jeudi 29 janvier 2015

Les affreusement sombres histoires de Sinistreville, tome 1: Hubert très très méchant - Christopher william Hill.


Osbert the Avengers (Tales from Schwartzgarten #1), Orchard Bokks, 2012 - Éditions Flammarion (trad d'A.Goacolou), 2015.


  Hubert naquit un mardi, dans une famille respectable qui résidait dans un recoin obscur de Sinistreville. Ses parents, qui rêvaient d'élever un génie, accueillirent avec une allégresse non dissimulée la tête aux dimensions impressionnantes et le front haut du petit Hubert.
- Je ne serais pas surpris que votre garçon devienne l'habitant le plus intelligent de notre grande ville, annonça le docteur.
Ainsi commença son histoire...
Hubert ne tarda en effet pas à le montrer d'une manière tout à fait singulière...


***


   Proposé dans le cadre de mon nouveau partenariat avec Flammarion, ce livre avait tout pour retenir mon attention : titre évocateur, synopsis alléchant, et couverture illustrée par Chris Riddle (auteur et dessinateur de Lili Goth!). Tout présumait donc un petit bijou grinçant et gothique en diable!

couverture originale.
  L'histoire prend pour cadre un petit bourg étroit et biscornu qu'on imagine aisément situé dans une Europe rhénane du début du XXème : Sinistreville (Schwartzgarten en VO). La ville, triste et sordide, est quasiment gouvernée par l'INSTITUT, une université très sélecte où l'on rêve de voir son enfant scolarisé, mais où l'on craint tout autant de l'y voir entrer... et pour cause : les professeurs, tous plus horribles les uns que les autres, sont connus pour y torturer les enfants des manières les plus ingénieuses et les plus abominables à la fois. Aussi, lorsque le petit Hubert réussit le concours d'admission, il se trouve vite confronté aux pires sévices de ses instructeurs. Mais le jeune surdoué est allé à bonne école : élevé par Fraülen, gouvernante très particulière, il a bénéficié d'une éducation d'un esprit un peu spéciale Cette dernière, veuve plusieurs fois (on vous laissera deviner pourquoi...), s'est spécialisée dans le meurtre au point d'en faire un art.
  Malmené par des professeurs qui enragent de voir Hubert si intelligent, celui-ci décide d'utiliser à bon escient les conseils de sa nourrice et se retourne contre eux de la manière la plus radicale qui soit. Se prenant à un petit jeu criminel amusant par bien des points, il élimine progressivement chacun des instructeurs...

Plan de Sinistreville, en frontispice du livre.

  L'éditeur ne se trompe pas en faisant référence aux Désastreuses aventures des orphelins Baudelaire de L.Snicket car on y retrouve un ton très similaire. Dépeignant une réalité exagérément (on pourrait dire "théâtralement") morne et sordide, l'auteur offre à ses jeunes lecteurs une approche grinçante et fantaisiste des malheurs humains, pimentée d'un humour décalé pleinement revendiqué. Pour autant, même prévenu, j'ai été surpris de l'audace de C.William-Hill qui va plus loin encore que Lemony Snicket dans l'humour noir : plus qu'une atmosphère caustique, il invente là un héro qui a tout d'un jeune Norman Bates, d'un lointain cousin de Sweeny Todd, ou d'un petit frère d'Hannibal Lecter ; et le politiquement correct, dans tout ça? Il n'y en a pas, et le résultat est jubilatoire!


Carte postale de Sinistreville?

  On s'attache au personnage et on se laisse séduire par la plume de l'auteur, d'une élégance et d'un flegme tout ce qu'il y a de plus britannique, surprenante pour nous conter une telle histoire. Là est toute la réussite de l'ouvrage : d'un style presque précieux et tout en atmosphère parsemée d'éléments faussement candides (détails de décor capiteux et des charmantes boutiques de la ville, descriptions appétissantes de pâtisseries et autres gourmandises alléchantes...), il rend tout l'aspect criminel de l'histoire acceptable, voire délectable (je vous l'ai dit, il n'y a pas de politiquement correct! ;) ). Le plus sanglant des meurtres ou le crime calculé avec la méticulosité la plus chirurgicale est ainsi toujours contrebalancé de détails truculents, d'une mise en scène délirante ou d'un modus operandi tordant à souhait. Les enfants de Timblebach jouent à Jack l'éventreur, et on adore ça!

En bref: Plaisir coupable politiquement incorrect, ce roman grinçant est un petit bijou de noirceur et de fantaisie. N'existent que des oxymores pour le présenter de la plus juste manière : Les affreusement sombres histoires de Sinistreville, c'est une torture gourmande, un délice assassin, du crime enfantin, un sanglant raffinement... A réserver à un public avisé tout de même!



Un grand merci aux éditions flammarion pour cette découverte!


Et pour aller plus loin:


-Découvrez toute la série, avec le tome 2 et les suivants...

2 commentaires:

  1. Ah ça donne envie! J'imagine ça très bien à Heidelberg, pour changer un peu de Londres et de l'Angleterre.

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  2. Je suis impatiente de découvrir ce roman. Ce sera pour très bientôt. :)

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