lundi 20 mai 2019

Au service secret de Marie-Antoinette, tome 1 : l'enquête du Barry - Frédéric Lenormand.

Éditions de la Martinière, 2019.

  Récemment mariée au roi Louis XVI, Marie-Antoinette trouve ce nouveau statut bien ennuyeux. Les bals et les atours ne suffisent pas à la divertir. Un vol de bijoux vieux de plusieurs années va lui permettre d’exercer d’autres talents, ceux d’enquêtrice.

  Pour cette mission, elle s’entoure de deux détectives amateurs : Rose, modiste, et Léonard, coiffeur. Mais le problème est que ces deux-là se détestent. Rose est une maniaque de l’organisation, Léonard est un noceur. Ils ne s’adressent la parole que pour s’insulter. Ils devront pourtant apprendre à s’entendre s’ils veulent gagner leur place à la Cour.

  Leur enquête débute dans la ville, où deux corps viennent d’être retrouvés assassinés. Ces meurtres ont-ils un lien avec le vol de bijoux ? Les deux serviteurs parviendront-ils à retrouver le butin comme le souhaite la reine ?
   Derrière son éventail et ses hautes coiffes, Marie-Antoinette va jouer un tout autre rôle que celui qu’on lui assigne.

  Une nouvelle comédie policière qui nous plonge avec délice dans les souterrains et les antichambres de Versailles. Derrière son éventail et ses fanfreluches, la reine surveille les moindres mouvements de la Cour. Aidée par un duo d’enquêteurs pittoresques, un vol de bijoux sera sa première enquête.

*** 

  Après Voltaire et sa divine Émilie, après Madame de Sade et son marquis, et après Raymond Février l'enquêteur travesti, Frédéric Lenormand s'empare d'autres figures historiques pour les revisiter à la sauce polar. Parce qu'il a toujours voulu écrire sur le personnage de Marie-Antoinette, il choisit cette fois de placer ce premier tome d'une nouvelle série en 1774, et d'imaginer une intrigue qui s' "ourdit" (au sens figuré comme au sens propre, c'est à dire celui de la création textile) dans le cercle des rubans et de la coquetterie de Marie-Antoinette.

Portrait peint par Gautier Dagoty, dont nous assistons à la confection dans le roman.

  Tout commence en 1770 : les bijoutiers Broehmer et Bassenge ont rendez-vous à Trianon, pour présenter à Madame du Barry une parure de diamants offerte par le roi Louis XV. Mais au cours de la soirée, tandis que les deux joaillers patientent, un incendie créé la panique dans le parc, détournant l'attention de tous... et permettant le vol des bijoux, mais aussi d'une toile jusqu'alors exposée dans le pavillon. Les voleurs ne peuvent être que parmi les domestiques, mais puisqu'on ne démasque personne, on se contente d'en licencier plusieurs, pour l'exemple. Quelques années plus tard, Marie-Antoinette, dauphine devenue reine, décide de se composer sa propre police secrète pour ne pas rester reléguée au rang de potiche (autrichienne) de France. Parce que personne (et surtout pas le Roi) ne se doutera de quoi que ce soit tant que la souveraine gaspillera son temps et l'argent du pays dans les fanfreluches, Marie-Antoinette sélectionne ses futurs agents secrets parmi la fine fleur de l'industrie du luxe : Rose Bertin, modiste dont le tout Paris s'arrache les créations, et Léonard-Alexis Autié, coiffeur aux créations capillaires de... grande envergure. Persuadés que la Reine fait appel à eux pour entrer à son service purement esthétique, les deux artisans se précipitent aux portes du boudoir royal... pour apprendre qu'on les charge de retrouver les bijoux disparus de la du Barry! Il se trouve justement que les domestiques licenciés après la mystérieuse affaire sont en train de tomber comme des mouches, et qu'eux-mêmes ou leur proches possèdent les fragments découpés d'une toile de maître. Entre les rubans et les frisures, les deux apprentis agents sont prêts à tout pour résoudre le mystère du vol et démasquer l'auteur de ces crimes. Mais pour ça, encore faudrait-il qu'ils puissent se supporter...

 Léonard et Rose s’affairant autour de la reine.

