Un événement étrange survient au Muséum d'histoire naturelle lors d'une
sombre nuit de novembre... L’œuf d'un ptérodactyle vient d'éclore dans
le silence de la salle de paléontologie. Aussitôt, la bête assoiffée de
sang va faire régner la terreur sur Paris ! La police est sur les dents
et l'inspecteur Léonce Caponi, un illustre incapable, est désigné pour
mener l'enquête. Adèle Blanc-sec, la Belle (qui n'est pas vraiment
belle) va, évidemment, croiser le chemin de la Bête (qui, pour finir,
n'est plus tout à fait une bête ! ).
Premier épisode des aventures de la célèbre et intrépide Adèle
Blanc-sec, cette bande dessinée nous plonge dans une enquête
passionnante au cour d'un Paris peuplé de monstres fantastiques et de
personnages étranges.
Jacques Tardi, qui a reçu le Grand Prix de la ville d'Angoulême pour
l'ensemble de son œuvre, crée une héroïne moderne dans un récit
palpitant à la frontière des genres. Le riche appareil pédagogique,
suivi d'une interview exclusive de Tardi, permettra d'explorer cette
ouvre pas à pas, de la diversité des genres au parcours du personnage,
en croisant étude de l'image et étude du récit.
***
Lorsque qu'Adèle Blanc-Sec apparait en 1976 dans la monde des bulles francophone, elle est la première héroïne de bande-dessinée qui ne soit ni une créature érotique, ni une simplette ; il faut dire que jusque là, les protagonistes féminines de BD les plus connues étaient Barbarella et Bécassine! Tardi s'affranchit de ces images passéistes pour mettre en scène, au cœur de la Belle Époque parisienne, une femme indépendante et mystérieuse dans des aventures qui flirtent avec le fantastique et où les monstres sont monnaie courante... Une lecture idéale pour le challenge Halloween 2019 consacré aux crus français!
L'histoire commence pendant l'Automne 1911 : au Muséum d'histoire naturelle du Jardin des plantes, un œuf de ptérodactyle éclot dans le silence nocturne et s'échappe par la verrière. Très vite, la créature revenue du fond des âges se manifeste : d'abord aperçue par des passants, elle s'attaque à quelques autres et en tue même certains! La mystérieuse affaire fait la une des journaux et toute la capitale panique. Depuis Lyon, un mystérieux scientifique féru de parapsychologie, d'abord enchanté par la naissance du dinosaure auquel il semble comme connecté, s'affole de la voir commettre de plus en plus de morts... A Paris, l’Élysée missionne son ministre (qui missionne le préfet qui missionne un commissaire qui missionne un inspecteur médiocre) de faire tuer cette créature pour en finir de cette folie qui s'empare de toute la ville. Dans cette atmosphère de peur générale, une mystérieuse jeune femme se faisant appeler Edith Rabatjoie débarque à Paname, accompagnée de deux hommes de main aux allures de gorilles et lourdement chargée d'une malle au contenu tenu secret. Interrogée dans le train par – étrange hasard – un employé du jardin des plantes , elle prétend venir chasser le ptérodactyle... Si l'on se doute très vite que cette jeune femme a des choses à cacher, on ignore à quel point ses motivations, en réalité très éloignées de la créature préhistorique qui terrorise les Parisiens, vont l'amener au bout du compte à s'y confronter...
Illustrée dans le pure style ligne claire, Les aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec est l'un des meilleurs exemples de bande-dessinée franco-belge comme on en fait plus. L'auteur et artiste Tardi, connu plus tard pour ses adaptations en BD de Nestor Burma et ses albums consacré à la Grande Guerre, avait fait ses armes chez Pilote et Métal Hurlant (deux revues faisant office d'institutions dans le domaine de la bande-dessinée). D'un style unique aux contours fins qui semblent encrés à la plume, il fait revivre le Paris de la Belle Époque : la gare de Lyon, la galerie de paléontologie du jardin des plantes, l’Élysée... tous se dressent comme sortis tout droit de vieilles cartes postales, faisant de Paris un personnage à part entière, décor intimement lié à l'histoire qui s'y déroule.
L'héroïne, au physique qui deviendra iconique, a dès ce premier opus un charisme prometteur : coiffure bouffante à la Gibson, visage anguleux, yeux perçants presque toujours mi-clos (le plus souvent illustrés d'un seul trait chacun), bouche pulpeuse et boudeuse, et tâches de rousseur. Coiffée d'un chapeau à plumes quasi-outrancier (le premier d'une longue liste de couvres-chef d'un style parfois douteux) et de son grand manteau vert fétiche (la couleur étant un clin d’œil à Bécassine), sa silhouette sera rapidement reconnaissable entre mille. Secrète et caractérielle, elle a quelque chose d'à la fois ordinaire et mystérieux. Son introduction dans l'histoire sous un faux nom et sous de faux prétextes la rendent difficile à cerner : probablement issue d'une petite bourgeoisie, elle semble néanmoins frayer avec des malfrats peu recommandables mais qui font grandir l'intérêt du lecteur à son égard : bien que femme dans un monde d'hommes, elle donne l'impression d'y être leur égale, et ce sans pour autant chercher à s'imposer.
