Livret : Julian Fellowes
Musiques et paroles originales : les frères Sherman
Musiques et paroles additionnelles : George Stiles & Anthony Drewe
D'après les romans de P.L. Travers et le film Disney de 1964
Mise en scène : Richard Eyre et Matthew Bourne
Avec : Zizi Strallen, Louis Gaunt, Charlie Anson, Amy Griffiths, Liz Robertson, Claire Machin, Petula Clark...
Au Prince Edward Theatre, Londres, jusqu'au 8 janvier 2023
Mary Poppins, le musical de Disney multiprimé, de retour au Prince Edward Theatre ! L'histoire ensorcelante de la plus célèbre des nounous anglaises magistralement adaptée pour la scène, avec des chorégraphies éblouissantes, des effets spéciaux incroyables, et des chansons inoubliables !
Ce spectacle est brillamment adapté des merveilleux romans de P.L.Travers et du film Disney par le célèbre scénariste et créateur de Downton Abbey, Julian Fellowes. Avec les chansons iconiques des frères Sherman initialement conçues pour le long-métrage de 1964 et les chansons additionnelles de George Stiles et Anthony Drewe.
***
Sur notre liste des 10 musicals à voir im-pé-ra-ti-ve-ment avant de mourir figurait en bonne place la transposition scénique de Mary Poppins, qu'on désirait ardemment découvrir depuis notre Noël Supercalifragilistexpialidocious de 2018. Produite par la société Disney d'après le film de 1964, cette comédie musicale a été créée en 2004 pour le West End avant d'être transposée sur les scènes du monde entier, dont Broadway mais aussi la Suède, l'Australie ou encore les Pays-Bas et la Hongrie ! En France, le spectacle reste malheureusement inédit à ce jour et ce malgré deux faux espoirs : une production avortée en 2012 puis une proposition soumise au vote du public en 2019, toutes les deux restées sans suite. Sur la scène du Prince Edward Theatre depuis 2019 jusqu'au 8 janvier 2023, ce musical de Mary Poppins a donc largement justifié qu'on s'envole jusqu'à Londres pour y assister enfin !
Dès notre arrivée dans la gigantesque et éblouissante salle aux lignes Art Déco du Prince Edward Theatre, nous sommes plongés dans l'atmosphère unique de Mary Poppins : sur la scène, des volutes de fumée s'échappent de centaines de cheminées au-dessus des fenêtres allumées d'une Londres plongée dans une douce nuit bleutée. Le rideau se lève alors sur les toits enchevêtrés de la capitale où, entre les membres de la famille Banks et les habitants de Cherry Tree Lane se tiennent bien droit des ramoneurs dont les hauts chapeaux fument abondamment. Ce bien étrange tableau, figé dans une pénombre magique, est introduit par Bert, dont l'arrivée lance le début des festivités...
Et quelles festivités ! Transposition de Disney par Disney, ce musical reprend bien évidemment l'esthétique et les célèbres chansons du film de 1964, aujourd'hui indissociable du personnage de Mary Poppins même s'il s'éloignait quelque peu des romans de P.L. Travers. Rappelons en effet que les livres originaux sont peu à peu tombés dans l'oubli au profit de l'iconographie et du scénario du célèbre long-métrage. Initialement constituée de huit opus (six romans et deux hors-séries – dont certains jamais traduits en Français et de nombreux titres aujourd'hui introuvables dans l’Hexagone), la saga Mary Poppins, très old school dans son écriture et sa construction, était proche de l'univers de James Barrie et de Lewis Carroll et mettait en scène une figure quasi-totémique beaucoup plus rigide que son incarnation à l'écran. Le musical a l'ambition de revenir aux sources tout en conservant ce qui a fait le succès du film.
Julian Fellowes, que l'on connait pour avoir créé le chef-d’œuvre télévisuel qu'est Downton Abbey, s'est ainsi vu confier la tâche d'écrire le livret du spectacle. Choisi en raison de sa connaissance du système de classes de l'Angleterre édouardienne, il remplit donc également ici le difficile objectif de rendre hommage aussi bien au film de 1964 qu'à l’œuvre de P.L. Travers, en refondant de nombreux éléments issus de l'un et de l'autre pour donner naissance à une histoire augmentée de nouveaux rebondissements. Le résultat surprendra peut-être les amoureux du long-métrage mais en ce qui nous concerne, nous avons été on ne peut plus charmés.
Parmi les modifications opérées sur le scénario initial, Julian Fellowes supprime le personnage d'Ellen mais réinstaure celui de Robertson, le valet des Banks. La Mrs Banks suffragette de 1964 devient ici une ancienne actrice ; sans aller jusqu'à dire qu'elle a plus d'épaisseur sur scène qu'à l'écran, son traitement dans le musical est intéressant. Le livret ne comprend pas l'épisode du goûter dans les airs chez l'oncle Albert mais, à la place, reprend de nombreux chapitres des romans : les enfants Banks se retrouvant aux commandes de la cuisine pendant l'absence de Mrs Brill (Mary Poppins in the kitchen), la rencontre, au parc, d'une statue ayant pris vie (Les bonnes idées de Mary Poppins), ou encore la boutique de pains d'épice de Mrs Corry (Mary Poppins).
Ces ajustements profitent particulièrement à la construction en deux actes du spectacle : le premier acte s'achève sur le départ de Mary Poppins après une dispute avec les enfants Banks, qui n'ont pas retenu les leçons qu'elle tente de leur transmettre. Son retour dans l'Acte 2 se fait par cerf-volant (comme dans Le retour de Mary Poppins), pour affronter sa remplaçante au sein de la maison Banks : Mrs Andrews, l'ancienne terrifiante nanny de Mr Banks (également dans Le retour de Mary Poppins). Mais que les puristes se rassurent cependant : la scène sur les toits de Londres, la danse des ramoneurs, la dame aux oiseaux, la réconciliation des enfants Banks avec leur père, le sirop qui aide la médecine à couler ou encore le Supercalifragilisticexpialidocious font bien partie de l'aventure !
La terrifiante Mrs Andrews...
On retrouve également les célèbres chansons des frères Sherman, ainsi que des chansons et musiques additionnelles qui sont loin de démériter. Parmi les plus mémorables de ces nouvelles compositions de George Stiles et Anthony Drewe, on retiendra Pratically Perfect, Playing the game ou encore Brimstone & Treacle, qui rythme le duel entre Mary Poppins et l'horrible Mrs Andrews. Le tout joué en direct par un orchestre donne à l'ensemble une dimension nouvelle et l'impression de redécouvrir même les mélodies les plus connues.
Visuellement, Mary Poppins est également un véritable enchantement, de ceux qu'on apprécie dans les musicals à grand spectacle. Opulence et technicité des décors, astuces visuelles et effets spéciaux incroyables se marient à merveille à la scénographie de Richard Eyre. A la façon d'une maison de poupée géante comme l'auberge du Bal des vampires ou au manoir de La famille Addams, le 17 Cherry Tree Lane s'avance sur scène et s'ouvre pour dévoiler un intérieur incroyable avec bibelots, cheminée et escalier. On découvre plus tard que la maison tourne sur elle-même pour dévoiler à l'arrière une adorable cuisine ! Sans oublier la nursery qui donne directement accès aux toits ou encore au décor du parc avec ses arbres mouvants et ses statues animées.
Nous parlions des effets spéciaux : sans images de synthèse, nous avons pu voir Mary sortir de son sac en tapisserie un porte-manteau complet et remonter la pente d'escalier. Nous avons vu Bert exécuter un incroyable numéro de claquettes sur les murs et au plafond, dans un tour complet de la scène (!), nous avons vu une version géante du parapluie de Mary s'ouvrir sur scène et tourner sur lui-même et un pantin gigantesque et effrayant apparaitre au-dessus des toits de Londres (brrh!). Enfin, nous avons vu Mary s'envoler au-dessus du public ! Comme dirait Mary herself : "Tout est possible, même l'impossible".
Apparition creepy pendant Playing the game !
Le casting, de grande qualité, est à notre sens un sans faute : Zizi Strallen (dont la sœur aînée a également joué le rôle pour le West End il y a une dizaine d'années) est une Mary Poppins pleine de charme et de malice. Elle ne cherche à aucun moment à copier Julie Andrews ou Emily Blunt, même si son jeu est sans doute plus proche de cette dernière. Son minois lutinesque donne du pétillant au personnage, qu'elle incarne à merveille. Louis Gaunt livre une prestation particulièrement physique en Bert et Charlie Anson se révèle être, une fois maquillé en Mr Banks, un véritable sosie de David Tomlinson (qui interprétait le rôle dans le long-métrage de 1964) !
Zizi Strallen : pétillante et malicieuse Mary Poppins.
La Mrs Brill du musical, interprétée par Claire Machin, nous évoque furieusement la Mrs Patmore de Downton Abbey (mais avec Julian Fellowes aux commandes, est-ce une coïncidence ?) et Liz Robertson campe une effrayante Mrs Andrews, comme un personnage sorti de l'imaginaire de Tim Burton. Dans le rôle de la dame aux oiseaux, nous n'avons au départ pas reconnu la très célèbre Petula Clark, icône des sixties qui joue avec émotion son personnage et qui a récolté les applaudissements du public pour ce très touchant come back. Enfin, nous avons été particulièrement impressionnés par la prestation des enfants Banks, joués ce soir-là par Cian Eagle-Service et Alex Munden (plusieurs jeunes acteurs et actrices se relaient pour les rôles de Michael et Jane), pleine d'humour et d'énergie.
Petula Clark en dame aux oiseaux.
En bref : Une mise en scène magique et une adaptation qui fait la part belle autant au film de 1964 qu'aux romans de P.L.Travers. Ce musical de Mary Poppins, plein de surprises scénaristiques et visuelles, écrit par le talentueux Julian Fellowes et merveilleusement interprété, est un total enchantement. Un coup de cœur dont on espère vivement une adaptation sur les planches françaises un jour !
Tu as vu Petula Clark en chair et en os!!! Je t'envie!
RépondreSupprimerSurtout que je ne l'ai pas reconnue ^^' hum...
SupprimerTu me fais rêver, Pedro !!! Vive Mary Poppins !! J'espère que tu as passé un bel été et te souhaite un joli mois de septembre...
RépondreSupprimer