"—Il parait que je suis une personne mal grattée! C'est ce que nous a dit le Grand Prévôt quand il nous a congédiés! Trente d'un coup! Des personnes mal grattées! Moi qui prends un bain trois fois par an!
  
  Personna non grata, corrigea Rose pour elle-même."

  Pas de doute : avec son titre en clin d’œil à la pop culture, ce roman est bien un Lenormand, ce qui se confirme très vite dès qu'on entame la lecture. Derrière cette couverture flashy qu'on pourrait presque croire destinée à un public young adult, on retrouve tout ce qui a fait le succès de l'auteur : les phrases bien tournées, l'ironie des situations, et certains propos anodins dont le contenu, volontairement anachronique, est un clin d’œil adressé directement au lecteur. Il en est ainsi, comme le titre de la série, des intitulés de chaque chapitre, soit autant de détournements délicieusement drôles comme "cinquante nuances de gras", "double assassinat dans la rue morne", "mon curé chez les Bretons" ou encore "le bonheur est dans le pré (courrons-y vite)".

  Les saillies verbales, le lecteur y était habitué dans la série des Voltaire mène l'enquête, se situant quelques quarante ans avant Au service secret de Marie-Antoinette. Pour autant, l'auteur transpose-t-il juste sa recette à une autre époque, nous sert-il le même bouillon avec de nouveaux personnages? On aurait pu le craindre qu'on au aurait pris un égal plaisir malgré tout, mais point du tout. Si le cadre très XVIIIème siècle, évident, est le premier point commun, et le genre du pastiche de polar historique, le second, ce sont les deux seuls traits que partagent les deux séries. Le ton, tout en étant tout aussi léger, est moins burlesque, et les personnages moins vaudevillesques que peut l'être son Voltaire. L'humour de situation est ici moins appuyé, plus subtil, très en adéquation avec l'univers de la mode et de l'esthétique dans lequel on évolue.

Gravure représentant l'intérieur du Grand Mogol, la boutique de Rose Bertin.

"La modiste et le coiffeur patientaient en échangeant à mi-voix des propos aigre-doux et des gestes brusques. A eux deux, ils piétinaient l'obligation de politesse affable imposée par la Cour."

  Les audaces que se permet l'auteur n'en restent pas moins tout aussi exquises : inventant un service secret dirigé depuis le boudoir même de la Reine, Frédéric Lenormand transforme Marie-Antoinette en nouvelle M, et fait de sa dame d'atours Madame de Chimay la nouvelle Q, un parallèle évident lorsque cette dernière distribue gadgets et armes de défense à nos deux pseudo-agents. Même, lorsque l'un deux se trouve en fâcheuse posture sur les toits de Paris, il est sauvé in extremis par une troupe d'agents de sauvetage déguisés en ramoneurs : le (tenez-vous bien) M.A.5! Qu'on se rassure : ses petites extravagances n'altèrent en rien la solidité du récit, et l'une des astuces la mieux pensée par l'auteur est celle de rarement faire intervenir Marie-Antoinette directement. Entourée de ses dames de compagnie qui jouent les intermédiaires, elle se contente de plus souvent de tirer les ficelles à l'abri derrière son éventail, apportant ainsi tout le mystère nécessaire à la nouvelle fonction que F.Lenormand lui assigne sans égratigner la figure véridique du personnage.


"L'impératrice Marie-Thérèse conseillait à sa fille de mettre son grain de sel dans la politique française. Elle l'avait élevée pour devenir reine de France, non pour être une potiche autrichienne sur une commode française."

  Pour autant, le défi relevé encore et toujours est celui de parvenir à puiser la source à tant de fantaisie dans la grande Histoire, ses faits réels et ses vrais protagonistes : cette anecdote de collier de la du Barry s'inspire des prémices de l'affaire du collier de la reine, parure commandée en 1772 par Louis XV aux joailliers Boehmer et Bassange pour sa favorite, puis qu'on tenta de recycler plus tard en la proposant à Marie-Antoinette, qui l'aurait refusée. Ce sont ces même bijoutiers qui créeront ensuite le célèbre collier de la reine qui fit couler tant d'encre, et Frédéric Lenormand s'amuse à y glisser un clin d’œil avec toute l'espièglerie qu'on lui connait.

 Le véritable Léonard.