Première apparition d'Adèle...euh, Edith, dans la train pour Paris...
D'ailleurs, ces hommes et autres personnages secondaires, qu'en est-il? Dessinées avec des "tronches" qui deviendront la marque de fabrique de Tardi, ils peuvent être caricaturaux aussi dans le fond que dans la forme. Soupirants éperdus ridicules (Adèle cumulera les prétendants auxquels
elle n'accordera, au mieux, que de l'amitié) comme Zborowsky, savants
aux pouvoirs psychiques incroyables comme Espérandieu, ou policiers ratés
comme Caponi, on croise dans cette galerie de mâles aux noms tarabiscotés et aux moustaches en guidon de vélo quelques figures politiques reconnaissables (dont le président Fallières et le ministre Clémenceau).
Le président A.Fallières : le vrai et le dessiné...
Du point de l'intrigue (dont le titre s'amuse de la ressemblance avec La Belle et la Bête), Tardi s'amuse à entremêler plusieurs trames, dont l'héroïne ne connait d'ailleurs pas tous les tenants et aboutissants : à Paris pour d'obscures raisons, ses propres motivations (dont on découvre peu à peu l'objectif) se recoupent presque par accident avec l'affaire du ptérodactyle ressuscité. Les événements se précipitent en fin d'album, l'auteur sortant de son chapeau des informations dont le lecteur n'étaient pas informé, mélangeant alors histoires de truands à la petite semaine avec des éléments de science-fiction dans un embrouillamini à la fois complexe et... enthousiasmant (oui, oui!). Quand l'ouvrage se termine sur la liste des questions en suspens et l'annonce du titre du prochain épisode, on comprend mieux le pourquoi d'un tel imbroglio romanesque : avec Adèle Blanc-Sec, Tardi signe en fait un hommage génialissime (et un pastiche jubilatoire) au roman-feuilleton d'antan.
Adèle au pays des malfrats...
Le rythme et l'enchaînement des péripéties rappellent la
construction parfois inégale des exemples les plus populaires du genre (rappelons que les auteurs commençaient souvent des textes en ignorant comment ils les termineraient, s'amusant parfois à multiplier les rebondissements les plus extrêmes et toujours avec emphase), dont Tardi s'amuse des codes avec un plaisir communicatif. Dès lors, les inspirations de l'auteur illustrateur sont évidentes : des dinosaures et des machines infernales, comme échappées d'un roman de Jules Verne, s'invitent entre les façades haussmanniennes et annoncent le steampunk avant l'heure dans un mélange des genres complètement avant-gardiste. On referme ce premier volume avec l'envie immédiate de découvrir le second.
La première scène de bain, futur leitmotiv de la série.
En bref : Hommage au genre du roman-feuilleton de la Belle Époque, ce premier tome des Aventures extraordinaires d'Adèle Blanc-Sec introduit une héroïne mystérieuse au caractère bien trempé qui séduit immédiatement le lecteur. Entre polar et science-fiction, Adèle et la Bête pose les bases d'une série devenue emblématique de la BD franco-belge, à lire au moins une fois dans sa vie de lecteur!
Oh oui toute une heroine....et tout un superbe dossier...merci de la ressortir...ouiii
RépondreSupprimerMerci pour ton commentaire, Rachel :) Tu as déjà lu les aventures d'Adèle, toi aussi? :)
SupprimerDans ma jeunesse....j'ai meme vu le film...qui ne m'a pas marque a vrai dire....;)
SupprimerJe n'ai jamais lu de BD d'Adèle Blanc-Sec. Ton biler me donnent envie de découvrir cet univers et cette héroïne. A lire une fois dans sa vie, c'est noté! ;)
RépondreSupprimerC'est un univers très particulier avec une héroïne particulièrement, mais personnellement, j'adore! Avec une préférence pour les 4 premiers tomes.
SupprimerMon père les avait tous je crois bien... Vous m'avez donné envie de les relire !!
RépondreSupprimerRavi d'avoir pu réveiller cette envie. C'est bon de remettre le nez dans les classiques !
SupprimerShame on me, je ne connais pas du tout Adèle !! Y remédier, je dois!
RépondreSupprimerAh oui il le faut : Adèle, c'est un must!
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