mercredi 13 avril 2016

Les domestiques - Michael Marshall Smith

The Servants, Earthling Publication, 2007 - Editions Milady (trad. de J.Simon), 2009.



  Vous croyez aux miracles ?
  Mark n’y croit pas. Il a onze ans et trouve sa vie sinistre. Il a dû quitter Londres pour aller vivre dans une ville grise et froide, sur la côte. Sa mère, autrefois si enjouée, est toujours trop fatiguée pour sortir. Et il déteste son nouveau beau-père, qui fait tout pour le contrarier et l’empêcher de s’amuser.
Mark se sent seul et s’ennuie à mourir. Jusqu’à ce qu’il rencontre la vieille dame qui loge en dessous de chez lui. Elle lui offre du thé, des biscuits, un peu de réconfort… et la clé d’un monde ancien et secret où s’affairent d’étranges domestiques. Mark n’imagine pas à quel point cette rencontre va changer sa vie…



***

  Voilà bien six ans que ce roman me faisait envie, l'ambiance se dégageant de sa couverture et de son résumé m'évoquant le film Les autres d'A.Amenabar. Récemment acquis pour ma liseuse, j'en frissonnais d'avance lorsque je me lançais dans sa lecture...

  Et alors? Les domestiques ne mérite pas réellement sa classification "horreur", cependant, je tacherai d'en dire le moins possible pour ne pas spoiler les potentiels lecteurs. Car même si je m'attendais à tout autre chose, je n'ai pas été du tout déçu de ce court roman, qui s'adresse d'ailleurs aussi bien à un jeune lectorat qu'au public adulte auquel il est initialement destiné.


  En entrant dans la peau de Mark, le jeune narrateur plongé en plein cataclysme familial, on se surprend à faire entièrement symbiose avec ses émotions, tant elles sont racontées et transmises avec talent. On vit alors aussi brutalement que lui cette colère impétueuse, propre à l'enfance, qu'il ressent face aux nombreux retournements familiaux (déménagement, abandon du père, jalousie du beau-père, délaissement de la mère...) ainsi que sa joie naïve et spontanée des petits plaisirs immédiats. La force de cette proximité est comme renforcée par le décor de Brighton, cette ville froide et humide où le temps semble suspendu et où l'écriture hypnotique de l'auteur nous fait comme planer entre deux états...

 Le décor cotonneux de Brighton et les maisons face à la mer avec leur semi sous-sol, comme celle habitée par Mark.

  Ainsi immergé dans cette étrange atmosphère, on se laisse glisser dans le nouveau quotidien répétitif et solitaire du jeune garçon, avant que sa rencontre avec la voisine du dessous, qui occupe le semi sous-sol, n'amène progressivement à d'étranges événements. Car le minuscule logement de la vielle dame n'est qu'un sas vers les anciens quartiers des domestiques, utilisés à l'époque d'avant-guerre où la maison était une demeure bourgeoise habitant maîtres et valets. Comme appelé par une voix invisible provenant de ces fondations en ruines, Mark va s'y réfugier de plus en plus souvent, dans le plus grand secret, à l'instar d'un plaisir défendu qui devient addictif...

 L'accès aux quartier des domestiques...

  Et alors, entre les problèmes familiaux qu'il tente de fuir à l'étage, et ce qu'il découvre progressivement au sous-sol, le lecteur  voit se dessiner comme un étrange effet miroir et sombre dans quelque chose de totalement inattendu, où les fantômes des songes les plus étranges deviennent la métaphore du subconscient de l'enfant. Ainsi, plus le récit avance, plus on apprend en même temps que Mark à voir au-delà des apparences et à grandir avec lui... L'histoire gagne alors progressivement en intensité et en émotion, ce que l'on n'aurait pas imaginé en ouvrant cet ouvrage.


"Parfois les choses changent et c'est bien. On va d'un endroit à un autre, on devient différent de la personne qu'on était. parfois le fait que les choses cessent à un sens. La fin signifie un nouveau commencement."

En bref: Je croyais me faire délicieusement peur avec une histoire d'esprit frappeurs, et je me suis finalement laisser envouter par un conte fantastique et onirique superbement bien écrit. Profondément psychologique et stylisé, ce roman très court est à la fois surprenant et brillant, tout en métaphores.

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