  Les deux personnages principaux, Rose Bertin et Léonard-Alexis Autié, ont également véritablement existé. Elle fut la modiste la plus célèbre de l'époque (et la première femme créatrice de mode et entrepreneuse de l'Histoire), et lui le coiffeur à l'origine des coupes et perruques vertigineuses qui faisaient fureur à la cour. Dès 1774, ils sont invités sur demande de Marie-Antoinette à relancer la revue de mode Le journal des Dames et entrent tous les deux au service de la Reine. S'il se racontait que les deux artisans s'entendaient "comme deux sœurs", on sait aussi que ce n'était pas sans une certaine jalousie de leurs talents respectifs ; leur personnalité extravagante et romanesque, telle qu'elle est restituée dans les anecdotes historiques en fin d'ouvrage, a servi de modèle au caractère que Frédéric Lenormand a recomposé pour les besoins de son histoire : entre crêpages de chignon (une métaphore plus que jamais appropriée) et investigations, tous les deux cherchent sans cesse à se damer le pion pour entrer le premier dans les petits papiers de la Reine.

 Rose Bertin.

"—Intriguant!
—Crampon!
—Franc pétaud!
—Viedasse!
—Sac à merde!
  Ce fut le pire mot de la série qui tomba dans l'oreille où il ne devait pas aller.
—Qu'est-ce qu'un "sakamère"? demanda la reine avec une pointe d'accent germanique.
  C'était le moment de faire preuve d'invention ailleurs que dans l'arrangement des rubans et des colifichets.
—Le sakamère... est une essence exotique dont les feuilles... prennent la couleur de la saison. Ses fruits ressemblent... à des boules de Noël.
—Mais quelle chose merveilleuse! dit la reine. Vous devriez me coiffer au sakamère!
  Rose lui enveloppa le haut des cheveux d'un bonnet sur lequel elle accrocha des feuilles découpées dans un papier crépon, des boules et des guirlandes improvisées. Marie-Antoinette se montra aussitôt à sa dame d'atours.
—Ma chère amie, regardez : je suis en sakamère!
  On comprit autre chose mais on applaudit."


En bref : Le premier tome prometteur d'une nouvelle série, qui pastiche avec délice et espièglerie le roman d'espionnage historique. Les personnages de Rose Bertin et de Léonard Autié sont merveilleusement réinventés par F.Lenormand, et cette intrigue légère évoluant entre les alcôves de Versailles et les boutiques de mode est à savourer entre les macarons et le Champagne.

Merci à l'agence Anne & Arnaud pour cette lecture.

jeudi 16 mai 2019

Picnic at Hanging Rock - mini-série de Michael Rymer d'après le roman de Joan Lindsay.

Picnic at Hanging Rock

Une mini-série de Alice Addison d'après Pique-nique à Hanging Rock, de J.Lindsay.

Avec : Natalie Dormer, Lily Sullivan, Lola Bessis, Samara Weaving, Madeleine Madden, Inez Curo, Ruby Rees, Yael Stone...

Première diffusion originale : Printemps 2018 sur Showcase et Amazon Prime
Première diffusion française : Eté 2018 sur Canal+

Sortie dvd française : 20 mars 2019.


  Australie, 1900. L'établissement privé Appleyard est un pensionnat où l'on apprend les bonnes manières aux jeunes filles. Lors d'un pique-nique organisé par l'institut à l'occasion de la Saint-Valentin, trois élèves ainsi que l'une de leurs professeures se volatilisent à proximité d'une vertigineux rocher, où le temps semble s'arrêter. Enlèvement ? Fugue ? Chute mortelle ? Alors que les recherches commencent, et que l'on en apprend davantage sur les pensionnaires et leur directrice, le mystère semble s'épaissir... 

***

  L'été dernier, nous vous avons parlé d'un de nos grands coups de cœur de lecture : Pique-nique à Hanging Rock de Joan Lindsay. Grand classique de la littérature australienne écrit en 1967, ce roman inclassable qui semble emprunter à plusieurs genres plonge le lecteur dans le plus insondable des mystères. Somptueusement adapté en 1975 par le cinéaste Peter Weir et source d'inspiration majeure de l’œuvre de Sophia Coppola (Virgin Suicide en tête), Pique-nique à Hanging Rock nous raconte la disparition de trois collégiennes et d'une professeure en 1900, au cours d'un pique-nique organisé sur un gigantesque et étrange promontoire rocheux anciennement lieu de cultes aborigène. Robes de mousseline blanche vaporeuses, narration nébuleuse, relents d'ésotérisme, nature sauvage d'un côté et convenances corsetées de l'autre... Un roman au final énigmatique qui a fait couler beaucoup d'encre, interroge encore aujourd'hui, et laisse le lecteur dans une sorte de torpeur longtemps après avoir refermé le livre...



