Hantée, tome 2: Un mal souterrain - Maureen Johnson

Shades of London, book 2 : The madness underneath, Harper Collins Children Books, 2013 - Editions Michel Lafon, 2013.

  Londres est hantée par les fantômes. Une brigade spéciale, les Ombres, constituée de membres ayant frôlé la mort, est chargée de les empêcher de nuire.

  Réchappée des griffes de l’Éventreur, Aurora en garde une terrible cicatrice. À peine remise de cet affrontement, la jeune fille est de nouveau appelée par les Ombres. Elle seule est capable – d’un simple toucher – d’exorciser les esprits maléfiques. Face à la nouvelle vague de meurtres qui agite la ville, l’adolescente est leur unique espoir.

  Aurora se lance alors à la poursuite de ceux qui sèment le chaos avec l’aide de son équipe et tout particulièrement de l’intrigant Stephen. Mais bientôt elle réalise qu’elle aussi est une cible. Car son don est une arme convoitée… Une arme pour laquelle on est prêt à tuer.

...Échapper aux ténèbres...

  Un an tout pile après avoir lu et chroniqué Hantée, tome 1: Les ombres de la ville, me voilà de retour pour donner mes impressions sur cette suite. Attention à ceux qui n'ont pas encore lu le premier opus: cet article pourrait contenir des spoilers!

  Tout d'abord, petite piqure de rappel: l'an dernier, je m'étais donc laissé séduire par la très jolie couverture du tome 1 (mais siiiii, souvenez vous, cette superbe rousse au minois fragile et ses faux airs de Nicole Kidman!) et le thème de Jack L'Eventreur qui servait de point de départ à la trame de l'histoire. Si LA déception du roman était que le mythe de l'Eventreur s'avérait largement sous-employé, j'avais tout de même accroché grâce à quelques points positifs qui m'avaient suffis à faire naitre une curiosité quant à la suite des événements, tout en espérant que le second tome serait de meilleure facture...

  Lorsque ce second livre débute, nous retrouvons Aurora "Rory" Deveaux installée à Bristol avec ses parents. Quelques mois se sont écoulés depuis sa rencontre avec l'esprit de l'Eventreur, expérience au cours de laquelle elle manqua de peu de perdre la vie. Depuis, en plus d'être en mesure de voir et communiquer avec les spectres, elle possède aussi le pouvoir de les détruire d'un simple toucher. Soumise à une psychothérapie qui l'insupporte au plus haut point, Rory est persuadée qu'elle est au mieux de sa forme malgré ces événements et souhaite plus que tout retourner à son pensionnat de Londres. Lorsque sa psychologue suggère qu'elle réintègre l'école, la jeune fille saute sur l'occasion et fait sa rentrée à Wexford, où elle retrouve ses amis Jazza et Jerome...ainsi que la Brigade des Ombres, cette société secrète menée par le troublant Stephen, et chargée de détruire les mauvais esprits qui hantent la ville!

  Peu à peu, alors qu'elle tente de reprendre le fil du quotidien, Rory réalise qu'elle ne se sent pas "si bien" qu'elle s'efforce de le croire, et qu'être passée à côté de la mort l'a en fait profondément marquée. Approchée par une psychologue du nom de Jane Quaint, Rory lui confie ses secrets, mise en confiance par cette femme originale et extravagante. Mais peu à peu, l'altruisme apparent de la thérapeute s'effrite, et ses motivations apparaissent progressivement bien plus obscures : Et si son intérêt envers Aurora n'était pas totalement désintéressé? Mais la jeune fille réalise bien trop tardivement la cible qu'elle est devenue, et qu'elle est en train de tomber droit dans la gueule du loup...

 Couvertures des éditions grand format et poche originales.

( à noter que la superbe photographie de la couverture de gauche est une œuvre de Chiara Fersini, un artiste dont j'adore le travail!)

