Les animaux fantastiques
(Fantastic Beasts)
Un film de David Yates,
d'après et scénarisé par J.K.Rowling,
Avec : Eddie Redmayne, Katherin Waterson, Dan Fogler, Colin Farrell...
Le film "Les Animaux Fantastiques" s'ouvre en 1926 alors que Newt
Scamander vient juste de terminer son tour du monde qui avait pour but
de trouver et de réaliser une collection de créatures
magiques. Arrivé à New York pour une brève escale, il aurait pu en
repartir sans incident… C’est sans compter sur un No-Maj (le terme
américain pour Moldu) nommé Jacob , une valise magique
égarée, et l’évasion de certains des animaux fantastiques de Newt,
qui pourraient semer le trouble dans le monde magique et le monde moldu.
(source : Potterveille.com)
***
S'il est bien un univers dont on ne se lasse pas, c'est le Wizarding World de J.K.Rowling, que l'imagination prolifique de l'auteure et sa plume talentueuse ramènent régulièrement à Poudlard. Alors que le huitième film avait laissé des millions de Potterheads orphelins, le site Pottermore puis la pièce de théâtre avaient offert quelques réjouissantes continuités aux admirateurs du sorcier à lunettes. Dès que le projet d'adapter les animaux fantastiques (en fait un bestiaire cité dans les manuels de Poudlard, écrit par Rowling et publié en 2001 au profit d'associations caritatives) s'est répendu, les fans se sont sentis revivre... Et encore plus lorsque J.K.Rowling elle-même fut annoncée au scénario : elle expliqua en effet qu'elle s'était déjà tellement représentée et appropriée le personnage principal de Norbert Dragonneau (le vrai/faux auteur du Bestiaire de Poudlard, aventurier et magicozoologiste), qu'elle ne se sentait pas de le céder à un autre scénariste.
Voilà comment, après cinq ans sans le rendez-vous cinématographique quasi-annuel potterien, je me retrouvais, aussi enthousiaste qu'à mes dix ans du premier film, à la projection de ces Animaux fantastiques. Dès les premières images, les notes du célèbre thème musical de J.Williams nous rappellent ce que nous venons voir, avant qu'on se trouve propulsés dans un univers visuel et historique totalement nouveau. Exit l'Angleterre contemporaine rétro-gothique, Bonjour le New York jazzy des années 1920. Dans cette sublime cité Art Déco partagée entre puissance politique et monde ouvrier, coexiste un univers magique secret dont l'anonymat est mis à mal par des manifestations surnaturelles destructrices incontrôlées dans toute la ville. Tandis que le MACUSA (équivalent américain du Ministère de la magie britannique ) tente de réguler les preuves de l'existence de la sorcellerie et que les forces politiques en font un tremplin dans leurs campagnes, un groupuscule sectaire et extrémiste mené par l'austère Marie-Lou Bellebosse appelle les populations à une nouvelle chasse aux sorcières. C'est dans ce contexte trouble que le magicozoologiqte Norbert Dragonneau arrive à New York, la valise sans fond débordant de créatures magiques dans l'étude et la protection desquelles il s'est spécialisé...
Évidemment, on aurait pu s'attendre à quelque chose de purement commercial et/ou sombrer d'emblée dans la critique facile (Parce qu'il est de bon ton de cracher sur une franchise qui marche, et ce même si le produit est de qualité). Belle erreur, car ce film est un divertissement des plus réussi, où l'on distingue clairement l'écriture de J.K.Rowling! Ni une suite, ni une prequelle, ce film est une "extension" de l'univers qu'elle a créé dans Harry Potter : la preuve supplémentaire qu'elle a réussi à penser un monde dont les tenants et aboutissants, les codes, l'histoire et l'évolution, dépassent de loin le cadre de la saga du sorcier à la cicatrice. Grâce à quelque clins d’œil (juste ce qu'il faut), ce spin-off fignolé jusqu'au détail existe pour lui-même, bien au-delà de sa filiation avec Harry Potter.