  Il est bien connu que c'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleures soupes, et le succès des adaptations ou des réalisations d'aujourd'hui tient quand même beaucoup, il faut l'admettre, à une certaine forme de nostalgie. L'aura toujours présente de ce roman en faisait une base très prometteuse pour une nouvelle transposition près de 40 ans après le film de Peter Weir, et quoi de mieux que le petit écran pour la concrétiser? Les séries bénéficient en effet désormais de moyens qui égalent le cinéma, et offrent un résultat qui le surpasse souvent ; les showrunners ne s'y sont pas trompés en passant par ce format pour adapter avec une plus grande fidélité des romans fleuves ou de grandes sagas littéraires.

Natalie Dormer interprète la rigide et glaciale Mrs Appleyard.

  Mais voilà, Pique-nique à Hanging Rock n'est pas une saga, et le roman est relativement court. Comment justifier, dès lors, une mini-série en six épisodes quand l'intégralité de la trame pourrait être transposée à l'écran en deux heures? La volonté du scénario (écrit à quatre mains par Alice Addison et Beatrix Christian) devient vite très claire : face aux nombreuses interrogations soulevées par le roman, l'adaptation utilisera les six heures de la série pour explorer un peu plus toutes les pistes de l'histoire. L'idée est intéressante et le scénario, passé le premier épisode qui s'achève sur la disparition des jeunes filles, se poursuit sur plusieurs axes narratifs continus : les suites du drame et l'enquête d'un côté, et de l'autre, s'ouvrant comme en arborescence, des flash-back imbriqués les uns dans les autres qui permettent, petit à petit, de reconstituer les origines sociales des disparues, la nature de leurs relations, et les circonstances de leur disparition.


  Cette construction du scénario donne le tournis, ce qui a rebuté certains critiques et téléspectateurs comme elle en a séduit d'autres, d'où des avis très mitigés. Les pièces de puzzle sont nombreuses et pour autant, leur assemblage ne mène pas plus que le roman à une vraie résolution du mystère. Cependant, pour peu que l'on soit attentif pendant visionnage de la série et aux nombreux symboles disséminés dans la mise en scène ou les dialogues, et qu'on les recoupe avec les éléments brodés par la scénariste à partir de l'intrigue de Joan Lindsay, on aboutit à un éclairage loin d'être inintéressant ( et ce même s'il parlera davantage aux lecteurs du roman qu'aux néophytes, qui risquent d'être complètement largués...). Dans la continuité de l'opposition entre une Mère Nature indomptable d'un côté et une société corsetée de l'autre, la série suggère plus que jamais le besoin de liberté des jeunes filles, prisonnières d'un monde aux règles qui ne leur conviennent pas. Toutes se savent, dès l'adolescence, contraintes à un avenir ou une condition qui va les assujettir (Elles devront se marier si elles veulent une situation, accepter d'être "domptées" pour survivre, ou cacher leurs vraie nature si elle n'est pas considérée comme "respectable"). Si leurs aspirations paraissent bien modernes (trop?) pour l'époque, elles suggèrent une nouvelle lecture féministe du roman, plus que jamais d'actualité.
  Cette volonté de creuser dans la série les thèmes devinés à la lecture du livre va parfois un peu trop loin, et on perd alors en délicieux mystère suggestif ce que l'adaptation choisit d'aborder de manière trop franche. La sensualité latente des personnages, par exemple effleurée dans le roman, est mise en exergue à l'écran, tant et si bien qu'on se demande si l'on est pas passé à côté de quelque chose pendant la lecture, ou si les scénariste n'extrapolent pas carrément là où ça n'était pas nécessaire.


