mardi 8 octobre 2019

Ann Radcliffe contre les vampires - Paul Féval.

La ville-vampire, ou bien le malheur d'écrire des romans noirs, Paul Féval, 1867 - Publication sous forme de feuilleton dans "Monsieur Universel" du 12 septembre au 25 octobre 1874 - Éditions E.Dentu, 1875 - Ann Radcliffe contre les vampires, Éditions les moutons électriques / coll. les saisons de l'étrange.

  Et si Ann Radcliffe, célèbre pour ses romans gothiques, avait elle-même été la protagoniste d'une aventure pleine de danger ? C'est ce qu'elle a raconté au grand feuilletonniste français Paul Féval, qui rapporte le récit de la lutte de la jeune femme contre l'atroce M. Götzi, le vampire aux yeux verts luminescents, et sa découverte de toute une terrifiante cité : la ville-vampire !

  Un roman drôle et enlevé qui appartient à la veine fantastique de Paul Féval (1816-1887), célèbre pour avoir écrit une des œuvres les plus abondantes et les plus échevelées du XIXe siècle (Le Bossu, Les Mystères de Londres, Les Couteaux d'or, Les Habits noirs). Un roman précurseur, qui influença la fiction vampirique, notamment Tanith Lee et Poppy Z. Brite, et ose pour la première fois mêler figures réelles et figures mythiques, avec un bon brin d'humour.

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  Faire d'un auteur célèbre le héros d'une fiction d'aventure nous semblait un concept tout récent (Oscar Wilde et le meurtre aux chandelles, la série des Voltaire mène l'enquête, Agatha, es-tu là?, etc), de même que les parodies horrifiques de classiques de la littérature (Orgueil et préjugés et zombies). Détrompez-vous. Bien avant les meilleurs exemples connus du genre, un écrivain s'était déjà risqué à cet exercice on ne peut plus audacieux : Paul Féval, feuilletoniste français du XIXème siècle, connu pour ses nombreux romans dont Les mystères de Londres, mais surtout Le bossu, classique de cape et d'épée maintes fois adapté à l'écran.

" Si Elle eût composé un de ses chefs-d’œuvre sur le sujet qui nous occupe, vous eussiez eu, dans les chapitres explicatifs placés à la fin du récit, des renseignements particuliers sur cette classe sociale, redoutée mais peu connue : les vampires."  

Pau Féval

" Un nuage, encore lointain, apparut dans le ciel bleu. Elle le vit grossir, avancer, s'assombrir, recelant dans ses flancs... Mais n'anticipons pas. L'orage éclatera toujours assez vite. (Je ne sais pas si vous êtes comme moi, mais chaque fois que, dans ses incomparables récits, Elle emploie cette formule, positivement inventée par Elle : "N'anticipons pas", j'ai la chair de poule.)"

  En 1867, le romancier français, persuadé de s'être fait plagié l'un de ses feuilletons par un auteur anglais, décide à son tour de s'emparer d'une thématique (ou en tout cas d'une figure) toute britannique. Il se lance dans l'écriture de La ville-vampire (rebaptisé pour la présente édition Ann Radcliffe contre les vampires – merci la pop culture et le domaine public), mettant en scène la véritable romancière anglaise Ann Radcliffe (1764 - 1823), aux prises avec des créatures de la nuit. Qui est Ann Radcliffe et pourquoi l'avoir choisie comme héroïne d'une telle aventure? Issue d'un milieu modeste et épouse d'un juriste qui se réorienta dans l'édition de presse, Ann Radcliffe est aujourd'hui reconnue comme la pionnière du roman gothique, dont elle aurait la première défini les codes. Héroïnes courageuses, lords mystérieux ou maudits, forêts sinistres, manoirs en ruines et secrets d’alcôves : tous ces éléments clefs parsèment son œuvre (Les mystères d'Udolphe, Les mystères de la forêt...) et on influencé de nombreux auteurs à sa suite, des sœurs Brontë à Mary Shelley. Jane Austen elle-même s'était amusée à pasticher la célèbre créatrice du gothique dans son roman Northanger Abbey.

