mardi 24 novembre 2015

Cat's Eye #4 - Tsukasa Hojo

Shueisha inc., 1981 - Editions Tonkam, collection "Tsuki poche", 1998 - Editions Panini manga, 2008, 2009.

  Les liens qui unissent Cat's et Toshio deviennent de plus en plus ambigus. Au-delà de leur éternel jeu du chat et de la souris, chacun aide l'autre à se sortir de situations périlleuses. Si Hitomi a des raisons évidentes, Toshio reste quant à lui songeur devant les émotions troublantes qui l'habitent. Mais avec l'aide de Rui, il devrait parvenir à s'affirmer et verbaliser enfin ses sentiments envers une Hitomi, dont on apprend beaucoup sur le patrimoine familial conséquent. Sens de lecture japonais.

Contient les épisodes 45 à 58 : 45) La lettre d'amour de cat's - 46) Un témoin de trop - 47) La chasse au scoop - 48) Une fille agaçante - 49) Dans la gueule du loup - 50) Portée par le vent - 51) La dernière balle - 52) Amoureux d'une journée - 53) Un chagrin d'amour - 54) La grande évasion - 55) Un garçon de course exceptionnel - 56) Le dernier adieu - 57) L'inoubliable rendez-vous - 58) La reine des joueurs.

*** 

  Comme je suis content d'avoir déniché cette ancienne édition Tonkam de ce célèbre manga! Si le plaisir de ce premier format est de pouvoir suivre les épisodes dans leur classement japonais d'origine, on peut toujours retrouver les chapitres 45 à 58 répartis sur les volumes 5 et 6 de l'édition Panini Books actuelle, dont je continue malgré tout de déplorer le découpage des épisodes...


 Les épisodes 42 à 58, à retrouver dans les tomes 5 et 6 actuels.

  Avec cette "quatrième saison", Tsubasa Hojo trouve une nouvelle dynamique à ces intrigues : après deux premiers tomes très axés sur l'action et un troisième plus centré sur les relations sentimentales, le mangaka instaure une harmonie entre ces différents genres. Sur ces treize épisode s'installe un bel équilibre de ces atmosphères antagonistes, ce qui rend les scénarii intéressants à plus d'un titre. La psychologie des personnages s'affine encore un peu plus et la complexité des enquêtes et des aventures atteint une qualité croissante.

  Parmi les rebondissements particulièrement intéressants, je retiens le premier tiers du volume, dans lequel une camarade de classe de Aï (Alex), accessoirement rédactrice du journal du lycée, se lance à la recherche de Cat's. Persuadée qu'elle peut découvrir son identité et prendre un cliché de la cambrioleuse, l'agaçante petite lycéenne mettra notre trio en mauvaise posture... Et pour cause, sa perspicacité sera remarquée par Mlle Asatani en personne, avec qui elle s'associera contre nos voleuses de charme.


  Mais le suspense touchera son paroxysme dans le dernier épisode aux accents particulièrement Jamesbondien (une atmosphère qui se ressent par ailleurs de plus en plus au fil des épisodes), dans lequel Hitomi s'infiltre dans un luxueux casino clandestin et fait exploser la banque. La mise en images, ou "mise en scène", devrais-je dire, est bluffante : digne d'un film, l'enchainement des vignettes, mouvements et prises de vue a une qualité quasi-cinématographique ( comme cet œil plein d'appréhension qui se superpose à la roulette à l'issue incertaine) et qui concoure vraiment à la tension des scènes. Du grand art fait BD.


En bref : Encore un volume explosif, qui a cette fois le mérite de trouver un équilibre entre action et émotions. T.Hojo gagne en finesse dans la psychologie de ses personnages, comme dans la complexité des aventures et des ressorts des "casses" de notre trio. La mise en images à la qualité cinématographique doublée d'un suspense palpable évoquera même à nos cinéphiles les meilleurs James Bond!

Et pour aller plus loin:

dimanche 22 novembre 2015

Les incorrigibles enfants de la famille Ashton #2 : "En route pour Londres!" - Maryrose Wood

The incorrigible children of Ashton Place, book 2 : TheHidden gallery, Harper Collins Publishers, 2010 -Editions ADA Inc. (trad. de N.Grenier) - Editions Flammarion, 2015.