L'univers de la sorcellerie tel que pensé par Rowling s'accorde comme par enchantement aux trépidantes "Années folles" et à la culture américaine. Le siège du MACUSA, secrètement installé sous les arcades gothiques du Woolworth Building, ressemble à une interprétation poudlardienne de la bourse de Wall Street, avec cet immense cadran qui indique en temps et heure les infractions au code de la magie et rythme cette petite fourmilière.
La ville, magnifiée par ses lignes art-déco rutilantes, semble échappée d'un comics rétro-futuriste et offre un décor de choix pour une chasse aux créatures fantastiques sur les toits des buildings. Entre les références, les détournements historiques ou les audaces esthétiques, le spectateur est conquis par ce nouveau cadre décor.
Attardons-nous à présent sur les protagonistes, dont on notera qu'ils sont tous ... adultes! Même s'ils ont gardé une âme d'enfant évidente, le quatuor de cette nouvelle histoire propose une intéressante galerie de personnages qui, si elle est quelquefois un peu caricaturale, à le mérite d'être à mille lieues du trio de la saga souche. Porpentine Goldstein, jouée par Katherine Waterston, pourrait paraître bien vite barbante si elle ne révélait pas progressivement un caractère et une volonté très attachants. Sa sœur Queenie, son extrême opposée, rappelle NECESSAIREMENT la féminine Sugar jouée par M.Monroe dans Certains l'aiment chaud, toute en minauderie et en fragilité. Eddie Redmayne, dont les éternels rôles de jeunes premiers m'agaçaient un peu (mais je n'ai pas encore vu Une incroyable histoire du temps et Danish Girl, il est vrai...), campe un outsider amusant à la timidité barrée mais dont le côté asocial nous met quand même un peu mal à l'aise (j'aurais préféré un jeu plus subtil, à la façon de la timidité doucement candide de Ned le pâtissier dans Pushing Daisies, qui nous l'aurait rendu plus sympathique).
Pour les rôles secondaires, Colin Farrell est très convaincant en ministre obstiné et mystérieux ( en plus ne nous révéler une surprise de taille en fin de film... alors ne vous faîtes pas spoiler!), mais j'ai surtout adoré le jeu glacial de Samantha Morton en Marie-Lou Bellebosse, elle que je ne connaissais que dans le rôle titre d'une vieille adaptation télévisée de Jane Eyre.
Un autre point à aborder et qui m'a particulièrement plu, c'est que cette histoire est magnifiée par l'écriture de J.K.Rowling, et c'est précisément en cela que cette production se distingue d'un film purement commercial : on retrouve la sensibilité propre à l'auteure et des thèmes qui lui sont chers. En plus d'aborder la différence, l'insoumission face à l'oppression du pouvoir en place, et la douloureuse complexité du passage vers l'adolescence, il y a aussi toute une réflexion métaphorique certes, mais furieusement à propos. En effet, impossible de ne pas faire le lien avec ces sujets très actuels que sont l'obscurantisme ou le fanatisme. En cela, et aussi peut-être à cause de quelques scènes qui pourraient heurter les plus jeunes, on perçoit clairement ce film comme un divertissement éclairé qui s'adresserait aux fans de la première heure aujourd'hui jeunes adultes plutôt qu'à de jeunes spectateurs. Une preuve de plus de l'universalité et du caractère trans-générationnel d'un univers qui fait encore et toujours mouche.
L'univers publicitaire des Années Folles, revu à la sauce sorcellerie pour le film.
En bref : J.K.Rowling se renouvelle une fois encore tout en poursuivant d'explorer le même univers... pourtant si différent tout en restant si familier au lecteur/spectateur. Ce film, véritable divertissement éclairé et esthétique convaincra les fans de la première heure comme il pourra séduire les autres.
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