"C'est ici un scrupule tout anglais. En Angleterre, nous avons horreur du scandale appelé enlèvement. Plus nous donnons de liberté à la jeune fille dans nos familles, plus nous exigeons d'elle que jamais elle ne rompra les liens de convenances. La décence est une vertu anglaise. Je ne crois pas que notre Anna ait mis un seul enlèvement dans ses livres ; j'entends un enlèvement consenti par la jeune personne, car le rapt est un cas de force majeure moins choquant."

Ann Radcliffe

"Il n'y a point de pays au monde où le principe de liberté soit aussi splendidement appliqué qu'en Angleterre. Néanmoins, je ne pense pas que nos lois permettent d'exposer publiquement sur la scène un vrai vampire écrasant les os et buvant le sang d'une vraie jeune fille. Ce serait un excès."

  La ville-vampire se présente comme un enchâssement de plusieurs histoires : récit dans le récit... dans le récit. Le feuilleton débute par la prise de parole de l'auteur, qui devient aussi le premier narrateur. Affligé par le plagiat auquel s'adonnent les auteurs anglais sur les textes français, il se voit invité par une amie britannique, appelée Mylady, qui lui propose de renverser la balance en lui soumettant un sujet tout anglais dont il pourra s'emparer. Elle l'accueille donc dans son domaine du Shropshire et lui présente une dame quasi-centenaire, amie d'enfance de la célèbre Ann Radcliffe, qui lui confie une aventure tenue secrète vécue par la célèbre romancière aux veilles de son mariage. La future auteure (alors encore appelée Miss Anna Ward) aurait traversé toute l'Europe aux trousse de M.Goëtzi, un vampire décidé à s'en prendre à deux de ses amis dont il avait été le précepteur. Accompagnée dans cette course-poursuite par son domestique et quelques autres compagnons, elle aurait trouvé dans cette folle épopée l'inspiration nécessaire à son œuvre.


"— Quelle est cette petite fête? demanda notre Anna.
— C'est de vous boire, répondit Merry Bones.
  Elle faillit tomber à la renverse.
— Me boire! répéta-t-Elle d'une voix éteinte.
— Tout à fait, répartit Merry Bones, qui ajouta : C'est vrai qu'ils préfèrent les jeunes personnes de moins de vingt ans ; mais voici les propres paroles de M.Goëtzi ; il a dit : "Miss Anna Ward, à la rigueur, doit être encore potable."
— Potable! s'écria notre malheureuse amie en joignant ses mains crispées ; potable! Dieu Seigneur! Potable!
  Je pense, Mylady, et vous, genleman, que vous vous représentez les sensations diverses qui devaient l'agiter. Il n'y a pas beaucoup de situations aussi horribles dans la littérature moderne."


  Texte presque oublié quoi que précurseur, La ville-vampire s'inscrit, bien avant le Dracula de Bram Stocker, dans la veine initiée par Le vampire de Polidori (1919) : la littérature s'est déjà emparée du thème du non-mort et le définit progressivement, le dessine petit à petit. Dans l'héritage des précédents écrits sur ce sujet et comme annonciateur de ceux qui suivront, Paul Féval (qui a par ailleurs déjà écrit deux précédents romans mettant en scène des vampires) en fait des créatures originaires de l'Europe de l'Est : la ville-vampire où l'héroïne doit se rendre pour vaincre son ennemi est une sorte de cité-nécropole près de Belgrade, où tous les non-morts se réfugient pour se ressourcer. Ceci étant, d'autres caractéristiques prêtées aux vampires de Féval ne sont pas restées dans la mythologie actuelle : leur éclat luminescent vert, par exemple, la capacité de se dédoubler, ou encore celle de donner leur apparence à leur victime une fois vampirisée.

Scène illustrée d'un roman d'A.Radcliffe, très dans l'atmosphère du roman de Féval...

"M.Goëtzi, n'étant ni roi, ni dictateur, ni tribun, ni philosophe humanitaire, ni fondateur de crédits immobiliers, ni baron Iscarote, ni baronne Phryné, ne pouvait prétendre à faire partie de l'aristocratie des vampires. C'était un simple docteur, et encore, il n'exerçait pas la médecine. Aussi n'avait-il qu'un tombeau très mesquin et qui inspirait presque de la compassion si on le comparait aux sépultures patriciennes. C'était une pauvre chapelle de style grec barbare, à peine plus grande que Saint-Paul de Londres."

  Féval, qui connait manifestement bien l’œuvre de Radcliffe, s'y réfère dans le fond comme dans la forme : au nombreuses références à sa bibliographie ou à son écriture, il ajoute une construction évocatrice (l'enchâssement des récits évoqué plus haut) ainsi qu'un style flegmatique à souhait. Flegmatique ou feuilletonisant? Si la plume et l'humour quasi british du texte pourraient évoquer un clin d’œil à l'écriture britannique, n'oublions pas que le style propre aux romans feuilletons d'antan utilisait souvent les mêmes ressorts : lecteur pris à parti par l'auteur, distance assumée entre narration et situations, etc... Et puis surtout, il y a ce phrasé caractéristique plein de superlatifs, d'adjectifs à n'en plus finir et d'expressions grandiloquentes et interminables, qui nous rappelle que l'auteur de romans feuilletons est rémunéré au mot près, et qu'il n'hésitera donc pas en conséquence à rallonger la sauce (la description sans fin de la ville-vampire, toute en colonnades et en marbre, ou encore le réveil de la ville lorsque toutes les sculptures semblent prendre vie sont parmi les meilleurs exemples du livre). Si cet aspect très suranné dans l'écriture apporte une touche rétro appréciée, La ville-vampire, tout texte avant-gardiste qu'il soit, n'en reste pas moins une œuvre d'un autre temps dont tous les aspects n'ont pas forcément bien vieillis. Certains éléments, très passés de mode, pourront heurter le lecteur ou venir handicaper la fluidité initiale de la lecture : le rythme très inégal et la construction enchevêtrée par exemple, notamment dans le dernier tiers du livre où les rebondissement s'enchaînent et s'entremêlent à une telle vitesse qu'on perd vite le fil des événements de même que leur sens.


"Le sombre et le brillant, la nuit et le jour, le gracieux et le terrible étaient mêlés là-dedans et confondus en d'infernales promiscuités. Ce n'était plus même un rêve ni un cauchemar, ni une hallucination : c'était la débauche de toutes ces choses réunies, leur bataille et leur tempête."

  Il en reste en tout cas un roman à redécouvrir pour ses aspects les plus modernes et l'audace du projet de Féval. Le titre de cette réédition, clin d’œil évident à Buffy contre les vampires, vient d'un parallèle dressé dans la très érudite postface par Adrien Party (webmaster de vampirisme.com), qui compare la troupe menée par Ann Radcliffe dans ce roman au scoobygang de la célèbre série de Joss Whedon. En guise d'introduction à cet ouvrage, on découvre avec amusement des vraies-fausses citations de Buffy, A.Van Helsing, ou encore de Lord Ruthven qui louent les talents de tueuse de vampires d'Ann Radcliffe!

FanArt inspiré par le roman de Féval 
(même si Ann Racliffe emprunte ses traits à M.Shelley...)

"Comme elle était philosophe et tout imprégnée de la pensée des sages, tant chrétiens que païens, elle en vint à se dire que ces excès de bonheur pourraient bien avoir leurs revers. Ainsi est la vie humaine : action, réaction. Quiconque gagne perdra. Et derrière l'horizon, il y a toujours des nuages qui sont en route pour couvrir le plus radieux ciel."

En bref : Très ancré dans la culture du roman-feuilleton d'antan, cette histoire méconnue de Paul Féval n'en reste pas moins un texte d'avant-garde tant dans son inspiration que dans l'image du vampire qu'il véhicule avant que Bram Stoker ne s'en empare. En faisant d'Ann Radcliffe, véritable auteure anglaise et pionnière du roman gothique, l'héroïne d'une histoire de vampires menée tambour battant entre road-trip horrifique et pastiche d'un roman de mœurs à l'anglaise, il renverse les codes du roman fantastique bien avant une mode qu'on imaginait très actuelle.

mercredi 2 octobre 2019

France obscure et mystérieuse : dans les archives du Terrier...


  Pour cette première publication du challenge édition 2019 et tout spécialement consacré au mystère à la française, je vous propose comme chaque année de faire d'abord un petit tour aux archives. C'est que votre humble serviteur n'avait pas attendu cette année pour faire rimer hexagone avec sorcière, fantômes, et vampires! Faisons donc un petit récap' des lectures passées qui s'accordent au thème de cette année, un florilège de lectures à recommander aux participants du challenge ou aux futurs lecteurs qui veulent, tout comme nous, se mettre dans l'ambiance...


Romans feuilletons:

  La source principale de littérature à l'origine du thème de cette année. Les romans feuilletons sont parmi les premiers en France à avoir régalé le lectorat d'histoires horrifiques qui se voulaient le pendant hexagonal du penny dreadful anglais. Moins grand-gignolesque, cette littérature de genre tenait en haleine les lecteurs pendant plusieurs semaines d'affilée et certains de ses meilleurs titres sont devenus des classiques des lettres françaises.


  Roman feuilleton devenu un grand classique français, le fantôme de l'opéra est devenu un véritable mythe, bien au-delà des limites hexagonales. Cette histoire horrifique et romanesque d'une jeune cantatrice aux prises avec un fantôme résidant dans les souterrains du palais Garnier a inspiré de nombreux films, comédies musicales et même un opéra!


Belphégor, d'A.Bernède:

  A l'origine d'un mythe aussi célèbre que le fantôme de l'opéra, le fantôme du Louvre a bien évolué depuis ce roman original. Davantage dans la veine du polar ésotérique que de l'aventure fantastique, ce livre pourra surprendre ceux qui croyaient déjà connaître Belphégor à travers les adaptations peu scrupuleuses filmées plus tard pour le petit et le grand écran.


Albums:

  Histoires d'ici ou d'ailleurs illustrées par des artistes français, adaptations de classiques mis en images par des plumes francophones, les albums sont l'occasion d'imaginer ou de réinterpréter le fantastique et le mystère via des visuels qui se veulent percutants. Voici une sélection des meilleurs ouvrages bien de chez nous chroniqués jusqu'ici...

Le fantôme de l'opéra, album de C.Beigel et C.Espié d'après G.Leroux:

  Adaptation illustrée pour la jeunesse du classique de Gaston Leroux, cet album un peu trop lapidaire dans son texte n'en reste pas moins une merveilleuse transposition, notamment grâce aux illustrations de C.Espié. Dans un genre qui évoque l'impressionnisme, elle restitue tout le faste du palais Garnier et l'aura sombre du fantôme...


La dame de Pique, album illustré par H.Bogo d'après A.Pouchkine:

  Une histoire de fantôme russe mise en image par un talentueux illustrateur français. Sous sa plume nuancée qui évoque là aussi l'impressionnisme français, la nouvelle de Pouchkine prend vie...


Dracula, album de D.Marion illustré par J.Fleury d'après B.Stoker:

  Merveilleuse adaptation du classique de Stoker pour la jeunesse : le texte reprend les meilleures passages de l'histoire et les dessins du Français J.Fleury (qui évoqueront aux fans les scènes cultes du film de Coppola) sont magnifiques!

Les contes macabres, album illustré par B.Lacombe d'après E.A.Poe:

  Les illustrations du talentueux artiste français B.Lacombe s'accordent à merveille avec l'univers gothique de Poe. Ces contes choisis parmi les nouvelles horrifiques du célèbre auteur américain s'animent sous les coups de crayon et l'encre noire de notre dessinateur favori : flous artistiques, perspectives hallucinantes, visages pâles et lèvres écarlates... une merveille!

Généalogie d'une sorcière (La petite sorcière et Grimoire d'une sorcière), diptyque de S.Perez et B.Lacombe:

  L'histoire de Lizbeth, petite sorcière issue d'une longue lignée de magicienne. Le premier ouvrage raconte l'histoire de la fillette et le second est un grimoire qui retrace sa généalogie, au croisement de sorcières réelles et de sorcières fictives de la littérature. Le tout est merveilleusement mis en images par Benjamin Lacombe.
   

Romans et nouvelles contemporains :

  Les auteurs français d'aujourd'hui ne sont pas aussi connus que les Anglo-saxons pour leurs écrits fantastico-horrifiques, mais nous avons tout de même quelques belles pièces à mettre en haut de notre PAL halloweenesque!

La malédictions d'Old Haven, dyptique de F.Colin:

  Dans une Amérique uchronique du XVIIIème siècle, une jeune fille se découvre héritière d'une longue lignée de sorcières et entame une aventure romanesque au croisement des références culturelles et littéraires. Une grande fresque d'aventure portée par le talent de Fabrice Colin, un coup de cœur du blog.

 Les étranges sœurs Wilcox, saga de Fabrice Colin:

  Dans le Londres du XIXème siècle, deux sœurs se réveillent sans aucun souvenir, dans une nuit glaciale. Recueillie par les célèbres Holmes et Watson, elles ne tardent pas à réaliser qu'elles ont été vampirisées. Avec l'aide du célèbre détective et dans une ambiance très steampunk, elles partent en chasse pour réduire à néant le comte Dracula. Un récit pour la jeunesse dans la veine de La ligue des gentlemen extraordinaires, et qui n'est pas sans rappeler un bon vieux penny dreadful.

Carabosse, de M.Honaker:

  Cette variation autour de la méchante de La Belle au Bois Dormant, par un excellent auteur français, se révèle enivrante de par son ambiance et la complexité de ses personnages, dans un univers lyrique hérité des mythes arthuriens et du conte de Perrault.


  La première est aujourd'hui un classique de la littérature jeunesse contemporaine française, étudié dans les classes et adapté au cinéma. La seconde, moins connue, reste ma préférée des deux avec des petite héroïnes pleines d'énergie et de répondant, des personnages hauts en couleurs, et une magie écologique fort bien pensée.
   
Lumière, de C.Trébor:

  L'aventure, pendant le siècle des Lumières, d'une jeune fille qui voyage de Paris jusqu'en Russie impériale pour y rencontrer la charismatique Catherine II. Partant d'un contexte historique foisonnant (le XVIIIème siècle et le milieu des Encyclopédistes), l'auteure tisse une intrigue fantastique en confrontant notre héroïne à l'histoire des sorcières de Russie, dont elle se découvre être la descendante.

Les oiseaux noirs, de Faustina Fiore:

  Si ce roman se révèle davantage initiatique qu'horrifique, il se déroule dans un village d'atmosphère médiévale ou sévit une étrange malédiction : les attaques intempestives de corbeaux qui débarquent par centaines pour prendre des vies. Le jeune Arno, décidé à découvrir l'origine de ces assauts, part en voyage en quête de vérité.

Peggy Sue et les fantômes, série de romans de S.Brussolo:

  Par l'auteur considéré par le "Stephen King français", cette série pour la jeunesse est apparue dans les années 2000 et a été vite vendue comme la réponse française au succès Harry Potter. Les deux sagas n'ont pourtant rien en commun, si ce n'est d'être des romans fantastiques à destination de la jeunesse. L'histoire est celle de Peggy, une préado capable de voir les fantômes et autres esprits démoniaques grâce à une paire de lunettes magiques. Si la série a eu un grand succès à travers le monde, elle s'est faite plus discrète ces dernières années quoi que l'auteur continue pourtant d'élargir l'univers du personnage via d'autres séries et spin off. A redécouvrir pour les curieux ou les nostalgiques.

 La femme dans le miroir, de T.V.Tran Nhut:

  Un des premiers coups de cœur du blog : l'auteure, française d'origine vietnamienne, imagine un conte moderne pour adulte, une histoire d'amour et de mort autour des vanités et de l'alchimie. Une merveille baroque, sombre et poétique.

Le destin des initiés, saga de R.Taguchi:

  Entre la France et le Japon, une aventure contemporaine fantastique qui revisite le mythe des sorcières au croisement de deux cultures différentes. 

Appearance, fanfiction d'Oscar de Jargey:

   Fanfiction en anglais écrite par une autrice française qui prend un pseudonyme masculin anglais... tout ça, c'est un peu compliqué, mais le résultat est enthousiasmant : une histoire inédite dans l'univers d'Harry Potter sur les personnages de McGonagall et Poppy Pomfresh. 

Fantasmagories, nouvelles fantastiques par les élèves du collège du Vieux Chêne: 

  Un sympathique recueil écrit par une bande d'audacieux collégiens. Mené par leur professeur dans ce projet d'écriture, ils ont composé cette anthologie directement inspirée des nouvelles fantastiques classiques.

Bandes-dessinées :

Fantômette et l'étrange cas du Dr Jonquille, BD de P.Druart d'après G.Chaulet:

  Adaptation d'une nouvelle de George Chaulet, cette BD met en scène Fantômette, la célèbre héroïne française dans un pastiche directement inspiré de l'étrange cas du Dr Jeckyll et de Mr Hyde. Références visuelles et clins d’œil au cinéma d'horreur ou à la littérature de genre parsèment cet album illustré dans un pure style vintage. Me contacter directement pour se procurer un exemplaire.


Cinéma et télévision:


Le pendu, un film de C.Devers d'après H.James:

  Une petite merveille de télévision : dans ce téléfilm de la cinéaste française Claire Devers, une nouvelle fantastique et pastiche d'H.James est transposée sur une île bretonne. Dans la veine d'un film de Pascal Thomas, deux vieilles filles aux tempéraments opposés se disputent un héritage et... le fantôme qui va avec.

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  Et voilà pour un premier florilège de recommandations sorties de nos archives avant de vous proposer de l'inédit! Nous espérons que ces quelques idées alimenterons vos PAL respectives. ;) 


mardi 1 octobre 2019

A frenchy Halloween is coming : la France obscure à l'honneur pour les dix bougies du challenge!


Chers infortunés lecteurs et amis blogueurs,

  Un an déjà s'est écoulé depuis nos dernières lectures hantées : il y a 365 jours s'ouvrait un mois entièrement dédié au challenge Halloween précédent, romans de fantômes et autres victimes possédées pour l'occasion de nos habituelles festivités.

  Cette année marque un événement important : le challenge existe depuis maintenant dix ans! Pour le célébrer correctement, il a été évoqué qu'on mettrait à l'honneur la culture française de l'horreur. Après réflexion et concertation, Lou & Hilde, nos divinement horribles organisatrices, nous ont fait leurs propositions. Un planning digne d'Halloween, melting pot divers et varié de tout ce qui peut faire de ce mois une période dignement fêtée ...

Tic tac tic tac... 

La France obscure du 2 au 4 octobre
Cosy week-end les 5 et 6 octobre
Monstres et créatures du 7 au 9 octobre
Yokai et Esprits japonais du 10 au 12 octobre
Film d’épouvante américain le 13 octobre
American Halloween du 14 au 16 octobre
Contes et légendes le 17 octobre
British Halloween du 18 au 20 octobre
Une lecture fantomatique avec Ruth Hogan le 21 octobre
Cosy Halloween du 22 au 24 octobre
Lecture d’Amelia Fang le 25 octobre
Pumpkin Day et albums le 26 octobre
Contes et Légendes le 27 octobre
Lecture des Attracteurs de Rose Street le 28 octobre
Bricolage, scrap et home déco le 29 octobre
On ouvre les paquets du swap le 30 octobre
Halloween celebrations le 31 octobre
On savoure encore l’ambiance du 1er au 11 novembre

  Les libertés étant acceptées, au Terrier, nous nous en tiendrons à un challenge strictement (ou du moins, quasiment) franco français, l'occasion de montrer que l'art de l'horreur et des pierres tombales peut aussi être hexagonal. Ah? Mais qu'ouïs-je, qu'entends-je, que vois-je? On me dit qu'une des plus célèbres héroïnes parisiennes a pris connaissance de notre newsletter avant l'heure.

  Laissons-la s'exprimer, en direct depuis son confortable appartement du quatorzième arrondissement (cliquez sur les images pour les voir en grand) :


  En attendant de découvrir la sélection de la célèbre romancière, nous avons d'ores et déjà la certitude de (re)découvrir sa vie d'aventurière. Quelle meilleure porte d'entrée pouvait-on imaginer pour appréhender le genre du roman feuilleton, le premier à s'amuser sans honte aucune du fantastique, des monstres et d'autres démons. Afin de préserver le secret nécessaire à cette dixième édition anniversaire, nous laissons la dernière parole à notre idole :


Mamz'elle Adèle et moi-même déclarons les festivités ouvertes et souhaitons un effrayant challenge à tous les participants!



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lundi 30 septembre 2019

Koba - Robert Littell.

Koba, (première édition mondiale traduite par M.Leroy-Battistelli), éditions Baker Street.