  Après le désastre du bal de Noël, Penelope et la famille Ashton s'installent à Londres. La jeune gouvernante est ravie, c'est l'occasion d'approfondir l'éducation de ses chers élèves ! Cette grande ville regorge de mystères : des chapeaux en peau d'ours, des tableaux effrayants, nos héros ne seront pas déçus de leurs découvertes. Sans le savoir, Penelope et les Incorrigibles partent à la rencontre des secrets qui entourent leur passé... 




***

  Après l'excellent premier tome proposé par les éditions Flammarion, difficile de résister au deuxième opus des Incorrigibles enfants de la famille Ashton. Cette fois, voilà la famille de Lord Ashton en séjour en plein Londres! Londres, bouillonnant d'activité et de monde, Londres culturel, Londres criminel, Londres industriel... Penelope ne sait plus où donner de la tête, même si l'expérience est unique pour les trois enfants sauvages, pupilles des Ashton. Mais alors qu'une diseuse de bonne aventure semble deviner l'avenir des enfants, Penelope elle-même n'est pas en reste côté mystère. Miss Mortimer, sa bienfaitrice de l'école Swanburne pour jeunes filles pauvres mais intelligentes, lui envoie bientôt un étrange guide de Londres. Ce guide au contenu plus que douteux, semble avoir été écrit tout juste pour orienter notre intrépide gouvernante jusqu'à la 17ème galerie du British Museum. Un endroit qui ne serait pas sans lien avec l'origine toujours aussi mystérieuse des enfants... Entre courses-poursuites à dos de vélocipèdes, glissades périlleuses sur des sols trop cirés et mésaventures au zoo de Londres, notre héroïne n'a pas de quoi chômer...


"Un esprit ouvert laisse sortir des idées et en laisse entrer de nouvelles"
(proverbe d'Agatha Swanburne)

  Que de péripéties, que d’événements rocambolesques, que de fous-rires! Après le premier tome de la série, Maryrose Wood poursuit à merveille la saga de la famille Ashton et de leur irrésistible gouvernante, éternelle optimiste débrouillarde et adorablement innocente. En propulsant cette candide mais courageuse héroïne dans le Londres bouillonnant de la Reine Victoria, l'auteure parvient à faire rebondir l'univers créé pour le premier tome. En effet, on vous laisse imaginer les tordants quiproquos et abracadabrantes catastrophes que peuvent générer un trio d'enfants sauvages en pleine ville!
 Couvertures de l'édition poche originale et de l'édition allemande.

"Lorsque les choses s'améliorent, il y a aucune raison de regarder ailleurs."
(proverbe d'Agatha Swanburne).

  Et pourtant, au-delà de l'histoire toujours aussi charmante de malice et de désuétude, ce qui est le plus abouti dans ce roman est sans aucun doute... son écriture! La narration prend une distance absolument tordante avec l'histoire, se permettant ainsi de nombreuses digressions et autres apartés faussement érudits qui entrecoupent régulièrement le récit de passages hilarants. Passages qui, pourtant, donnent toujours l'impression d'être racontés par un narrateur qui se prendrait au contraire très au sérieux, façon voix off charismatique d'une de ces séries télévisées à succès. Il en va ainsi de cette dense explication scientifique sur le principe de relativité des gouvernantes révélé par Newton (juste avant une glissade de Penelope sur un parquet trop bien lustré), ou encore des comparaisons très intelligentes de la bonne fortune à une balance (qui oscillera vers le positif d'un côté et, forcément, vers du négatif de l'autre) et non à une roue comme de coutume dans la symbolique. Bref, un ton inimitable qui donne tout son sel à cette série et la rend aussi attrayante pour un public jeune comme un lectorat plus adulte.

 Les charmantes illustrations de J.Klassen


En bref : Un second tome qui confirme les excellentes qualités de cette série : charme naïf, humour désuet, atmosphère victorienne, et surtout, narration à l'accent drôlatique à souhait. Un petit bijou de littérature jeunesse.

Un grand merci aux éditions Flammarion pour cette découverte!

Pour aller plus loin:

samedi 21 novembre 2015

Le club des amateurs de meurtres (Aurora Teagarden #1) - Charlaine Harris

Real murders (Aurora Teagarden #1), Walker & Company, 1990 - Editions J'ai Lu, collection Darklight (trad. de A.Muller), 2013.

  Chaque petite ville a ses mystères et Lawrenceton, en Georgie, n'échappe pas à la règle. Le club des Amateurs de meurtres se réunit une fois par mois pour étudier de célèbres cold cases. Pour Aurora Teagarden, jeune bibliothécaire, c'est un passe-temps aussi agréable qu'inoffensif. Jusqu'au jour où elle découvre le corps sans vie d'une des membres du cercle. Étrangement, la scène du crime ressemble à une ancienne affaire. Des fidèles du club sont assassinés et ces meurtres ont des allures de copycat. Tous les membres, y compris Aurora, sont des coupables plausibles, et des victimes potentielles. Qui se cache derrière ce jeu macabre ?

***

  Après avoir découvert la série La communauté du sud (à l'origine de l'adaptation True Blood) il y a quelques années, je me suis cette fois penché sur une autre saga de la prolifique auteure américaine Charlaine Harris : les Aurora Teagarden. Evoquée avec une amie de fac grande fan de cette écrivaine, cette série ne m'avait pour autant jamais intéressé outre-mesure, jusqu'à sa récente adaptation en téléfilms par la Hallmark Channel. Cette chaine de télévision américaine est particulièrement connue pour ses nombreux téléfilms familiaux, dont la qualité évoque souvent des films de cinéma notamment de par les sujets et synopsis similaires ou des thématiques à la mode. Ces téléfilms sont souvent doublés et diffusés en France sur M6 et se distinguent des autres productions par leur mise en scène très cinématographique, que ce soit dans le genre fantastique, dramatique ou comique.

 L'adaptation du livre pour la télévision.

  Or donc, après avoir vu quelques extraits de l'adaptation très léchée d'Aurora Teagarden et son atmosphère de mystère cosy dans une petite bourgade américaine, je me suis de suite intéressé à la version papier. Le téléfilm évoquait une autre franchise de la Hallmark Channel, une série de long-métrages intitulée Romans Noirs ( Mystery Woman), mettant en scène une jeune femme tenant une librairie spécialisée dans les ouvrages policiers et enquêtant sur divers mystères et meurtres survenant dans sa petite ville. Grand fan de ces téléfilms, j'ai toujours adoré l'idée que des lecteurs acharnés et passionnés de romans policiers comme nous autres soient mêlés à de vrais meurtres et mènent l'enquête. Aussi, ce concept déjà développé en 1990 (date de sortie originale du roman outre Atlantique) par Charlaine Harris, met en scène une héroïne tout ce qu'il y a de plus proche de la citoyenne lambda qui se passionne pour les livres et les mystères, à l'image même du lecteur. 


  En plus de cette atmosphère "bibliothècomystérieuse", Charlaine Harris a imaginé ce "club des amateurs de meurtres", qui réunit à chaque tome les différents protagonistes (et donc suspects) autour de soirées à débattre de célèbre cold cases. Impossible, alors, de ne pas songer au Club du Mardi de Miss Marple imaginé par Agatha Christie, revisité ici dans une version moderne et palpitante. Car outre l'atmosphère cosy que j'évoquais plus haut, Charlaine Harris parvient à glisser un vrai suspense dans son intrigue, sorte de whodunit contemporain où détails sanglants côtoient notes d'humour tantôt noir, tantôt enlevé. Féminin sans jamais être trop chicklit, ce roman vif et sympathique satisfera tous les amateurs de thrillers!


En bref : Un thriller aux allures de mystère cosy contemporain mêlant savamment meurtre et ambiance livresque. Tantôt noir, tantôt léger, ce roman mêle plusieurs atmosphères et dose justement humour et suspense. Une série que je poursuivrai avec plaisir!  

Et pour aller plus loin...

vendredi 20 novembre 2015

Gourmandise littéraire : le dîner végétarien de tante Eudoxie aux "Charmettes" .


  Dans la fantastique Trilogie des Charmettes d'Eric Boisset, Tante Eudoxie, sorcière spécialisée en magie fondamentale et accessoirement botaniste dilettante, prépare également d'appétissants plats végétariens avec les légumes et plantes qu'elle cultive dans sa serre. Dans l'ultime opus de la saga, la veille de la création du Mana (une force magique nouvelle et extrêmement puissante), elle sert à ses apprenties magicienne un trio de tartes et tourtes vegan des plus alléchantes...

  "La cuisine de la Tante, qui se composait de quiches aux herbes sauvages et de salades mêlées de graines germées et de fleurs comestibles, les avait déconcertées de prime abord. Mais, dès les premières bouchées, elles avaient été conquises par tant de délicates saveurs. Victoire s'était régalée d'une tarte aux pointes d'asperges et à l'ail des ours, Mina d'un friand à la salsepareille et au panais, et Iris d'une sorte de vol-au-vent farci d'une purée de potimarron et de châtaignes."

L'antichambre de Mana (la trilogie des Charmettes #3), Eric Boisset, Magnard Jeunesse, 2004.

Après une telle description, difficile pour moi de ne pas tenter l'expérience pour la rubrique des gourmandises littéraires!

Tarte pointes d'asperges et Ail d'Ours:


  S'il est inutile de s'attarder sur les asperges, peut-être quelques informations sur l'Ail d'Ours seront-elles les bienvenues? Cet Allium Ursinum est une variante sauvage de l'ail que l'on connait, longtemps associée à la magie blanche dans les anciennes croyances. On trouve cette plante dès Mars et Avril sous forme de large tapis de feuilles odorantes dans les sous-bois humides. La période de récolte s'arrête avec l'apparition des premières fleurs.

Ingrédients:
 (pour une tarte d'environ 28 cm de diamètre)

- une pâte brisée maison ou du commerce,
- 150g d'Ail des Ours haché,
- 50g de fromage de chèvre frais,
- une dizaine de pointes d'asperges vertes,
- un oeuf,
- 15 cl de lait de soja,
- fromage râpé,
-sel et poivre.

A vos tabliers!

-Garnir un plat à tarte d'un disque de pâte brisée puis hacher grossièrement à la fourchette le formage frais et le disposer sur le fond de tarte
-Dans un récipient, battre l'oeuf et le lait puis y ajouter l'Ail des Ours haché, le sel et le poivre, bien mélanger. Verser sur le fond de tarte couvert de fromage de chèvre. Y piquer ensuite les pointes d'asperge et couvrir de fromage râpé.
-Enfourner le tout dans un four préchauffé à 180° pour 25 à 30 minutes.

Friands au panais et à la salsepareille:


  Le panais est de ces légumes anciens que l'on redécouvre depuis quelques années et qui connaissent un nouvel effet de mode. Particulièrement associé à la cuisine moyenâgeuse, ce légume sucré est resté très présent dans les traditions culinaires britanniques. 
  La salsepareille, en revanche, est moins connues du grand public. Également appelée liseron épineux ou asperge du pauvre, cette plante sauvage d'Europe méridionale est célèbre pour ses baies rouges toxiques qui servent dans les couronnes de Noël. Aussi, seule les tiges sont comestibles et c'est pourquoi il vaut mieux s'en remettre à un connaisseur pour les cuisiner comme il se doit...

Ingrédients:
(pour 4 friands)

-pâte feuilletée maison ou du commerce,
-500g de panais,
-une douzaine de tiges de salsepareilles (ou, à défaut, d'asperges vertes) blanchies,
-mélange de cinq baies moulues,
-graines de coriandre,
-cumin en poudre,
-sel.

A vos tabliers!

-Éplucher les panais, les découper en morceaux et les faire cuire 20 minutes dans l'eau frémissantes. Les égoutter avant de les passer au moulin à légumes ou au presse-purée. Épicer la purée de panais de quelques graines de coriandre, de quelques pincées de cumin et de mélange de cinq baies moulues. Saler le tout et réserver.
-Découper quatre rectangles de pâte feuilletée d'environ 15x8 cm. Superposer sur chaque rectangle 3 cadres de pâte de même dimension, évidés.
-Au creux de ces rectangles de pâte, répartir pour chaque friand la purée de panais. Y déposer ensuite les tiges de salsepareille ou d'asperge.
-Passer le reste de pâte feuilletée au rouleau à losanges pour en coiffer les friands avant de les enfourner pour 20 à 25 minutes à 170°.
-A déguster à la sortie de four, chaud ou tiède.

Vol-au-vent de potiron et de châtaignes:


  Est-il nécessaire de les présenter? Le potiron et son cousin le potimarron, associés dans les légendes aux mythes d'halloween, sont LES légumes de l'Automne. Si on les consomme souvent en soupe, on oublie les larges possibilités de cuisine, originales et raffinées, que proposent ces cucurbitacées. La châtaigne s'y associe particulièrement bien et c'est pourquoi on les trouve souvent mélangées dans de nombreuses recettes.

Ingrédients:
(pour quatre personnes)

-4 croûtes pour vol-au-vent ou bouchées à la reine.
-un petit potiron ou un potimarron,
-lait de soja,
-200g de châtaignes en conserve ou sous-vide,
-muscade,
-sel et poivre.

A vos tabliers!

-Détailler le potiron épluché en morceaux grossiers ( s'il s'agit d'un potimarron, inutile de l'éplucher, la peau est comestible ) et les plonger dans une casserole d'eau frémissante. Une fois cuits, les retirer du feu et les mettre à égoutter avant de les passer au moulin à légumes ou au presse purée avec un trait de lait de soja. Relever le tout de muscade, de sel et de poivre.
- Concasser grossièrement les châtaignes et les mélanger à la purée de potimarron. Réserver au chaud.
-Passer les croûtes feuilletées au four pour les réchauffer, y verser la purée potimarron/châtaignes et servir sans attendre.

  Il ne vous restent plus qu'à servir le tout accompagné d'une salade de jeunes pousses mélangées, un soir d'Automne propice à la magie et à la sorcellerie...

vendredi 13 novembre 2015

L'ombre au tableau - Susan Hill

The man in the picture, Profile books, 2007 - Editions l'Archipel, 2015.


  Dans l’appartement du vieux professeur d’Oliver, étudiant à Cambridge, on peut admirer un tableau représentant un groupe de Vénitiens masqués faisant la fête pendant le carnaval.
Au cours d’une froide nuit d’hiver, le vieux professeur décide de révéler à son étudiant l’étrange secret de cette peinture envoûtante, qui possède le mystérieux pouvoir de capturer la vie…
  Le contempler trop longtemps, c’est jouer avec le feu. Défier les démons invisibles qui s’y cachent, c’est risquer de devenir la prochaine victime de la toile…
Oliver parviendra-t-il à ne pas succomber aux charmes macabres du tableau ?


***

  En même temps que la main de la nuit, les éditions de l'Archipel m'ont également proposé de découvrir le dernier roman de Susan Hill paru en France : L'ombre au tableau. Il n'en fallait pas moins qu'une énigme artistique et l'un des plus grands noms de la littérature britannique pour me laisser tenter... le verdict?


  Eh bien verdict on ne peut plus positif! Je n'ajouterai rien au résumé de la quatrième de couverture, afin de ne pas gâcher le suspens de cette captivante et étrange histoire de tableau maudit et vous laisser le plaisir de la surprise. Car c'est à vous de la découvrir dans son intégralité, de vous laisser happer par la prose élégante de l'auteure et son talent à nous capturer dans des atmosphères au pouvoir d'évocation surprenant. L' "histoire dans l'histoire", rapportée par ce vieux professeur à son ancien étudiant, est un schéma narratif classique à ces vieilles nouvelles gothiques façon Poe ou H.James. Un jeune protagoniste est invité par un vieil érudit ou un ami de longue date, qui est amené à lui conter une histoire vécue, souvent aux frontières de la réalité, avant que le jeune personnage en question ne s'y trouve lui aussi confronté... bousculant ses pré-requis comme ceux du lecteur, lui aussi pris dans le flot d'événements étranges et dérangeants.

Le tableau de l'histoire?...

  Ceci dit, tout comme dans la main de la nuit, même si certains ressorts ou constructions narratifs évoquent les oeuvres à l'ancienne, l'intrigue se place dans une époque tout ce qu'il y a de plus contemporain, et sans le moindre effet anachronique. Car Susan Hill fait réellement vivre son histoire, parvenant une fois encore à restituer la plus fine, la plus infime des sensations ou des émotions du narrateur pour les transmettre au lecteur. Frisson, malaise, doute, vertige... la plume de Susan Hill nous contamine.

 L'atmosphère envoutante de Cambridge...

  Des ruelles inquiétantes de l'université de Cambridge au lagon de Venise, remontant la piste du tableau ou fuyant sa force malfaisante, évoluant entre les ombres masquées d'ennemis réels ou cauchemardés, on se laisse hypnotiser avec délice et frissons jusqu'à l'implacable chute. Jamais dans le pastiche trop facile parce qu'elle n'abuse ni des clichés, ni des clins d’œil, mais parce qu'elle s'inscrit réellement dans la continuité d'un genre, Susan Hill est sans conteste LA reine du gothique contemporain.

 ...et celle aussi envoutante de Venise...

En bref : Un roman gothique moderne, simple, sobre et élégant qui fonctionne à merveille. L'histoire de ce tableau maudit entre décors britanniques et italiens est qui plus est animée d'un souffle qui fait vivre le lecteur au rythme des sensations et sentiments du protagoniste, un talent que Susan Hill maîtrise avec brio.


Un grand merci à LPconseils et à l'Archipel pour cette découverte!

Et pour aller plus loin:

samedi 7 novembre 2015

Blackwood, le pensionnat de nulle-part - Lois Duncan

Down a dark hall, Little, Brown & company, 1975, 2011 - Editions Hachette, collection Blackmoon (trad. de L.Rigoureau), 2015.

  A l’instant où elle pose les yeux sur l’imposant manoir gothique de Blackwood, le pensionnat où elle va passer l’année, un sentiment d’angoisse s’empare de Kit. Comme si un vent glacé traversait son cœur à chaque pas effectué vers la porte. Comme s’il y avait quelque chose de maléfique à l’intérieur des murs du pensionnat, perdu au milieu de nulle part. Lorsque d’étranges phénomènes viennent perturber son quotidien et que les trois autres pensionnaires se mettent à développer des talents artistiques incroyables, le malaise de Kit ne fait que s’intensifier. Hantée par une mélodie de piano, elle devient somnambule et aperçoit d’étranges silhouettes dans les couloirs sombres. Bien décidée à mener l’enquête, Kit découvrira que certains secrets feraient mieux de rester enfouis… car ils dépassent tout ce que la raison peut appréhender.

***

  Ah, comme j'aime que les échanges entre blog nous poussent à découvrir des ouvrages qui ne nous intéressaient pas au départ! Alors que ce Blackwood n'éveillait chez moi aucune curiosité, la très bonne critique de Mya's books m'a récemment fait revoir mes impressions et incité à tenter la lecture. Découverte idéale pour finir la saison des ouvrages d'Halloween!

 Quelques couvertures de la première édition...

  Car ce fut une agréable surprise que ce roman, débordant de ces éléments que j'affectionne dans les intrigues fantastiques : manoir gothique, apparitions fantomatiques, et pour couronner le tout, atmosphère de pensionnat à la private boarding school comme je les aime! Et si Blackwood n'est pas sans un petit côté classique (parfois même gentiment "daté", pourrait-on dire), ce n'est pas surprenant puisque le roman date de... 1974! Mais comme nombre de livres déjà parus depuis quelques décennies, Down a dark hall (titre original) présente de nombreuses qualités et méritait bien une réédition.

 ""Au loin, sur une éminence, se dressait une demeure que même ses rêves les plus étranges n'auraient pu lui dessiner..."

  Réactualisé en 2011 par son auteure, Down a Dark hall s'est juste vu complété de détails contemporains pour moderniser l'histoire : téléphones portables, ordinateurs, internets... mais outre ces quelques détails ( qui disparaissent bien vites pour bloquer nos personnage dans un huit-clos complètement coupé du monde, on est bien dans un roman d'horreur, on vous rassure), le reste du texte a été conservé. Cela explique peut-être l'aspect parfois désuet de certains dialogues ou l'usage de codes et éléments classiques ( portes qui claques, grincements effrayants, musiques fantomatiques en nocturne, etc...). Mais peu importe, l'ensemble fonctionne à merveille et sert un dénouement très très original : je vous mets en effet au défi, malgré ces codes très conventionnels, de deviner ce qui se trame réellement à Blackwood!

 "L'escalier dessinait une volute. En haut, un gigantesque miroir mural semblait doubler la surface du palier. C'est à cet endroit que donnait le vitrail aperçu sur la façade, et les rayons du soleil couchant baignaient les lieux des teintes de l'arc-en-ciel."

  Les personnages sont quant à eux plutôt bien dessinés et l'héroïne est particulièrement crédible en jeune adolescente, à la fois perplexe et perspicace face au mystère dans lequel elle se trouve immergée. J'ai particulièrement apprécié la vigueur et le ton caustique avec lesquels elle se laisse emporter dans le dernier tiers lorsque, ayant mis à jour les secrets du manoir, elle met en oeuvre tout son sang froid pour en sortir...

 "La pièce était bien plus raffinée que tout ce qu'elle avait pu imaginer. Le plus gros meuble était le lit au bois sombre sculpté d'un haut baldaquin d'un velours rouge luxueux. Un chevet supportait une lampe ornementée à abat-jour froncé. De lourdes tentures dorées flanquaient  la croisée et, le long du mur opposé, se dressait une commode en noyer au-dessus de laquelle était suspendu un miroir ovale encadré d'argent. Un tapis persan dissimulait le plancher."

  Un roman jeunesse (plutôt que young adult) que j'aurais probablement adoré à 14 ans! Il est donc à découvrir et faire découvrir avant sa transposition prochaine au cinéma. Stephenie Meyer (auteure de la saga Twilight), qui était une grande fan de ce roman dans son adolescence, a en effet racheté les droits du livre et prépare son adaptation en tant que productrice...

 Réédition américaine de 2011 et édition tchèque.

En bref : Un roman d'horreur jeunesse très sympathique qui mêle habilement éléments classiques et idées originales. Une histoire de pensionnat hanté qui fonctionne très bien malgré ses 40 ans passés et qui méritait bien d'être rééditée. A découvrir!

 

jeudi 5 novembre 2015

Alice au pays de Montreuil : Résultats du concours


Oyez, Oyez,
(oui, c'est encore moi!)

  Après le concours lancé la semaine passée sur blog pour remporter deux fois deux entrées gratuites pour le prochain salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil, votre humble serviteur lapin est en mesure d'annoncer les noms des vainqueurs!

  Les gagnantes sont...
*roulement de tambours*

P Marine et Aurélie Malvy!

  Félicitations à nos deux chanceuses, qui avaient reconnu la personne mystère de la photographie, soit Alice Liddle, la véritable fillette qui a inspiré à Lewis Caroll son Alice au pays des Merveilles ( dont je rappelle que l'oeuvre est le thème du salon cette année!).

  Encore bravo à nos deux gagnantes qui remporteront donc deux billets d'entrée chacune, pour se rendre au salon accompagnées ou pour les offrir à deux personnes de leur entourage si elles le souhaitent!


dimanche 1 novembre 2015

La solitude du buveur de sang - Annette Curtis Klause.

The silver Kiss, Laurel Leaf Books, 1992 - Delacorte young readers, 2009 - Editions Pocket junior, 1994, 1998.




  Jamais Zoé ne s'est sentie aussi seule et désemparée.
Sa mère agonise à l'hôpital et la seule amie à qui elle pourrait se confier vient de déménager. Un soir, elle rencontre Simon : la solitude, la mort, il connaît. Mieux que personne. Après tout, cela fait trois cent ans qu'il est mort, trois cent ans qu'il est un vampire.




***



  Voilà quelques années déjà que ce livre patientait dans ma PAL. Mon intérêt pour cet ouvrage remonte à mes années de primaire : je devais en CE1 ou CE2 lorsque le livre Tout savoir sur les vampires, les monstres, etc de Paul Van Loon (que j'empruntais en boucle à la bibliothèque communale) recommandait sa lecture en vantant ses nombreuses qualités. Je l'avais alors cherché en vain, avant de tomber dessus tout à fait par hasard il y a trois ans, lors d'une foire aux livres. La nostalgie (oui, encore) de cet Automne m'a poussé à l'exhumer de la pile "spécial Halloween" et à le découvrir enfin...


  Zoé est une adolescente de 17 ans discrète et renfermée, surtout depuis l'annonce du cancer de sa mère. Maintenant, cette dernière vit à temps plein à la clinique et son père y passe ses journées, délaissant la jeune fille au domicile. Redoutant la nouvelle du décès imminent de sa mère, Zoé redoute la moindre sonnette, le moindre coup de téléphone qui pourrait annoncer la catastrophe. Parce que sa seule amie s'apprête à déménager, elle anticipe la solitude qui va prochainement s'abattre sur elle... Et, alors, au gré d'une ballade à la nuit tombée, elle rencontre par hasard Simon. Évanescent, presque transparent, le jeune adolescent étrange et sauvage semble tout aussi attiré vers elle qu'elle est fascinée par lui. Ses manières et son vocabulaire sont d'un autre âge, il apparaît subitement à la nuit tombée, tient des discours étranges... Mais qui est donc ce garçon atypique à plus d'un titre? D'autant plus qu'une vague de meurtres a récemment débuté en ville et fait les choux gras de la presse locale, alors n'est-il pas dangereux pour Zoé de se lier ainsi à un jeune inconnu? Très vite, pourtant, il lui raconte sa vie et son étrange histoire : âgé de plusieurs siècles et venu d'Angleterre, il a été transformé en vampire par son propre petit frère il y a plus de 300 ans. L'histoire est sombre, incroyable, complètement fantasque. Et pourtant, entre la jeune fille qui n'attend plus rien de la vie et le jeune non-mort, une relation se noue.


  Vous aurez tous certainement pensé à Twilight / Fascination en lisant le résumé et , j'en suis sûr, vous serez tous exclamé avec agacement "Mais quel est donc encore cet énième plagiat !?". Pourtant, il n'en est rien puisque nous avons là de la "bit-lit avant la bit-lit", le roman d'A.Curtis Klause ayant été écrit près de douze ans avant celui de Stephenie Meyer! Quoi d'autre? Il est aussi bien meilleur! The silver kiss (titre original) est d'une qualité bien supérieure à Twilight, ce qu'on doit à une talentueuse auteur : Annette Curtis Klause, anglo-américaine plusieurs fois diplômée en littérature et bibliothéconomie, a été également plusieurs fois récompensée pour ce premier roman.

 la réédition, dont la couverture évoque volontairement Twilight...

  Plus qu'une simple fiction fantastique pour adolescents et jeunes adultes, The silver kiss est habité d'une douce mélancolie et d'une profonde poésie, tant dans le style que la symbolique suggérée. Ce livre raconte la rencontre de deux personnes que tout oppose à un moment clef de leur vie, et aborde à travers cette relation de nombreux sujets délicats comme la mort, la relation aux adultes, le deuil... Grâce à Simon, Zoé apprend à accepter la mort tandis qu'elle l'aide à prendre goût à la vie. Tous deux vivent une courte aventure, forte et ambiguë, tandis qu'ils sont confrontés à la brutalité des meurtres sanglanst qui secouent la ville. Cette dimension, par ailleurs, évoquera davantage les romans d'Anne Rice ou Laisse Moi entrer, adapté au cinéma sous le titre Morse : parallèlement à l'histoire d'amour et à la lecture psychologique, les péripéties transposent en effet le mythe classique du vampire gothique dans un milieu urbain violent mais raconté avec talent.

Annette Curtis Klause

  Je me suis beaucoup attaché aux personnages et la fin, quoi qu'irrémédiable, est une chute très satisfaisante et d'une très belle logique face aux parcours des deux protagonistes... J'ai refermé The silver kiss très satisfait de cette découverte à la fois horrifique et poétique, qui mériterait d'être rééditée. D'ailleurs, la dernière réédition américaine comportait des goodies exceptionnels, à savoir deux nouvelles (l'une faisant office de préquelle et l'autre de suite) encore inédites en france mais que j'aimerais beaucoup découvrir!

En bref : Loin de Twilight et plus proche d'Anne Rice et de Morse, ce conte glacial et urbain réactualise le mythe du vampire dans une fable poétique, sensuelle et fantastique sur la mort et le deuil. Habité d'une forte dimension psychologique, The silver kiss est aussi un roman jeunesse très bien écrit, avec une histoire horrifique impeccablement bien dosée. Un roman de qualité qui mérite d'être redécouvert!