  Qu'en dire, maintenant que j'ai refermé la dernière page?...*roulement de tambours*... une seule chose: J'EN VEUX ENCORE! Eh oui, car en dépit des défauts du premier opus, avoir persévéré pour ce second tome en valait largement la peine: Maureen Johnson a su rebondir et tenir ses promesses. Je me suis tout d'abord surpris à retrouver Rory avec un tel plaisir : alors qu'elle se reconstruit peu à peu d'avoir frôlé la mort, elle témoigne de ses nombreux doutes et questionnements face à la vie en général et à ses pouvoirs, mais toujours en cherchant à dissimiler ses inquiétudes derrière l'humour qu'on lui connait, même si elle est bien souvent drôle malgré elle! Et c'est ce que j'aime chez elle : pas totalement "super-héroïne", mais pas "anti-héroïne" à l'excès non plus, Rory est la bonne copine un peu gauche et maladroite, juste "banale" malgré les éléments surnaturels de son quotidien, celle qui tente de garder la tête froide et voir les choses avec le plus de normalité possible en même temps qu'elle croule sous les questions existentielles parfois tordantes. Ce tempérament et la façon dont il amenait une juste dose de drôleries face aux composantes surnaturelles de l'intrigue m'a fortement rappelé la façon dont l'humour était distillé dans Buffy contre les vampires (Eh, on ne se moque pas, j'étais fan quand j'avais 10 ans et c'est une référence culturelle, ok? =P), et la façon dont le caractère et les répliques de l'héroïne contribuaient à contre-balancer la noirceur des éléments horrifiques.

Rory devant Wexford, concept-art de Cassandra Jean pour A Madness underneath.

  Question intrigue, j'avais un peu peur que Maureen Johnson nous propose une redite du premier tome, une sorte de pâle copie qui suivrait le même chemin scénaristique (Du type: "meurtres étranges - enquête surnaturelle - confrontation fantastique - dénouement. Point final, rendez-vous au prochain numéro".). Bien que la scène d'introduction avec le meurtre inaugural fasse craindre cette direction, on s'en distancie assez rapidement pour prendre une orientation complètement différente. Plus psychologique et intimiste, Un mal souterrain entraine Rory dans une aventure complexe où, de par son don, elle devient la cible de sombres convoitises qui vises d'obscures desseins. Manipulations, sectes, mythologie antique... autant d'éléments qui ponctuent et rythment ce roman de multiples rebondissements inattendus et face auxquels le lecteur ne peut que s'empresser d'aller voir ce que révèlera la page suivante. Le personnage de Jane Quaint est à ce titre l'élément qui apporte tout son intérêt au roman: intrigante et fascinante, sorte de Cruella aux cheveux écarlates, parée du masque de l'altérité et de la vertu (je visualisais alors l'actrice Miranda Richardson, allez savoir pourquoi^^). Sans compter que l'auteure s'attarde même à développer, en filigrane, une intrigue sentimentale qu'il me semblait bien flairer depuis un moment (mais je n'en dirai pas plus ;-) ) et qui temporise l'histoire.

  La fin, presque tragique, nous laisse en suspens et l'on cherche en vain une page supplémentaire, pressé -presque angoissé- à l'idée de ce qui va suivre. Vous l'aurez donc compris: Un mal souterrain m'a convaincu, et je ne trouverai pas le repos tant que Maureen Johnson n'aura pas écrit l'ultime tome de la trilogie. En bref: vivement l'an prochain! =D

Anecdotique mais non moins sympathique:
pochette et playlist imaginées par une lectrice pour la trilogie Shades of London (trouvées ici).
...à discutailler dans un éventuel article spécial! =D

"La normalité, ça n'existe pas (...), c'est un concept défectueux. Cela implique qu'il n'existe qu'une façon d'être fondamentale, à laquelle les gens sont censés se conformer et ça, ce n'est pas possible. L'expérience humaine est bien trop riche."