  Dans son vingtième roman, Robert Littell met en scène pour la première fois un enfant comme héros et narrateur. Le jeune Léon est à la fois intellectuellement précoce et d'une candeur désarmante ; ses rencontres avec un péremptoire vieillard dont il ignore l'identité seront surprenantes et instructives pour l'un comme pour l'autre.
   La Maison du quai est un vaste immeuble à Moscou, où logent des fonctionnaires, des apparatchiks soviétiques, ainsi que le jeune Léon Rozental. Après la mort de son père, physicien nucléaire, dans un accident de laboratoire, et l'arrestation de sa mère pendant la purge stalinienne des médecins juifs, Léon et d'autres enfants se cachent du NKVD dans les pièces secrètes du bâtiment. Lors d'une expédition souterraine, il découvre un passage menant à une immense salle de bal désaffectée. Il y rencontre Koba, un vieil homme peu avenant dont l'appartement est protégé par plusieurs gardiens jouant aux échecs. Koba est un officier soviétique haut placé, plus important encore que Léon ne peut l'imaginer, et qui connaît de façon troublante les pensées et machinations du camarade Staline...

   Dans ces conciliabules entre un jeune garçon naïf et un tyran paranoïaque, Robert Littell fait un portrait ambigü du dictateur soviétique, montrant son côté humain et en même temps une inconscience totale par rapport aux souffrances qu'il a infligées au peuple russe des décennies durant.

   Le charme et la spontanéité du jeune Léon en font un personnage irrésistible - et qui n'est pas sans rappeler Holden Caulfield, à qui il avoue s'identifier - pris dans la toile d'araignée du récit tissé par cette figure énigmatique.

***

  Ce n'est pas parce qu'un roman est d'un auteur dit excellent et unanimement salué par la critique qu'on y trouvera son compte : les goûts et les couleurs, ça ne se discute pas. C'est un peu comme pour les thèmes et dans la cas présent, l'URSS n'a jamais été mon sujet historique favori, mais pour ne pas mourir idiot, j'y ai quand même jeté un œil. Puis un second. Puis je me suis laissé happer par Koba, vingtième roman de Robert Littell.

"Écoute moi bien, petit. Retiens chacun de mes mots. Ce que je vais te dire, je le tiens de source sure : personne n'est innocent !"

  Pourquoi, finalement, alors que rien ne m'y préparait? Parce que l'ambiance, parce que l'écriture : non sans une certaine théâtralité (dans le fond comme dans la forme, d'ailleurs), Robert Littell met en scène un orphelin, Léon, réfugié dans les corridors secrets de la Maison du Quai de Moscou, garçon précoce qui allie l'intelligence du surdoué et la naïveté encore propre à l'enfance. Caché là avec d'autres enfants dont les parents ont été tués ou déportés dans le cadre du régime de Staline, il découvre un jour une salle de bal abandonnée où un vieil homme nommé Koba passe sa journée à jouer aux échecs. L'homme est imposant, charismatique, mais comme lui fait si bien remarquer Léon, puisqu'il ignore qui il est, il n'a pas peur de lui. Le dialogue s'engage, de joutes verbales en questions, de questions en réflexions philosophiques puis, petit à petit, le puzzle d'une histoire se construit : celle de Staline, comme racontée de l'intérieur. Le tout dans le décor vétuste et décrépi de cette ancienne salle de réception oubliée, qui ajoute une intensité unique à cet exposé d'un genre particulier.

 La Maison du Quai.

  Chute vertigineuse, immersion labyrinthique, dialogue initiatique : Koba offre au lecteur une plongée d'une rare force dans l'Histoire de la Russie stalinienne en confrontant deux regards que tout oppose, glissant même ça et là des notes d'humour grâce à la distance qui sépare les deux interlocuteurs. En filigrane de cette conversation, l'auteur (qui maîtrise son sujet) aborde les différentes étapes et dissèque les événements clefs du régime de Staline. Mais quel est le véritable enjeu de ces confessions et surtout, à qui appartiennent-elles : Koba ou Staline? Difficile d'en parler plus sans trop en dire, le mieux est de faire confiance aux excellentes critiques de l'ouvrage et de tenter vous-même la lecture...

Staline jeune... ou Koba?

En bref : Je n'avais jamais lu Robert Littell, voilà un baptême que je n'oublierai pas. Un roman puissant sur l'Histoire de l'URSS et sur la vie de Staline, racontées à travers un dialogue qui tient en haleine jusqu'au bout. L'auteur dresse un portrait ambigu du personnage, vu à travers l’œil d'un petit garçon atypique.

 Un grand merci aux éditions Baker Street pour cette découverte!

dimanche 29 septembre 2019

Gourmandise Littéraire : Petits gâteaux au citron de Gatsby.


  Il y a peu de temps, nous vous parlions du célèbre roman Gatsby le Magnifique, de F.S.Fitzgerald : l'histoire, dans les fantasmagoriques Années Folles, d'un mystérieux millionnaire qui met tout en œuvre pour retrouver son amour de jeunesse. Pour cela, le richissime et ambitieux Gatsby n'hésite pas à utiliser son nouveau voisin, Nick Carraway, accessoirement cousin de sa fiancée d'antan, Daisy. Celle-ci étant depuis peu mariée et mère de famille, les retrouvailles doivent se faire dans la plus grande discrétion : Gatsby demande à Nick d'inviter sa cousine pour le thé afin de l'y retrouver et, peut-être, de la reconquérir.

  Le goûter est organisé dans l'humble bungalow de Nick, où Gatsby fait livrer des centaines de bouquets de fleurs pour l'occasion, tandis que l'hôte, désireux d'aider au mieux son nouveau voisin et ami, a appelé sa domestique finlandaise pour rendre l'endroit le plus attrayant possible. Il a acheté une douzaine de petits gâteaux au citron en pâtisserie pour accompagner le thé qui réunira les anciens amants. Tandis qu'ils patientent tous les deux, Gatsby angoisse et tente de faire bonne figure devant les efforts de son camarade...


" Je le menai à l'office. Il jeta à ma Finlandaise un regard de reproche. Ensemble, nous examinâmes les douze gâteaux au citron que j'avais achetés chez le pâtissier.
— Ça fera l'affaire?
— Bien sûr, bien sûr, ils sont épatants. Et il ajouta d'une voix creuse : "...vieux frère". "

Gatsby le Magnifique, F.S.Fitzgerald, 1925.



  Si le livre de Fitzgerald ne s'attarde pas davantage sur les gâteaux en question : il en est fait mention quelques pages plus loin lorsque, une fois Daisy arrivée dans la tension générale, la peu délicate Finlandaise sert le thé et les gourmandises qui permettent momentanément d'alléger l'ambiance lourde de ce rendez-vous surprise. Toujours est-il que malgré cette fugace évocation, de nombreux blogueurs et sites versés dans les recettes de la littérature s'en sont emparés pour donner chacun leur version de la recette. A notre tour...

La scène du goûter chez Nick dans l'adaptation de 2013.


Ingrédients (pour douze petits gâteaux individuels):

- 1 citron jaune non traité
- 50 grammes de beurre
- 90 grammes de sucre
- 1 œuf
- 5 cl de lait
- 100 grammes de farine
- 1/2 sachet de levure chimique
- 125 grammes de sucre glace
- Écorces de citron confites pour décorer


A vos tablier!

- Faites fondre le beurre puis battez-le avec le sucre en poudre.
- Ajoutez l’œuf et le lait, puis la farine et la levure. Remuez jusqu'à obtenir un mélange homogène.
- Râpez le zeste du citron, ajoutez-le au mélange.
- Répartissez la préparation dans douze moules ou empreintes à mini-muffins.
- Enfournez dans un four préchauffé à 180°C pour dix à douze minutes environ.
- Une fois cuits, laissez les gâteaux refroidir.
- Préparez le glaçage : pressez le citron et mélangez le jus avec le sucre glace jusqu'à obtention d'une pâte épaisse et onctueuse.
- Appliquez le glaçage à la petite cuillère sur le dessus des gâteaux et décorez-les en disposant quelques morceaux de citrons confits sur le dessus.
- Laissez prendre au réfrigérateur deux heures minimum avant de servir.



  Dégustez ces gâteaux à la saveur acidulée avec un bon thé noir pendant une après-midi d'été orageuse... avec ou sans votre amour de jeunesse.

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