  Dans ce désir d'approfondir le passé et les secrets de chaque personnage, l'axe narratif le plus délicat est peut-être celui qui vient raconter les origines mystérieuses de la directrice, Mrs Appleyard, interprétée par l'excellente et glaciale Natalie Dormer. Dans le roman, on ne sait rien de cette Anglaise dont la seule apparence suffit à inspirer la rigueur et l'honorabilité de son collège, bien que l'auteure insiste sur l'importance de cette allure qui pourrait tout à fait être trompeuse. Il aurait été dommage de passer à côté d'un tel potentiel, aussi le scénario de la série rebondit sur cette petite suggestion pour imaginer un passé de mystificatrice à Mrs Appleyard. Une idée excellente par certains côtés (elle permet de psychologiser sa relation ambiguë avec la petite Sara, par exemple : en leur offrant des origines sociales similaires, le scénario vient expliquer les sentiments d'attraction et de répulsion entremêlés que la directrice exprime à l'égard de l'orpheline) mais qui fait s'engluer l'intrigue par d'autres (la crainte d'imaginer son ancien époux à ses trousses, et qu'elle soupçonne d'être responsable de la disparition des jeunes filles : probablement l'ajout de trop, car il insinue de façon trop importante la possibilité d'une résolution de l'intrigue aux spectateurs qui ne connaissent pas l'issue du roman).


  Côté visuel, la série fait fort : les costumes et les décors sont somptueux, ne nous le cachons pas. Là encore, tout joue sur les contrastes et on distingue très vite la confrontation de deux univers : les grands espaces extérieurs indomptés (magnifiques et impressionnants paysages du bush australien, parfois proches de la jungle), et les intérieurs capiteux, étouffants, et opulents du collège Appleyard. Idem pour les vêtements, dont la blancheur virginale et légère des jeunes filles s'oppose aux robes criardes (mais non moins sublimes) et à l'élégance rigide de la directrice. 



  La mise en scène de Michael Rymer et la photographie de Garry Phillips s'inspirent en partie de celles du film de Peter Weir : entre images symboliques, flous artistiques et vertiges grisants. Certaines scènes à l'esthétique éthérée ou à la construction quasi-surnaturelle nous évoquent un univers surréaliste à la Lewis Carroll qui fait son petit effet et s'accorde à merveille à l'intrigue. L'une des approches les plus intéressantes est le montage enchevêtré des scènes se déroulant pendant l’ascension du rocher : par les jeunes filles au début, par Michael lorsqu'il les recherche, puis par Mrs Appleyard à la fin du dernier épisode. Attention, spoiler : conformément à l'éventualité d'un magnétisme quelconque ou d'une faille temporelle, on a à chaque fois le sentiment que ces différents temps s'imbriquent les uns dans les autres, comme si la chronologie sur Hanging Rock n'était pas linéaire, mais circulaire ; les scènes tournent sur elles-mêmes et se répondent en écho dans un assemblage impeccable qui atteint son paroxysme avec la scène finale et les dernières secondes, très bien filmées, hypnotiques.



  Cette atmosphère de rêve éveillé, tantôt lumineux et tantôt sombre, est merveilleusement mise en relief par la musique aérienne et tintinnabulante composée tout spécialement  par Cezary et Jan Skubiszewski. Elle a par ailleurs été récompensée du Screen Music Awards de la meilleure bande originale de série télévisée en 2018.


En bref : Une adaptation ambitieuse du roman de Joan Lindsay qui se propose d'enrichir la trame originale d'éléments supplémentaires concernant les protagonistes. Si le scénario déborde parfois un peu trop à vouloir trop surbroder l’œuvre originale, il offre néanmoins un regard très pertinent sur les destins de ses héroïnes. L'esthétique est travaillée et hypnotique à souhait, et le montage à la fois audacieux et énigmatique, voire parfois éthylique, de certaines scènes remplit son office auprès des téléspectateurs. Cette série est cependant à déconseiller à ceux qui n'ont pas lu le roman d'origine où qui n'y sont pas sensibilisés, et il faut être particulièrement attentif pendant le visionnage pour apprécier totalement ce que cette série a de mieux à offrir malgré la critique mitigée qui en a été faite. Cela reste, à mes yeux, une transposition très intéressante du livre de Joan Lindsay et je la recommande vivement!


Pour aller plus loin...