques des fifties et des sixties. Même le montage des épisodes s'amuse d'effets visuels dignes de la télévision des années 60 (scènes de transition travaillées par un découpage de l'écran en trois, ou flashbacks mis en évidence par un cadre noir façon anciennes diapositives), le tout pour un rendu délicieusement suranné et totalement assumé.
Robe Mondrian divinement sixties...
Nous n'avions pas parlé, dans notre article sur la première saison, de l'atmosphère musicale. Il faut dire que là où son aînée excellait, on avait été beaucoup moins marqué par les mélodies de cette nouvelle Miss Fisher. Un mieux s'amorce aussi de ce point de vue dans cette seconde saison : la série pioche aussi bien dans les vieux standards langoureux que dans la pop réjouissante des sixties. Le tout parvient davantage à mettre en valeur les compositions originales d'inspiration rétro de Bukhard Dallwitz, évoquant tantôt le thème de Drôle de Dames, tantôt celui de James Bond. Effet nostalgie assuré.
En bref : La série monte d'un cran avec cette deuxième saison : les scénaristes comme le casting semblent avoir trouver leurs marques et l'ensemble gagne autant en esthétique qu'en qualité d'écriture, même si certains scenarii restent parfois simplistes. Cela n'empêche pas de savourer ces huit épisodes comme on le ferait d'un roman de cosy mystery réconfortant et léger comme on les aime. Moitié spin-off, moitié suite, cette nouvelle Miss Fisher marche dans les pas de Phryne avec style – Glamour, rythme et fantaisie sont au programme. Autant dire qu'on est (déjà) très impatient de voir arriver la prochaine saison...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire