Sexy, Harper Collins Children's Books, 2006 - Editions Gallimard (trad. de D.Ménard), 2007 - Editions Folio, 2009.
"C'était en novembre, un mardi après l'entraînement de natation. La
chose avec Mr Tracy, le prof d'anglais de Darren. La chose c'est en ces
termes que Darren y penserait par la suite. La chose, un mot vague,
indéfini. La chose qui n'était pas arrivée de toute façon."
Après ce jour, après ce qui s'est passé (mais s'est-il vraiment passé quelque chose?), la vie est différente. Darren est différent.
Rien n'est plus comme avant. Ses amis, sa famille, même les gens censés être des adultes responsables ne sont plus comme il les voyait. En qui Darren peut-il avoir confiance désormais?
Après ce jour, après ce qui s'est passé (mais s'est-il vraiment passé quelque chose?), la vie est différente. Darren est différent.
Rien n'est plus comme avant. Ses amis, sa famille, même les gens censés être des adultes responsables ne sont plus comme il les voyait. En qui Darren peut-il avoir confiance désormais?
Joyce Carol Oates explore, avec son inégalable justesse, la quête identitaire d'un jeune de seize ans dans un monde où il n'a plus de repères. Et face à une société pleine de préjugés.
***
"Les gens voyaient chez les autres ce qu'ils voulaient voir, et non pas ce qu'il y avait vraiment."
Ne vous fiez pas au titre léger. Ne vous fiez pas à cette couverture, ni à celles des autres éditions, toutes aussi lascives. Ce roman est loin de la bluette d'ados ou de l'intrigue new-érotique que vous imaginerez en survolant l'ouvrage au détour d'un rayon. Et ça, on peut le savoir sans même l'ouvrir, tout simplement parce que l'auteure est ... Joyce Carol Oates. Joyce Carol Oates, presque 80 ans et une soixantaine de romans à son actif, est la femme de Lettres qui a su se distinguer en devenant l'écrivaine la plus prolifique des Etats-Unis sans jamais tomber dans un travail à la chaine standardisé. Pour celle qui est membre de l'Académie américaine et qui fut déjà deux fois finaliste du prix Nobel, l'écriture est pour elle un sport de haut niveau, une performance qui fait presque toujours l'unanimité.
Joyce Carol Oates choisit toujours des sujets percutants, scandaleux, ou alors c'est l'approche qui se fait provocante lorsqu'on s'imagine un thème trop sage (ce roman s'est d'ailleurs vu interdit dans certaines bibliothèques américaines!). Son style, son phrasé minutieusement choisi même lorsqu'il semble spontané ou jeté à la hâte sur le papier, est comme un venin délicieux et addictif qui s'insinue dans vos veine de lecteur. Il vous tient en hypnose toute la nuit, yeux écarquillés, souffle suspendu : encore un chapitre, encore chapitre... Et cette fois encore, elle vient gratter le papier là où ça fait mal, où le plus grand nombre détourne le regard.
Darren est un jeune éphèbe de 16 ans, nageur dans l'équipe de natation du lycée à la beauté d’Apollon qui suscite la fascination des filles comme des garçons, des hommes comme des femmes. Et pourtant, tiraillé entre ses pulsions d'adolescent naissantes, la bienséance imposée à la maison, la timidité, et le désir ambivalent de plaire, Darren est loin d'être bien dans sa peau. Confronté à une attitude équivoque de son charismatique professeur d'anglais, Darren fuit et tente de se convaincre qu'il a mal interprété. D'ailleurs, la situation ne se reproduit jamais. Puis, les amis populaires de Darren, persuadés d'être sous-notés en anglais parce qu'ils se consacrent davantage au sport qu'aux études, fomentent une vengeance des plus sournoise en accusant leur professeur de pédophilie. Dès lors, la rumeur enfle, les accusations se multiplient, et l'univers de cette petite bourgade trop bien proprette s'écroule.
Si une telle histoire avait été racontée par n'importe qui d'autre, je m'en serais détourné. Parce risque de tomber dans les clichés, dans le pathos, ou dans un mauvais pseudo fait-divers. Mais voilà, c'est Joyce Carol Oates qui, comble du comble, s'adresse ici à un lectorat adolescent. Vous l'aurez cependant deviné, le propos est tout aussi pertinent pour un public adulte (la preuve en est de cette édition poche parue chez folio, et non dans une collection jeunesse). Car l'auteure aborde tant de choses : sans jamais tomber dans le manichéisme, elle traite autant de la complexité de l'adolescence, de la construction identitaire et de la famille que, en filigrane, des amalgames dangereux qui naissent du dégout de ce qui dérange, de "ce qui est autre". Dans une atmosphère anxiogène et dérangeante, ce roman met en lumière l'hypocrisie d'une communauté trop bien pensante avec brio.
En bref : Un regard juste et incisif sur le monde adolescent que vient recouper un brillant récit sur la monstruosité ordinaire d'une société dite "comme il faut".
Joyce Carol Oates choisit toujours des sujets percutants, scandaleux, ou alors c'est l'approche qui se fait provocante lorsqu'on s'imagine un thème trop sage (ce roman s'est d'ailleurs vu interdit dans certaines bibliothèques américaines!). Son style, son phrasé minutieusement choisi même lorsqu'il semble spontané ou jeté à la hâte sur le papier, est comme un venin délicieux et addictif qui s'insinue dans vos veine de lecteur. Il vous tient en hypnose toute la nuit, yeux écarquillés, souffle suspendu : encore un chapitre, encore chapitre... Et cette fois encore, elle vient gratter le papier là où ça fait mal, où le plus grand nombre détourne le regard.
"Quand on est petit, on voit presque toujours l'activité de son père sous une lumière spéciale. Après, on comprend. Et le père comprend qu'on comprend."
Darren est un jeune éphèbe de 16 ans, nageur dans l'équipe de natation du lycée à la beauté d’Apollon qui suscite la fascination des filles comme des garçons, des hommes comme des femmes. Et pourtant, tiraillé entre ses pulsions d'adolescent naissantes, la bienséance imposée à la maison, la timidité, et le désir ambivalent de plaire, Darren est loin d'être bien dans sa peau. Confronté à une attitude équivoque de son charismatique professeur d'anglais, Darren fuit et tente de se convaincre qu'il a mal interprété. D'ailleurs, la situation ne se reproduit jamais. Puis, les amis populaires de Darren, persuadés d'être sous-notés en anglais parce qu'ils se consacrent davantage au sport qu'aux études, fomentent une vengeance des plus sournoise en accusant leur professeur de pédophilie. Dès lors, la rumeur enfle, les accusations se multiplient, et l'univers de cette petite bourgade trop bien proprette s'écroule.
" Il n'était pas méfiant, il ne réfléchissait pas beaucoup aux motivations des autres, ayant déjà du mal à comprendre les siennes."
Si une telle histoire avait été racontée par n'importe qui d'autre, je m'en serais détourné. Parce risque de tomber dans les clichés, dans le pathos, ou dans un mauvais pseudo fait-divers. Mais voilà, c'est Joyce Carol Oates qui, comble du comble, s'adresse ici à un lectorat adolescent. Vous l'aurez cependant deviné, le propos est tout aussi pertinent pour un public adulte (la preuve en est de cette édition poche parue chez folio, et non dans une collection jeunesse). Car l'auteure aborde tant de choses : sans jamais tomber dans le manichéisme, elle traite autant de la complexité de l'adolescence, de la construction identitaire et de la famille que, en filigrane, des amalgames dangereux qui naissent du dégout de ce qui dérange, de "ce qui est autre". Dans une atmosphère anxiogène et dérangeante, ce roman met en lumière l'hypocrisie d'une communauté trop bien pensante avec brio.
Joyce Carol Oates
"C'était peut-être un peu pathétique, cette volonté de vouloir absolument être aimé, d'appartenir à quelque chose. De vouloir que les autres pensent qu'il était l'un d'eux."
En bref : Un regard juste et incisif sur le monde adolescent que vient recouper un brillant récit sur la monstruosité ordinaire d'une société dite "comme il faut".